Alien, le Huitième
Passager
de Ridley Scott en 1979. Aliens
de James Cameron en 1986. Alien 3
de David Fincher en 1992. Et puis... cinq ans plus tard, Alien,
la Résurrection
de Jean-Pierre Jeunet... Avant que la 20th
Century Fox
ait le malheur de proposer les crossover Aliens
VS Predator
et Aliens vs. Predator: Requiem
respectivement réalisés par Paul W. S. Anderson et Greg et Colin
Strause en 2004 et 2006 et que Ridley Scott ne reprenne le flambeau
de la saga avec les préquelles Prometheus
en 2012 et Alien : Covenant en
2017, c'est donc à un français que fut confié le tournage du
quatrième opus. Une tâche complexe si l'on tient compte du fait que
jusqu'à ce jour là, Ridley Scott, James Cameron et David Fincher
avaient chacun à leur manière, proposé un segment qui différait
presque totalement les uns des autres. Et pourtant, du second, on
retrouvait l'univers extrêmement sombre du premier tout en le
situant cette fois-ci non plus à bord d'un vaisseau mais sur la
planète LV-426
colonisée depuis vingt années.
Après
avoir passé cinquante-sept ans en état de biostase à bord de la
navette de sauvetage du Nostromo, Ellen Ripley était à nouveau de
l'aventure au milieu d'une bande de marines coloniaux plutôt
primitifs et indisciplinés. La suite, on la connaît, l'héroïne
des deux premiers opus parvenait une fois encore à échapper aux
aliens en prenant la fuite à bord du vaisseau USS
Sulaco
en compagnie de la jeune Newt, de l'androïde Bishop et du seul
soldat rescapé, le caporal Hicks. Mais alors qu'un Facehugger
était
parvenu à s'introduire dans le vaisseau, provoquant un incendie et
l’éjection d'une capsule EEV,
celle-ci vint s'écraser à la surface de
Fiorina « Fury » 161,
une planète-prison n'abritant que des condamnés de sexe masculin.
Après le Nostromo, la planète LV-426,
David
Fincher jetait son héroïne au beau milieu de criminels
particulièrement agressifs, et dans un contexte particulièrement
étouffant... L'issue de ce troisième opus aurait pu ou dû signer
la mort de la saga puisque Ripley y perdait la vie...
Mais
c'était sans compter sur la 20th
Century Fox
qui fit appel au réalisateur et scénariste Josh Whedon pour
imaginer le scénario d'un quatrième épisode qui au départ devait
tourner autour du personnage de Newt rencontré dans le second opus
Aliens
avant que la société de production ne lui demande d'envisager une
autre alternative : celle, non plus d'une histoire tournant
autour d'un clone de la gamine mais plutôt de celui de Ripley,
suicidée depuis Alien 3.
Craignant que la saga vire à l'aigre et au ridicule, l'actrice
Sigourney Weaver qui depuis 1979 avait jusque là toujours assuré le
rôle d'Ellen Ripley, hésite. Puis accepte finalement après avoir
attentivement lu le scénario de Josh Whedon. Concernant la mise en
scène, la production pense tout d'abord au réalisateur britannique
Danny Boyle qui auparavant avait déjà réalisé les œuvres cultes
Petits Meurtres entre Amis
en 1994 et Trainspotting
deux ans plus tard. Mais devant l'abandon du cinéaste, la production
fait ensuite appel au néo-zélandais Peter Jackson qui refuse de
participer au projet. Proposé ensuite au réalisateur américain
Bryan Singer, c'est finalement entre les mains du français
Jean-Pierre Jeunet que tombe le script après qu'ait été évoqué
Jan Kounen. Alors qu'il travaille déjà de son côté sur son futur
long-métrage Le Fabuleux Destin d'Amélie
Poulain
(qui ne sortira en France qu'en avril 2001) et qu'il trouve hors de
propos l'idée de réaliser un quatrième épisode de la saga Alien,
Jean-Pierre Jeunet se laisse finalement tenter et accepte de prendre
en main le nouvel opus, Alien, la Résurrection.
Après
un premier film dont le budget tourna autour des onze millions de
dollars, un second qui bénéficia d'un peu plus de dix-huit millions
de ces mêmes dollars et un troisième qui fut carrément financé à
hauteur de cinquante, pour ce quatrième opus, Jean-Pierre Jeunet
bénéficie d'un budget à la hauteur de ses ambitions puisque la
production le dote de soixante-quinze millions de dollars. Le projet
de Alien, la Résurrection
ne peut qu’intriguer les fans de la saga Alien,
autant qu'il peut les inquiéter. Comment relancer une franchise qui
voyait son héroïne mourir à la fin du troisième volet et que
pouvait apporter de plus le style visuel très particulier de
l'auteur des sublimes Delicatessen
en 1991 et La Cité des Enfants Perdus
en 1995 ? Bien que divers noms d'interprètes furent tout
d'abord évoqués, au final, le casting autour de l'actrice
principale Sigourney Weaver se constitua ainsi : Winona Ryder
dans le rôle de Call, Ron Perlman dans celui de Johner, Michael
Wincott dans la peau de Frank Elgyn, mais également Kim Flowers en
Sabra Hillard, l'excellent Dan Hedaya dans le rôle du Général
Martin Perez, ou encore Brad Dourif dans la peau du docteur Jonathan
Gediman, ainsi que l'acteur français Dominique Pinon, fidèle
interprète de Jean-Pierre Jeunet depuis les débuts
cinématographique de ce dernier, dans le rôle de Vriess. Le
réalisateur réussi à imposer sur le tournage deux ''techniciens''
ayant déjà fait montre de leur talent sur Delicatessen
et La Cité des Enfants Perdus.
D'abord,
le directeur de la photographie franco-iranien Darius Khondji dont
l’extraordinaire travail accompli sur les deux premiers
longs-métrages de Jean-Pierre Jeunet (tout deux réalisés en
collaboration avec Marc Caro) se retrouve une fois de plus sur le
plateau de Alien, la Résurrection.
Visuellement, ce quatrième volet est impeccable même s'il s'éloigne
parfois du style visuel propre à l’œuvre originale (mais qu'elle
autre séquelle ne s'est-elle pas affranchie des codes visuels
imposés par Ridley Scott et l'artiste suisse Hans Ruedi Giger?).
Entre décors sombres et suintants et tableaux morbides de créatures
hybrides enfermées dans un laboratoire de recherche, difficile de
faire le.... difficile, justement. Beau à mourir, Alien,
la Résurrection
bénéficie en outre d'effets-spéciaux remarquables intégrés aux
décors conçus par Nigel Phelps. Spécialiste français des effets
spéciaux, Pitof y a notamment conçu les aliens du film. Entre
images de synthèse et animatronique, ce quatrième épisode expose
notamment une Reine xénomorphe gigantesque. Tout au plus les fans
pourront faire la moue devant l'apparition d'un hybride, croisement
d'une humaine et alien, fils de Ripley, et dont le funeste destin
pourra déchirer le cœur des plus sensibles...
Deux
siècles ont passé depuis la mort de Ripley et pourtant, rien ne
semble avoir vraiment évolué autrement qu'en terme de recherches
scientifiques. Quoique... en ce qui concerne le clonage, le film
tente à prouver que ces dernières sont encore loin d'être
abouties. Opposant des scientifiques et des pirates de l'espace les
fournissant en matière première à des aliens toujours aussi
belliqueux, tous pourront compter sur une Ripley aux performances
physiques hors du commun. Le contexte a beau se situer en 2379, les
vaisseaux donnent toujours le sentiments d'avoir été fabriqués
avec des pièces de rechange et les personnages s'expriment dans un
langage de charretier. Parfois vulgaire et gratuit (Ripley demandant
notamment ''avec
qui il faut que je baise si je veux partir d'ici' ?'),
l'un des principaux défauts de Alien, la
Résurrection
est l'absence totale d’empathie pour les personnage généralisée
par des comportements primaires et brutaux. Ripley n'est plus que la
caricature d'elle-même, les pirates de l'air plus primitifs et
arbitraires que ne l'étaient les soldats du second volet, quant aux
scientifiques, leurs actes étant des plus monstrueux, il devient
impossible pour le spectateur de prendre fait et cause pour les uns
ou les autres, l'androïde Call étant encore la seule qui fasse
preuve d'un semblant d'humanité.
À
trop vouloir donner dans la ''punchline'' ou dans la ''pose'', Alien,
la Résurrection se
soustrait au mode de fonctionnement des précédents épisodes qui,
même en prenant des distances avec l'original, avaient cependant
conservé une certaine part d'effroi. Ici, on suit les personnages
sans jamais vraiment s'inquiéter de ce qui pourrait leur arriver.
Tout juste la séquence située dans les cuisines inondées
parviendra-t-elle à en émouvoir certains en maintenant un état de
stress plutôt satisfaisant. Trop propre malgré la rouille, la bave,
les tripes et le sang, ce ne sont pas non plus les grossièretés qui
éviteront à Alien, la Résurrection de
n'être autre chose qu'une grosse machine hollywoodienne bien huilée
et suintant le pognon à chaque plan. Pourtant, indépendamment du
fait qu'il s'agisse du quatrième volet d'une prestigieuse saga, pris
à part, Alien, la Résurrection
est un film de science-fiction plutôt convaincant. Mais encore
faut-il être en mesure de l'appréhender sans avoir à l'esprit ceux
qui l'on précédé...
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