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lundi 26 août 2019

Out 1 : Noli me Tangere - De Lili à Thomas de jacques Rivette (1971)



L'idée de me lancer dans l'exploration du cinéma de Jacques Rivette est en partie le fruit du hasard. En partie parce que d'un côté, j'ai revu il y a quelques jours La Belle Noiseuse, seul long-métrage du cinéaste que je connaissais jusque là. Et de l'autre parce que c'est l'ami Mike, de l'excellent blog ''Les Chroniques musico-cinématographiques de Mike'' que je vous conseille de visiter si vous voulez exercer vos méninges devant sa très belle plume, qui a lancé l'idée en me conseillant, entre autre, de me pencher sur les douze heures trente que constitue le film-fleuve Out 1 : Noli me Tangere que Jacques Rivette coréalisa aux côtés de la réalisatrice et assistante française Suzanne Schiffman. Le problème avec ce genre de projet, c'est que lorsque l'on n'est pas coutumier de ce genre de concept, on peut très vite s'égarer, perdre le fil, ou bien tout simplement passer à côté des intentions de son auteur. Faut-il alors se résoudre à compulser articles et commentaires en pagaille pour en connaître davantage sur ce type de projet, au risque d'en connaître trop avant même de l'avoir soit-même découvert ? Ou vaut-il mieux naviguer à l'aveugle au prix de remarquables surprises, de découvertes en stupéfactions ? J'ai personnellement choisi cette seconde option, même si cela doit me condamner à passer totalement à côté du concept.

Si à l'époque de sa sortie, le film de Jacques Rivette n'a pas ménagé les spectateurs en sortant dans sa version intégrale de 12h30 environ, le film fut exploité beaucoup plus tard dans un format constitué de huit parties distinctes, chacune de quatre-vingt dix minutes environ. La première d'entre elles, intitulée Out 1 : Noli me Tangere - De Lili à Thomas constitue une mise en bouche que Mike m'avait averti comme pouvant se révéler ennuyeuse. Sauf que mon adhésion à ce style si particulier fut acquise après un tout petit quart-d'heure. C'est donc à peu de chose près à ce moment très précis que débute la longue responsabilité d'évoquer ce premier épisode, riche d'enseignements. Aussi riche que peu l'être un film, une pièce de théâtre ou une danse contemporaine dont on ne souffre aucune connaissance. C'est donc, comme une partie de ses interprètes, à l'aveugle, spontanément et oserais-je dire, de manière improvisée que je me lance dans le périlleux exercice de la critique. D'ailleurs, je me demande encore si le travail à fournir doit uniquement concerner l'interprétation ou s'il doit exclusivement se référer au récit et aux impressions qui s'en dégagent.

Pour ma part, j'y ai vu un véritable exploit. Non pas dans la mise en scène de Jacques Rivette qui souffre peut-être ici d'un défaut majeur: celui de n'avoir pas filmé l'acte central de ce premier épisode en plan-séquence. Non, l'exploit dont je parle et qui dure à peu de chose près une demi-heure, est celui durant lequel nous assistons à une séquence proprement ahurissante durant laquelle, une poignée de comédiens parmi lesquels nous retrouvons l'immense Michael Lonsdale vont improviser autour d'un totem, d'une idole, à grands renforts de gémissements, de cris, et de halètements. Mais alors que cet exercice d'improvisation pourrait au demeurant paraître superficiel, l'évolution de ce spectacle hors du commun s'avère d'une stupéfiante cohérence. Bien que totalement joué à l'aveugle, sans texte écrit et répété au préalable (en dehors de la vague idée d'évoquer à un moment ou à un autre la tragédie grecque Prométhée enchaîné), L'évolution des personnages qui tendent vers un certain paroxysme s'élevant tout naturellement au grès des envies de chacun, mue, évolue, se transforme pour trouver une forme d'apothéose, et même plusieurs au cœur d'une improvisation où chacun y met du sien avec plus ou moins d'ardeur. Out 1 : Noli me Tangere - De Lili à Thomas consacre les coulisses d'une pièce en devenir. Entre fiction et réalité (chaque comédien joue un personnage et n'apparaît donc pas sous sa véritable identité).

Aspect essentiel et préparatoire à cet exercice éreintant : une séance de relaxation. Puis Michael Lonsdale se lance le premier, et les autres enchaînent alors dans une sorte de sabbat foncièrement charnel. Les corps se mêlent, s'étirent, se recroquevillent. Et toujours ces borborygmes indéchiffrables mais que l'impeccable improvisation de chacun n'empêche pas à cette séance de recouvrir un véritable sens. Jacques Rivette est au plus près de ses comédiens et les filme dans une transe fiévreuse et animale. La suite n'est pas moins intéressante puisque Michael Lonsdale ici prénommé Thomas propose ensuite à ses partenaires d'évoquer chacun à leur tour leur ressenti. Et l'on comprend mieux alors l'importance de communiquer et surtout, celle de l'unité qui forme un groupe soudé. On aura du mal à définir la frontière exacte qui sépare la réalité de la fiction. Mais si dans un premier temps ce minuscule détail intrigue, Out 1 : Noli me Tangere - De Lili à Thomas sait suffisamment happer le spectateur pour qu'on l'oublie très rapidement. En terme de mise en scène, le travail de Jacques Rivette est épuré. Ici, la recherche esthétique n'est pas fondamentale et ce que cherche avant tout le cinéaste à mettre en valeur, ce sont ses interprètes. Mission réussie... !

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