Réalisé par le cinéaste
franco-polonais Roman Polanski, « maître es paranoïa »
(Répulsion,
Le Locataire),
et scénarisé par le cinéaste lui-même ainsi que par John
Brownjohn et Enrique Urbizu à partir du roman d'Arturo
Pérez-Reverte, Le Club Dumas,
The Ninth Gate est
le seizième long-métrage de son auteur. Un retour vers une
thématique qu'il avait mise de côté après son angoissant
Rosemary's baby
en 1968. Deux films qui entretiennent bien des rapports même si dans
le cas de The Ninth Gate,
son final laisse supposer d'une mystification alors que dans l’œuvre
signée en 1968, les dernières images laissaient supposer
l'existence réelle du Diable. C'est sur cette ambiguïté que joue
le cinéaste en cette année 1999. Une année symbolique que certains
prophétisèrent comme étant l'emblème d'une série d'événements
cataclysmiques : Armageddon, changements climatiques, invasions
extraterrestres, boule de feu détruisant notre planète, etc...
Aujourd'hui,
même si l'on est tous revenus de ces prédictions qui n'ont
finalement pas eu lieu, redécouvrir The Ninth
Gate
n'est peut-être pas une mauvaise idée, d'autant plus que le sujet
s'éloigne drastiquement de ces rumeurs (in)fondées par des
individus peu scrupuleux à l'intention des crédules du monde
entier.
Passionnant
de part le sujet traité d'une part, et par la manière qu'à Roman
Polanski d'en faire sien, The Ninth Gate est
une excellente surprise, mis en scène avec subtilité et
magistralement interprété par l'acteur américain Johnny Depp qui
dans la peau de Dean Corso, se voit confier une mission
particulièrement délicate. A la recherche d'ouvrages littéraires
rares, il en estime également la valeur. Réputé pour être l'un
des meilleurs dans sa catégorie, il est engagé par Boris Balkan
(l'acteur américain Franck Langella, notamment vu dans The
Box de
Richard Kelly) afin d'authentifier dans un premier temps l'un des
trois seuls exemplaires de l'ouvrage Les
Neuf portes du royaume des ombres
de l'écrivain du dix-septième siècle Aristide Torchia qu'il
possède, et ensuite d'acquérir les deux autres, l'un se situant au
Portugal et le dernier en France. Bien qu'étant passionné par son
métier, Corso est davantage attiré par l'argent. C'est donc contre
un gros chèque qu'il accepte de mener des investigations, à
commencer par la visite de Liana Telfer, dont l'époux s'est pendu
récemment après avoir justement vendu son exemplaire de l'ouvrage à Boris
balkan...
The Ninth Gate va
mener notre héros dans une intrigue passionnante, entre enquête et
mysticisme, ce personnage ambigu traversant plusieurs territoires
tels que les États-Unis, le Portugal, l'Espagne mais aussi et
surtout la France, la Seine et Marne, les Pyrénées-Orientales, le
Val-d'Oise, l'Aude et même la capitale française se partageant la
vedette. Des décors souvent majestueux. Entre grandes villes,
châteaux et villages archaïques. Un enchantement pour les yeux,
mais aussi pour les oreilles puisque Roman Polanski confie aux bons
soins du compositeur polonais Wojciech Kilar (La
Jeune Fille et la Mort
en 1994, Le Pianiste
en 2002 tout deux réalisés par Roman Polanski) d'écrire la musique
envoûtante de The Ninth Gate.
Une partition qui participe grandement à l'ambiance d'un
long-métrage que l'on pourrait quelque peu rapprocher des investigations menées par les personnages de Guillaume de
Baskerville et Adso de Melk dans le chef-d’œuvre de Jean-Jacques
Annaud, Le Nom de la Rose.
Toutes proportions gardées bien évidemment puisque l’œuvre de
Roman Polanski lui est malgré tout quelque peu inférieure.
Outre
la présence de l'actrice et épouse de Roman Polanski Emmanuelle
Seigner (que le cinéaste emploiera à de nombreuses occasions), le
spectateur à l’œil aiguisé remarquera sans doute la quadruple
interprétation de l'acteur José Lopez Rodero (dans le double rôle
des jumeaux libraires et des déménageurs) dont il semble qu'il
n'ait pas interprété d'autre rôle au cinéma. Avec The
Ninth Gate,
Roman Polanski retrouve l'ambiguïté de ses œuvres passées,
surtout durant les deux premiers tiers du film. On regrettera sans
doute que la cérémonie succédant aux investigations du héros
n'ait pas été filmée avec davantage d'investissement (on aurait
sans doute rêvé d'une séquence aussi magistrale que l'incroyable
cérémonie du Eyes Wide Shut
de Stanley Kubrick) et que la fin se laisse aller à quelques
débordements faussement fantastiques. Il ne faut cependant pas
bouder son plaisir car à travers The Ninth Gate,
c'est véritablement toutes les aspirations du réalisateur franco-polonais
qui ressurgissent...
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