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samedi 30 mars 2019

Femme Fatale de Brian de Palma (2002) - ★★★★★☆☆☆☆☆



Mon dernier Brian de Palma remonte à 2000. Soit, dix-neuf ans en arrière. Presque une génération, à quelques années près. Autant dire que j'ai du retard à rattraper même si l'auteur des classiques que sont Phantom of the Paradise (1974), Pulsions (1980), Body Double (1984) ou encore L'Esprit de Caïn (1992) n'a tourné que cinq long-métrages en dix-neuf ans (on attend toujours Domino, son dernier né). Le premier d'entre eux est sorti en 2002, s'intitule Femme Fatale et bénéficie depuis son passage à la moulinette des critiques, d'une réputation relativement peu élogieuse. Le public ne semble avoir suivi qu'en de très petites proportions l'idée centrale du film et la mise en scène de Brian de Palma tandis que la presse s'est partagée, entre enthousiasme et déception...

Pour bien comprendre les raisons pour lesquelles le film n'a pas fait l'unanimité, sans doute suffit-il de revenir sur l'une des premières séquences, d'une durée très légèrement inférieure à vingt minutes, et au cours de laquelle le spectateur assiste à un vol de diamants incrustés dans la robe on ne peut plus légère d'un mannequin venu au bras du cinéaste français Régis Wargnier (qui incarne donc son propre rôle) lors de la projection de son film Est-Ouest au festival de Cannes. Tournée par Brian de Palma, le spectateur aurait pu prétendre assister à un grand moment de mise en scène, et pourtant... la séquence est filmée sans engouement. D'une mollesse qui confinerait presque à l'amateurisme d'un jeune cinéaste voulant imiter ses pairs, la scène se traîne en longueurs sans qu'aucun des enjeux mis en place ne provoque la moindre émotion (ici, la tension) d'un public qui assiste alors à la séquence sans jamais rien ressentir. De plus, la scène est emplie d'incohérences impardonnables de la part du réalisateur. Comment peut-on en effet adhérer à l'idée qu'une jeune femme en éternelle « représentation » puisse passer autant de temps aux toilettes avec sur le dos une robe estimée à dix millions de dollars sans que personne (et surtout pas ses deux gardes du corps) ne s'inquiète de la durée de son absence ? Ou bien que l'un des organisateurs du vol puisse passer à seulement quelques centimètres de l'un des gardes du corps de la jeune femme sans que celui ne s'en rende compte (à croire que les 180° de champ de vision de l'homme ne s'appliquent pas à tout le monde). Et que penser de de cette scène durant laquelle le mannequin se retrouve dans les bras de l’héroïne complice du vol incarnée par l'actrice Rebecca Romijn ? Enfermées toutes deux dans les toilettes, à s'ébattre, tandis que de l'autre côté de la porte, et alors que la première débarrasse la seconde de sa robe de diamants par petits bouts, le voleur échange chaque parcelle de celle-ci par des faux ? La séquence ressemble à une chute de Mission Impossible que Brian de Palma aurait choisit de foutre aux ordures avant de la réemployer six ans plus tard en 2002. Une séquence enrobée d'un boléro très inspiré par celui de Maurice Ravel et composé ici par le musicien japonais Ryūichi Sakamoto. Notons de surcroît que la scène bénéficie d'un split-screen aussi timide qu'inutile...

Si par la suite le cinéaste fait preuve d'un peu plus de maîtrise en matière de mise en scène, le récit use de raccourcis parfois très gênants et dénotant d'une propension à la flemmardise lorsqu'il s'agit de développer certains aspects de l'intrigue. Une ellipse de sept années permet ainsi de justifier la disparition de l'héroïne incarnant désormais le personnage de Lily que les parents de cette dernière (incarnés par Jean-Marie Frin et Eva Darlan) confondent lors de la séquence succédant celle qui ouvre les hostilités. Une scène hautement improbable mais qui, reconnaissons-le, sème ce trouble dont seul a le secret Brian de Palma. Désormais épouse d'un ambassadeur, l'ancienne voleuse cache son identité pour que ses anciens complices ne puissent pas remonter jusqu'à elle. C'est là qu'entre en jeu l'acteur espagnol Antonio Banderas qui du haut de ses cinq ou dix centimètres de moins que Rebecca Romijn, paraît beaucoup moins charismatique que d'habitude dans son rôle de paparazzi. Pauvre individu que ce Nicolas Bardo qui malgré sa profession de charognard ne voit pas venir ce que lui réserve une Laure Ash/Lily beaucoup moins fragile qu'il n'y paraît. Mais déjà, j'en dis trop.

Femme Fatale réunit un casting pour le moins hétéroclite. Plus que le duo formé par Rebecca Romijn et Antonio Banderas, c'est bien la présence à l'écran d'une foule d'interprètes d'origine hexagonale qui fait l'une des particularités de ce vingt-sixième long-métrage du cinéaste américain né à Newark dans le New Jersey le 11 septembre 1940. Eriq Ebouaney et Edouard Montoute incarnent respectivement les anciens complices du vol Black Tie et Racine. J'ai déjà cité également Jean-Marie Frin et Eva Darlan dans le rôle des parents de la véritable Lily. On trouve ensuite l'excellent Thierry Frémont dans la peau de l'inspecteur Serra, un flic particulièrement tenace., et même Sandrine Bonnaire dans son propre rôle (minuscule et silencieux). Au milieu de ce casting pas tout à fait cent pour cent « frenchie », on trouve également les acteurs américains Peter Coyote dans le rôle de l'ambassadeur Bruce Watts et Gregg Henry, un habitué du cinéma de Brian de Palma (six participation au total dont l'inoubliable Sam Bouchard du chef-d’œuvre Body Double), dans celui du garde du corps Leonard Shiff. Au fil du récit, l'intrigue gagne quelque peu en épaisseur même si le long-métrage est loin d'atteindre les qualités des meilleurs de Palma et si les invraisemblances y sont légion. Une œuvre mineure, mais qui de manière générale, se hisse tout de même bien au dessus de la purge Mission to Mars que le cinéaste avait réalisé deux ans auparavant...

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