J'avais un peu perdu du
vue le réalisateur et scénariste britannique Christopher Smith qui
avait pourtant su me séduire une première fois en 2004 avec son
tout premier long-métrage, Creep.
Un petit film d'horreur assez glauque tourné dans l'une des stations
les plus profondes du métro londonien. Puis cinq ans plus tard en
2009 avec Triangle,
un sympathique slasher maritime doublé du thème de la boucle
temporelle, manquant de peu son deuxième long-métrage intitulé
Severance
qu'il me faudra bien découvrir un jour. Parce que comme pour les
deux films que j'ai découvert jusqu'ici, le Black
Death dont
il s'agit de faire la critique est sans doute parmi les meilleurs
films de leur auteur. Du moins, celui des trois que j'ai vu jusqu'à
maintenant qui m'a le plus convaincu. Ici encore, l'horreur est au
rendez-vous. Mais comme cela semble être l'habitude chez le
britannique, elle s'inscrit dans un contexte qui au départ
n'apparaît pas forcément compatible bien que d'autres cinéastes
aient depuis profité de l'essor de l'héroic-fantasy ou du récit historique pour s'y
engouffrer.
Sous
ses airs de groupe de black
metal,
le titre du quatrième long-métrage de Christopher Smith se réfère en fait au tout premier nom sous lequel était nommée la peste noire au
milieu du dix-neuvième siècle. Un anachronisme sur lequel nous ne
nous éterniserons pas au delà de cette brève information sur
laquelle je me sens contraint de revenir : en effet, le terme
apparaît pour la première fois en 1843 dans un ouvrage anglais destiné au jeune public
alors que le récit du film qui nous préoccupe ici se situe dans le
courant du quatorzième siècle ! Un détail... sans importance.
Car ce qui en a, d'importance, c'est le contenu du film, adapté d'un
scénario de Dario Poloni.
Nous
sommes donc au beau milieu du quatorzième siècle. Celui qui précéda
la naissance des fameuses chasses aux sorcières (encore un
anachronisme?). On y découvre le jeune moine Osmund (Eddie Redmayne)
écouter, selon lui, les conseils de Dieu le jour où débarquent au
monastère un groupe de mercenaires conduits par Ulric (le toujours
impeccable Sean Bean). Acceptant de les mener au delà d'un marais
environnant un village épargné par la maladie, le jeune homme
espère profiter de cette occasion pour retrouver celle qu'il aime en
secret. La jolie Averill (Kimberley Nixon) qui a promis de l'attendre
patiemment durant une semaine à l'extérieur du monastère, après
quoi, elle quittera les lieux définitivement. Rencontrant la mort
sur leur chemin, Osmund et les mercenaires finissent par trouver le
fameux village épargné par la peste noire. Mais à la recherche
d'un nécromancien, ce qu'ils vont y découvrir sera bien plus
terrible encore...
Visuellement,
Black Death
est
absolument irréprochable. Entre le monastère et les villages
jonchés de cadavres, victimes de la maladie, des forêts et des
champs à perte de vue, un marais enfumé, et le village dans lequel
sera située une bonne partie de l'intrigue, le travail effectué par
John Frankish sur les décors et par Sebastian Edschmid sur la
photographie est remarquable. C'est sombre, poisseux, aussi sale et
pestilentiel que le sujet et l'époque traités laissent supposer.
Les costumes ne dépareillent jamais dans ce contexte relativement
brutal où légendes religieuses (la peste noire y est vécue par
certain comme une création de Dieu) et sorcellerie tiennent
une place importante dans le cœur des habitants d'un village
totalement dévoué à la parole de Langiva, incarnée par
l'impressionnante Carice Van Houten).
On
s'attache très facilement à cette bande de mercenaires durs en
paroles mais étonnamment soudés autour d'Ulric. Autour de Sean Bean
ou encore de John Lynch (qui incarne Wolfstan, l'un de ses compagnons
de route), on découvre des individus à la personnalité
déconcertante, tenant des propos souvent rudes, mais dont la
croyance en Dieu est indéfectible. Face à eux, la néerlandaise
Carice Van Houten, donc. Blafarde et particulièrement effrayante,
accompagnée par un Tim McInnerny (dans la peau de Hob) dont le
sourire est carrément inquiétant, elle dirige son village comme un
gourou. Sorcière ou manipulatrice, ce sera aux spectateurs de le
découvrir dans un film où les brutalités demeurent finalement
assez rares. Bien que Black Death
comporte plusieurs scènes de combats à l'arme blanche... et lourde,
les seuls rares moments où les spectateurs les plus sensibles
risquent de tiquer demeurent les scènes durant lesquelles la
prêtresse/sorcière/gourelle, appelons-là comme on veut, tentera de
convaincre les membres du groupe d'abandonner leur foi. Black
Death n'est
pas une bonne surprise, mais une EXCELLENTE surprise. Ceux qui
apprécièrent le récent et plutôt rude Apostle
de Gareth Evans peuvent se ruer sur Black Death.
Ils ne seront pas déçus. Les autres non plus d'ailleurs...
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