Angleterre 1645. alors
que la guerre fait rage entre les troupes royalistes et l'armée du
général Crowell, l'un des soldats à la solde de celui-ci profite
d'une permission de deux jours et retourne dans le petit village de
Brandeston où vivent un prête et sa nièce Sarah. L'homme d'église
ayant offert en épousailles la jeune femme à Richard Marshall, les
deux amants profitent des quelques heures qui leur sont accordées
pour se retrouver et s'aimer. Lorsque Richard reprend la route le
lendemain matin, il croise sur son chemin celui qui se fait passer
pour un avocat, Matthew Hopkins, mais qui en réalité se révèle
être un inquisiteur dont la mission est de chasser, faire avouer, et
exécuter les suppôts de Satan. Aidé de son assistant John Stearne,
le chasseur de sorcières parcourt la campagne afin d'honorer les
contrats qui lui sont confiés. Le dernier en date concerne justement
le prêtre John Lowes, ainsi que Sarah. Considéré à tort comme
sorcier par une partie des habitants de Brandeston, le prêtre est
torturé par Stearne et deux autres hommes sous le commandement de
Hopkins. Sarah supplie l'inquisiteur de faire cesser l'interrogatoire
auquel est soumis son oncle en échange de quoi, elle lui offre ses
charmes. Celui accepte et ordonne que soit cessées les
tortures. Le vieil homme est jeté en prison, Stearne ne pouvant plus
intervenir sur son cas sur ordre de Hopkins. Deux jours plus tard,
l'inquisiteur part honorer un contrat dans une autre ville et confie
l'affaire de Brandeston à Stearne. Ce dernier en profite pour s'en
prendre à Sarah et la viole. Lorsque Hopkins est de retour, il
comprend que Stearne est au courant de la relation qu'il a eu avec la
jeune femme et propose à son assistant de reprendre l'interrogatoire
de John Lowes. Alors même que le vieil homme n'a pas avoué être un
sorcier, deux hommes sont contraints d'être les témoins de ses faux
aveux. Le prêtre est finalement condamné à mourir accompagné de
ses domestiques. Plus tard, et alors qu'il s'apprête à partir en
campagne avec son régiment, Richard Marshall apprend qu'à
Brandeston plusieurs personnes ont été exécutées. Le jeune soldat
décide de déserter durant un temps l'armée afin de retourner à
Brandeston et d'y retrouver celle qu'il aime...
Très honnêtement, je ne
m'étais pas préparé à un tel spectacle. Alors même que Le
Grand Inquisiteur est souvent (et légitimement) comparé à
La Marque du diable de Michael Armstrong qui
sortira deux ans plus tard, je m'attendais, je ne sais pourquoi, à
découvrir un vieil ancêtre du torture-porn. Un peu désuet,
victimes des outrages du temps et assez peu incommodant en terme de
d'horreur. A bien y regarder, le film de Michael Reeves n'est
finalement pas vraiment le film horrifique tel qu'on pourrait le
supposer. Bien sûr, et c'est l'un des aspects les plus marquants du
film, les scènes de tortures ménagent à elles seules un climat
assez troublant. Une gêne provoquée par des séances
d'interrogatoires d'un autre âge, et qui m'ont rappelé celle que
j'avais ressentie à la première vision de l'introduction de
L'Au-Delà de Lucio Fulci dans laquelle on assistait à
un meurtre en réunion particulièrement abjecte.
Le Grand
Inquisiteur aborde
la fameuse chasse aux sorcières dont le point culminant se situa
environ entre 1560 et 1630 et qui fit de nombreuses victimes. Avec
plus ou moins de réalisme (je n'entrerai pas dans le détail, ayant
en la matière des connaissances plus qu'étroites), le film offre
deux visages distincts de la cruauté perpétrée sur des individus
qui, on le sait aujourd'hui, ne méritaient pas un tel sort. D'un
côté, Matthew Hopkins, l'inquisiteur. Vêtu d'un costume que nous
considérerons d'officiel, il ne participe aux actes barbares que de
loin, questionnant les supposés idolâtres sur un ton posé
particulièrement inquiétant. Jamais on ne le verra se délecter des
sévices corporels infligés aux victimes de dénonciations. C'est
pourtant bien lui qui ordonnera à chaque fois l'exécution de ces
dernières. L'autre visage du mal tel qu'on le conçoit en tant que
spectateur, c'est celui de Tearne, l'assistant de Hopkins. Il est
tout son contraire. Il est sale, c'est un ivrogne, il court les
jupons (et viole lorsqu'il rencontre une résistance) et prend un
plaisir obscène à torturer ses victimes. Enfonçant de grandes
aiguilles afin de révéler la fameuse « marque du Diable »
devant prouver la présence du Malin en chaque supposé idolâtre,
giflant ces derniers jusqu'à ce que leur visage vire au carmin, et
les exécutant enfin avec délice, et ce, de la manière la plus
cruelle possible. D'un côté, l'acteur Vincent Price, de l'autre son
acolyte crotté, l'excellent Robert Russell.
Le Grand
Inquisiteur brasse
les genres. Le film côtoie romance, film historique, horreur, et
parfois même western. D'une totale crédibilité dans les actes
perpétrés (on a du mal à imaginer une inquisition plus infamante
encore que celle décrite dans le film de Michael Reeves)., le
long-métrage peut provoquer la nausée surtout si l'on se réfère
au fait que ces actes ont bien eu lieu il y a presque quatre-cent
ans. Superbement mis en scène et admirablement interprété (le
charisme des deux acteurs cités plus haut ainsi que le couple formé
sur l'écran par Hilary Dwyer et Ian Ogilvy), le film est notamment
accompagné d'une très belle partition musicale composée par Paul
ferris. On tient là presque un chef-d’œuvre...
Je pense qu'il faut prendre ce film pour un objet purement cinématographique et ne pas chercher à y déceler un moment de l'Histoire occidentale, car, à ce titre, il devient plutôt un objet de propagande, l'Inquisition n'ayant pas été, comme bon nombre d'historiens de repentance nous le font croire, un moment sanglant de l'histoire mais le rassemblement de plusieurs moments dont on ne retient jamais au final que Torquemada. Le livre Historiquement Correct (et bien d'autres) traite du sujet (un chapitre) et rappelle que l'Inquisition a été un pas en avant dans la modernité, ne laissant plus les criminels (avec ou sans guillemets) aux mauvais soins de la vindictes populaires (comme c'était le cas, plus proche de nous, du drame de Hautefaye, narré assez rigoletement par Jean Teulé dans Mangez-le si vous voulez).
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