Le
réalisateur britannique Christopher Smith n'est certes pas le cinéaste
qui pousse les critiques à noircir des pages par dizaines chaque fois
que l'une de ses œuvres voit le jour et n'est sans doute pas le plus
grand pourvoyeur en matière de films d'horreur et d'épouvante, toujours
est-il que le ''savoir-faire'' est chez lui comme une seconde nature. Creep en 2004, Triangle en 2009 ou bien encore Black Death l'année
suivante montrent à eux seuls la capacité de ce passionnant artisan à
se renouveler. Qu'il s'agisse d'enfermer durant quatre-vingt dix minutes
une jeune femme dans le métro londonien et de la confronter à un
créature monstrueuse, fruit d'étranges expériences ou de convoquer un
groupe d'adolescents sur un bateau de croisière pour une aventure en
forme de boucles temporelles, le public en ressort invariablement
conquis. Le cinéma de Christopher Smith ne réinvente rien tout en y
apportant une touche personnelle qui chaque fois fait mouche. Et c'est
d'ailleurs une fois encore le cas avec Consécration que l'on se désespère de découvrir en France dans les salles obscure. Ceux qui ont vu et ont apprécié Black Death seront
sans doute les premiers à être happés par cette histoire où la
religion, le Bien et le Mal sont au cœur d'un récit qui se complaît à
prendre le spectateur à revers. Rien que de très banal penseront nombre
de spectateurs, et c'est parfois vrai. Mais là où Christopher Smith met
un point d'honneur à se détacher de la concurrence s'inscrit en terme
d'ambiance. En misant sur le compositeur Nathan Halpern et sur un sound
Design bourré de chants religieux sous infusion de réverbération, le
réalisateur britannique offre à son dernier long-métrage une ampleur
exceptionnelle agrémentée de surcroît par un accent typiquement
irlandais.
Autant dire que le jour où l'occasion de découvrir Consécration s'offrira
au public hexagonal, il sera plus que recommandé de le découvrir dans
sa langue d'origine. Pour en venir au récit, l'histoire se concentre
tout d'abord sur la jeune Grace dont le frère, un homme d'église
prénommé Michael, s'est semble-t-il suicidé après avoir tué un prêtre
faisant partie de la même congrégation. La priorité étant désormais pour
la jeune femme de découvrir toute la vérité sur ce drame, Grace décide
de se rendre en Irlande afin de dénouer le nœud de l'affaire. Là-bas,
elle rencontrera en outre la sinistre mère-supérieure (Janet Suzman), le
père Romero (Danny Huston), lequel sera chargé de mettre un peu d'ordre
au cœur de cette frange extrémiste du catholicisme, d'un inspecteur de
police (Thoren Ferguson) mais verra également ressurgir le douloureux
passé qu'elle vécu en compagnie de son frère auprès de leur très violent
père adoptif. Christopher Smith ajoute au récit des éléments forcément
fantastiques mais donne aussi et surtout une image du Christianisme
relativement dégradée. Qu'il s'agisse de la plupart de ses représentants
ou du père de Grace, lequel porte à la main une croix comme d'autres
une massue ou un poignard, celui ou celle qui porte autour du cou la
croix du Christ apparaît invariablement comme un représentant du Mal
tandis que la jeune héroïne (incarnée par Jena Malone) semble être la
seule ou presque à faire partie du camp du Bien. Outre son
extraordinaire atmosphère dont l'intensité décuple lors du dernier acte,
Christopher Smith assène quelques bonnes idées visuelles comme ce court
plan-séquence de Grace rentrant chez elle tout en étant filmée à
travers le reflet d'un miroir.
Une
séquence apparemment anodine quoique étant aussi improbable que
l'Escalier de Penrose mais qui en dit certainement très long sur le
subterfuge qu'est en train de mettre en place le réalisateur. L'un des
concepts de Consécration repose
effectivement sur des idées préconçues nées de certains comportements.
C'est d'ailleurs sans doute là que le long-métrage se casse modérément
la gueule. En effet, quelques éléments viennent confirmer la grossièreté
de l'approche. Mais rien de grave en définitive. Les effets-spéciaux
sont rares et donc discrets... dès lors qu'ils n'affichent pas des CGI de
très mauvaise condition comme le suicide de plusieurs nonnes au sommet
d'une falaise. On aura de nos jours rarement vu effet de si mauvaise
facture ! Mais là encore, il ne s'agit que d'un détail car par delà ces
quelques défaillances auxquelles s'ajouteront celles d'un script pas
toujours à la hauteur, Consécration assure le spectacle de bout en bout même si l'enquête est fort logiquement en deçà de celle du formidable Le nom de la rose.
N'est pas Jean-Jacques Annaud qui veut. Les amateurs de beaux paysages
pourront d'emblée admirer de magnifiques falaises irlandaises quand
d'autres se prêteront au jeu du fantasme en se remémorant quelques
classiques du septième art tel que The Devils de Ken Russell ou Le bon apôtre de Gareth Evans même si une fois encore, Consécration se
montre inférieur. Ce qui au premier abord ressemble à un imbroglio de
séquences incohérentes et confuses trouve finalement une certaine
logique lors des derniers instants. Bref, le dernier long-métrage de
Christopher Smith n'est certainement pas voué à devenir un classique du
genre mais que voulez-vous, quand on aime, on ne compte pas. Perso,
j'adore !
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