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jeudi 5 octobre 2023

La secte sans nom (Los sin Nombre) de Jaume Balagueró (1999) - ★★★★★★★☆☆☆

 


 

La secte sans nom ou lorsque la fiction rejoint la réalité et même, la précède... On ne sait toujours pas ce que sont devenus Emile, deux ans et demi ainsi que Lina, quinze ans, mais de leur disparition respective ont découlé diverses éventualités. De la fugue jusqu'au meurtre en passant par l'enlèvement. Le réalisateur espagnol Jaume Balagueró signait à la fin du siècle dernier une œuvre étonnante. Sa première, sous le titre original Los sin Nombre (adaptation d'un roman du britannique Ramsey Campbell) qui contrairement à sa traduction française signifie Le nom du péché. En 1995 sort sur les écrans Seven de David Fincher, un classique du film policier recouvert d'une chape de noirceur moite qui redéfinit les contours du thriller ou du moins, considère l'objet comme l'un des parangons les plus significativement morbide du genre. Mais à dire vrai, il ne faudrait surtout pas oublier qu'il ne fut que le descendant d'autres mémorables productions parmi lesquelles, le formidable Silence des agneaux de Jonathan Demme qui vit le jour quatre ans plus tôt. D'autres se sont essayés depuis au délicat exercice du ''plagiat'', de ''l'hommage'' ou de ''l'opportunisme'' comme le cinéaste australien Russell Mulcahy et l'acteur Christophe Lambert à travers Résurrection qui contrairement à la sentence que dû supporter le long-métrage de la part d'une certaine presse et d'un certain public est plutôt sympathique... si bien entendu l'on fait l'impasse sur la comparaison avec les meilleures œuvres du genre. L'Espagne elle aussi fut donc frappée par ce sous-genre du film policier crépusculaire à travers l'un de ces petits bijoux moyennant la force d'interprétation de ses principaux acteurs et la réalisation du metteur en scène. Pour le commun des mortels, que signifie Jaume Balagueró ?


Pas grand chose à vrai dire, mais pour les autres, essentiellement, l'espagnol n'est rien moins que l'auteur de l'une des œuvres horrifiques les plus marquantes du milieu des années 2000 avec son pote Paco Plaza. Ensembles, les deux hommes ont effectivement signé le remarquable [●REC] en 2007, le cinéma d'horreur et d'épouvante renouant alors avec le mythe de l'infecté qu'inventa pratiquement George Romero des décennies en arrière à travers son prophétique The Crazies (connement traduit chez nous sous le titre La nuit des fous vivants, pour une raison que les fans du réalisateur originaire de Pittsburgh connaissent forcément). Sans ambages et donc sans protection, le spectateur de La secte sans nom plonge directement dans le vif du sujet avec le cadavre d'une jeune fille extrait d'une bassine remplie d'acide. Le corps une fois étendu à la morgue et étudié sous toutes les coutures par un médecin légiste qui ne nous épargne rien des détails sordides et les parents de la jeune victime prévenus de la découverte du corps de leur enfant, le récit fait un saut dans le temps de cinq années et l'on retrouve la mère Claudia (l'actrice Emma Vilarasau), depuis divorcée mais apparemment ''remise'' de la mort de sa fille. Pourtant, un coup de téléphone va tout remettre en question. En effet, Claudia reçoit un jour un appel d'une jeune fille qui prétend être la sienne. Niant tout d'abord que son interlocutrice puisse être l'enfant qu'elle a perdu cinq ans plus tôt, la jeune femme se met à douter et fait appel à l'ancien flic Massera (l'acteur Karra Elejalde) qui à l'époque était chargé d'enquêter sur la disparition afin de l'aider à investiguer au sujet de cette nouvelle et mystérieuse affaire.


Outre quelques séquences visuellement glauques comme l'autopsie de la gamine, la découverte d'un cadavre lié sur une chaise et égorgé, la visite de deux sites désaffectés et des environnements aux teintes parfois crues, ce qui touche tout d'abord dans cette Secte sans nom, c'est la douleur de la mère observée à travers le reflet que projette le miroir de la salle de bain derrière lequel se cache le seul traitement médicamenteux qui dans une certaine mesure est capable de maintenir toute sa raison. Douleur de Claudia mais également celle de Massera qui lui-même fut au centre d'un drame personnel qui causa le décès de son épouse et de celui de leur bébé. La secte sans nom s'évalue donc davantage sous l'angle de la tragédie plus que sous celui de l'enquête policière même si celle-ci est plutôt bien menée par cet alter ego de Columbo en gabardine bleue-nuit, sans chien, sans cabriolet et ayant remplacé le cigare par la cigarette. Le premier long-métrage de Jaume Balagueró brille donc d'abord par une certaine profondeur émotionnelle que n'amenuise pas le cadre relativement sinistre et le sujet, auxquels est adjoint un sound-design curieux et généralement constitué de bruits de tonnerres même lorsque le ciel est bleu ! Le terme qui semble le mieux définir le film du réalisateur espagnol est : ''tristesse''. En revanche, le dernier acte, sans tout à fait ruiner l'impact émotionnel des débuts, s'avère on ne peut plus... ridicule. Dans le rôle de l'ancien époux Marc, Brendan Price en fait des tonnes et n'est qu'une caricature du personnage qu'il incarne. À trop vouloir jouer sur son impressionnant regard et son sinistre sourire, on finit davantage par pouffer de rire devant ses mimiques que de trembler. La résolution du film est donc sans doute la partie la plus faible du récit, avec au centre du sujet, des faits qui relèvent partiellement de l'improbable même si l'on sait l'influence que peuvent avoir des paroles sur des personnes totalement perméables aux commentaires du fait de leur jeune âge. Au final, La secte sans nom est un coup d'essai plutôt réussi de la part d'un cinéaste qui de manière générale se spécialisera par la suite dans le cinéma d'horreur...

 

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