Parmi les œuvres portant
sur le sujet de la guerre nucléaire et sur ses conséquences, il en
est une qui demeure l'une des plus effroyablement réalistes. Threads
de Mick Jackson est sans doute moins déterminé que The
War Game
de Peter Watkins a figurer dans le rayon des docus-fictions, il n'en
demeure pas moins l'une des visions les plus sinistrement concrètes
existant sur un sujet qui continue à faire peur presque quatre-vingt
années après les bombardements atomiques d'Hiroshima et de Nagasaki
les 6 et 9 août 1945. Peter Watkins avait su capter en 1965 toute
la portée d'un éventuel conflit d'ordre mondial dont les
répercussions allaient avoir pour cible le territoire britannique.
Bien des années plus tard, les États-Unis allaient apporter leur
pierre à cet édifice cauchemardesque à travers Le
Dernier Testament de
Lynne Littman et Le Jour d'après
de Nicholas Meyer. Un long-métrage cinématographique et un téléfilm
qui en 1983 et donc coup sur coup, allaient marquer leurs publics.
Une année plus tard, en Angleterre, un cinéaste allait se
réapproprier ce thème emprunté par l'Amérique l'année précédente
alors que jusque là, le sujet avait été principalement et
brillamment porté à l'écran par Peter Watson. Et comme un éternel
recommencement, Threads
possèdes les atours d'un remake tardif et en couleur de cet
authentique cauchemar n'excédant pas les trois-quart d'heures qui
fit sans doute faire des cauchemars aux spectateurs qui le
découvrirent à l'époque. Le téléfilm de Mick Jackson conserve de
son aîné son aspect de documentaire rigoriste cliniquement froid.
L'esthétique générale aidant puisque Threads a
depuis visuellement mal vieilli, son aspect parfois rudimentaire
participe à l'élaboration d'un récit d'un vérisme et d'une
cruauté qui ne connaîtront quasiment pas d'équivalent sur grand
écran. Dans un premier temps, Threads se
concentre sur les personnages de Ruth Beckett (Karen Meagher) et de
Jimmy Kemp (Reece Dinsdale). Ils vivent à Sheffield, s'aiment, sont
fiancés et envisagent de se marier maintenant que la jeune femme
attend un bébé de son compagnon.
C'est
dans ce contexte plutôt optimiste que vont se dérouler les
événements. Les médias ne cessent de relater le conflit qui peu à
peu émerge entre les États-Unis et l'Union Soviétique au sujet
d'une invasion de l'Iran par ce dernier. L'armée britannique
renforce les forces de l'OTAN en Europe de l'Ouest et tandis que les
États-Unis tentent de calmer le jeu, l'Union Soviétique s'en prend
aux bombardiers américains ! Bien que l'atmosphère d'une telle
annonce refroidisse une partie de la population anglaise, la plupart
des habitants de Sheffield continuent à vaquer à leurs occupations.
Ruth et Jimmy achètent leur premier appartement, le rénovent et
attendent avec joie leur premier enfant. Mais tout va très
rapidement s’accélérer. Une bombe atomique explose près de
Sheffield et cause d'extraordinaires dommages. La plupart des
immeubles s'effondrent et leurs habitants se retrouvent à la rue.
Ruth et Jimmy sont séparés. L'autorité qui jusque là semblait
préparée et avait au travers d'innombrables messages tenté de
rassurer la population se retrouve désormais démunie et dans
l'incapacité de produire auprès d'elle, l'une des ressources
essentielles : la nourriture. Dans son genre, Threads
n'est
vraiment pas tendre avec son public. En effet, Mick Jackson ne
dispense pas ce dernier des visions les plus mortifères qui soient.
Tout y passe.. Des premières nausées en passant par les premiers
cadavres, la poussière qui, invariablement, recouvre toutes les
surfaces, les pillages, la révolte, la loi martiale qui autorise la
police à tuer ceux qui se rendent responsables de vols... Et puis,
il y a ces images quasi insoutenables de la catastrophe elle-même et
de ses conséquences : des hommes et des femmes qui brûlent,
ainsi que leur animaux de compagnie. Sheffield est devenu un
véritable enfer sur Terre. Et toujours ce ton monocorde qui énumère
les morts, la proportion de bombes qui ont été lancées à travers
le monde ainsi que toutes les conséquences liées à la catastrophe.
Bien que le téléfilm accuse quasiment les quarante ans d'âge, il
n'a absolument pas perdu de son impact émotionnel. Des images d'une
cruauté parfois inouïe alimentent un récit d'une extrême
noirceur. Si seulement Threads pouvait
servir de leçon...
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