Alors que 2022 s'apprête
à prendre fin, qu'aura-t-on réellement retenu de cette année en
matière de cinéma d'horreur et d'épouvante ? Quelques
longs-métrages dont la réputation ne tient en réalité que sur des
critiques abusivement dithyrambiques où des réactions bien trop
exagérée de certains publics pour être véritablement honnêtes. X
ou Pearl de
Ti West ? Ego
de Hanna Bergholm ? Abuela
de Paco Plaza ? Smile
de Parker Fin ? Des œuvres qui, certes, sortent du lot mais ne
marqueront pas le septième art d'une marque indélébile en terme
d'effroi. Ne parlons même pas du Scream
de Matt Bettinelli-Olpin et Tyler Gillett, du Black
Phone de
Scott Derrickson ou pire, du Esther
2 : Les Origines
de William Brent Bell qui n'offrent rien de véritablement innovant
et ne s'avèrent pas du tout effrayants. Alors que les amateurs de
cinéma gore attendent sans doute avec impatience le Terrifier
2
de Damien Leone dont sa réputation le précède, l'une des vraies
bonnes claques de l'année 2022 nous est venue tout droit de
Thaïlande avec le dernier long-métrage de Banjong Pisanthanakun,
The
Medium.
L'un de ces films titanesques à rejoindre le panthéon des œuvres
qu'il faut absolument avoir vu à l'image d'un Midsommar
signé de Ari Aster ou The
Strangers
de Na Hong-jin ! S'il en est un qui échappe malheureusement de
justesse au titre de meilleurs film d'horreur et d'épouvante de
l'année, c'est bien Barbarian
de
Zach Cregger qui après la comédie romantique Miss
Mars en
2009, le film de guerre historique The
Civil War on Drugs en
2011 et quelques épisodes de séries télévisées réalisait en
cette année 2022 ce qui aurait pu et dû devenir la nouvelle
référence en matière de cinéma de l'effroi. Le genre de perle
dont nous n'attendions rien et qui pourtant aurait pu rester dans
l'esprit des gens comme l'un des meilleurs représentants de sa
catégorie cette année...
N'étant
apparemment pas intéressé par la démystification entourant le
quartier de Brightmoor situé à Détroit, dans le Michigan, le
réalisateur américain utilise ces lieux peu à peu abandonnés et
ressemblant à une ville fantôme jonchée de demeure détruites,
brûlées et rendues à mère nature pour en faire le terreau d'un
récit habilement mené. Prenant pour témoin l'intuition des
spectateurs, Zach Cregger parvient à détourner certains codes pour
mieux les tromper et les diriger vers une réalité qu'ils n'étaient
jusque là pas encore prêts à envisager. Tout le génie,
dirons-nous, de ce Barbarian
dont le titre se réfère davantage à la situation géographique du
récit qu'à un quelconque contenu qui se voudrait aussi rude qu'un
Martyrs
(Pascal Laugier, 2009) s'inscrit dans des hypothèses habituellement
confirmées par certaines attitudes propres aux personnages. Découpé
en quatre chapitres ainsi qu'une conclusion, Barbarian
démarre avec la présentation de Tess qu'interprète l'actrice
Georgina Campbell. Actrice afro-américaine dont la couleur de peau
et les origines feront peut-être tiquer ceux qui penseront d'avance
à un traitement à la manière de Get
Out.
Mais ici, rien à voir. Tess découvre qu'elle et un certain Keith
(l'acteur Bill Skarsgård) ont loué la même maison aux mêmes
dates. Une erreur produite par la société de location qui comme
nous le découvrirons bien plus tard n'aurait dû avoir aucune espèce
d'implication dans le récit mais qui pourtant participe de
l'élaboration d'un stratagème visant à tromper et détourner
l'esprit du spectateur. Sans avoir eu besoin le moins du monde
d'employer dans le rôle du sympathique locataire l'acteur suédois
connu principalement pour son rôle de Pennywise dans le diptyque Ça
d'Andy Muschietti, Zach Cregger parvient d'emblée à semer le doute.
Serviable, éminemment précautionneux et courtois, Keith se présente
comme le jeune homme idéal en qui on peut avoir confiance.
Parfait... Peut-être trop, justement. Accueillant Tess pour la nuit
dans une maison située dans un quartier qu'il ne fait pas bon
fréquenter la nuit, Keith est l'adorable personnage dont on croit
déceler une attitude bien trop honnête pour être sincère...
Et
puis, il y a la visite de cette cave recelant de sombres recoins.
Objet d'un malaise qui semble confirmer ce que l'on ''savait déjà'' :
Que le jeune homme attentionné fait partie de cette ''famille'' de
pervers qui kidnappent, enferment et torturent psychologiquement et
physiquement leurs victimes à des fins sadiques... Sauf que, ben,
heu, le spectateur va rapidement se rendre compte qu'il a tout faux
et qu'il vient de tomber dans le double piège tendu par le
réalisateur et par ses propres idées reçues ! Brightmoor est
le genre d'univers propice à générer angoisse et malaise. Quartier
abandonné de ses habitants et où la police traite la moindre
urgence avec dédain (Tess en fera d'ailleurs les frais). De
l'astucieux script qu'il a écrit lui-même, Zach Cregger obtient
une œuvre forte, anxiogène mais non dénuée de certaines
références. La première partie, la plus longue opposant Tess et
Keith est sans doute la plus forte du long-métrage. Jouant sur
l'appréhension de ce qui pourrait se produire entre les deux
personnages enfermés dans une maison isolée au beau milieu d'un no
man's land constitué d'épaves, on reste scotché, dans l'attente
suffocante d'un événement. Lequel se produit pour ensuite laisser
place à un nouveau personnage interprété par Jutin Long. AJ est le
propriétaire de la dite demeure. Accusé de viol par l'une des ses
anciennes relations et bientôt sans le sou, cet acteur va bientôt
devoir revendre certaines de ses acquisitions afin de renflouer les
caisses. À commencer par la demeure justement située à Brightmoor.
Son apparition à l'image constitue une bouffée d'air que le
spectateur ne se fera pas prier de prendre après ce que vient de lui
infliger le réalisateur ! Si ce second ''acte'' est très
légèrement moins intéressant que le premier, il est surtout le
signe d'une lente dégradation qui ne va avoir de cesse de
s'accentuer. Car dès lors, le film va se montrer de plus en plus
commun dans son traitement. Certaines sinistres figures du septième
art vont en effet s'y refléter. Comme celle du Creep
de Christopher Smith et plus encore celle du [•REC]
de
Paco Plaza et Jaume Balagueró. Des détails pourtant nettement moins
dérangeants que le final, lequel détruit toute chance pour
Barbarian
de
devenir LA référence du cinéma d'épouvante de l'année 2022...
C'est
d'autant plus rageant que pour une fois, les termes anxiogène,
étouffant et terrifiant ne sont pas vraiment galvaudés. Le
réalisateur possède l'art et la manière de nous foutre parfois le
trouillomètre à zéro. Comme ce plan subjectif filmé à la
troisième personne dans des galeries souterraines vraiment
flippantes ou ces incessants jeux de lumières qui vont s'y produire.
Les interprètes sont convaincants, avec une mention spéciale pour
ceux qui interprètent Tess et Keith ainsi que Matthew Patrick Davis
dans le rôle de ''la mère'', laquelle n'a presque rien à envier à
la Tristana Medeiros de [•REC]
si
ce n'est qu'il arrive avec quatorze ans de retard. Bien qu'étant
doté d'indéniables compétences narratives, le film est
malheureusement sabordé par une dernière partie à ce point ratée
qu'elle en devient risible. On veut bien imaginer que Zach Cregger
ait ainsi pu vouloir désamorcer la charge qui pesait sur ses
personnages et sur les spectateurs mais là, c'en est trop. Le
spectateur devra donc s'attendre à une fin décevante. Ce qui ne
devra en revanche pas le faire douter des qualités réelles de ce
film d'horreur qui demeure malgré tout l'une des très bonnes
surprises de cette année 2022...
Je recommande : men (2022) ; autre pépite de l année qui a plutôt bien fonctionné sur moi.
RépondreSupprimerBarbarian est très honnête.