Il m'arrive parfois de
m'emballer un peu trop rapidement. De surévaluer une œuvre. Mais
là, non, je suis certain de mon fait. Donner du bonheur au
spectateur en véhiculant un message, simple, réconfortant, telle
devrait être la mission de toute série. De tout long-métrage. La
prise de risque ici, est énorme. On la dirait insurmontable, surtout
qu'en comparaison, Kung-Fu est
aussi contemplatif que sont très souvent exubérantes la plupart des
séries télévisées. Surtout depuis un certain nombre d'années où
produire pour le petit écran revêt autant d'importance que pour le
grand. Quelle mouche a bien pu piquer le producteur et scénariste
américain Ed Spielman et l'acteur sino-américain Bruce Lee pour
envisager une seule seconde que la série incarnée par l'acteur
David Carradine, lui-même 'habité' par le personnage de Kwai Chang
Caine, pourrait avoir du succès ? Car il fallait oser
imposer un tel personnage. Élève d'un monastère shaolin, élevé
par des prêtres prônant aussi bien l'amour et le respect de leurs
semblables que celui de la nature. Kwai Chang Caine, ce fugitif,
accusé de meurtre dans son pays d'origine, la Chine, réfugié aux
États-Unis où vivent là-bas ses semblables. Lesquels sont victimes
de l'homme blanc. Rien qu'à travers son titre La
voie du Tigre, le signe du Dragon,
ce pilote d'une série au final constituée de soixante-deux épisodes
divisés en trois saisons demeure à lui seul tout un programme. Et
sous ce titre, c'est tout un pan du monachisme shaolin qui nous est
révélé avec une pudeur presque déconcertante.
Comme
cela sera l'habitude durant le déroulement de la série, nous
découvrons un Kwai Chang Cain adulte, débarquant d'un désert qu'il
a traversé pour aboutir dans le cas présent, dans une petite ville
de l'ouest américain. C'est là qu'il fait la connaissance d'un
vieil homme chinois qui l'aide à trouver un travail. Le voici
désormais employé à la construction d'une ligne de chemin de fer.
Tous ceux qui travaillent là sont comme Caine : chinois. Le
responsable du projet ainsi que ses hommes lourdement armés sont
tous américains. Les tensions sont nombreuses entre blancs et
'bridés'. Surtout depuis qu'il a été découvert que la colline que les
ouvriers doivent creuser afin d'y aménager la voie de chemin de fer
contient des poches de gaz très dangereuses. Bientôt, tous
découvrent que Caine est un prêtre Shaolin. C'est sur lui que se
reposent désormais les ouvriers contre le consentement du
responsable du chantier qui apprend bientôt que le nouveau venu est
recherché dans son pays pour meurtre...
La
série Kung-Fu est
l'expression même du Zen. Contemplative, et d'une profondeur
incroyablement touchante de par les vertus qu'elle véhicule, les
aventures de Kwai Chang Caine prônent la tolérance envers son
prochain quel qu'il soit. Même si ce fait n'est pas encore
véritablement établi dans cet épisode pilote, les vertus des
enseignements prodigués par son maître à penser offrent au héros
des capacités hors du commun telles que la médecine traditionnelle
chinoise, la survie en milieu hostile (comme on le découvre dans cet
épisode, Kwai Chang Caine est capable de déceler sous le sable du
désert, de quoi se nourrir), et la maîtrise des arts-martiaux à
travers le Kung-fu shaolin.
Ce
qui stupéfait avant tout autre chose demeure dans cette immense
source d'inspiration dans laquelle puise le héros lorsque surgissent
les complications. A ce titre, le spectateur ne pourra rester
insensible devant les préceptes évoqués par le vieil homme
aveugle, figure remarquable de la série, et dont l'importance
capitale dépasse ici le simple cadre de l'éducation de son élèvre
comme nous l'apprendra la fin de cet épisode qui tient véritablement
du miracle. La voie du Tigre, le signe du Dragon
est
une œuvre profonde. Un enseignement à l'attention de tous. Cruelle,
tragique, émouvante et belle à la fois. L'embranchement parfait
entre le cinéma ésotérique d'Alejandro Jodorowsky (El
Topo,
La Montagne Sacrée)
et le film de kung-fu cher à Bruce Lee. Car si sur grand écran, le
chilien, auteur du sublime Santa Sangre osa
en 1970 le seul et unique western ésotérique de l'histoire du
cinéma, ce parangon allait trouver sa formule télévisée à
travers Kung-Fu et ses admirables interprètes que furent David Carradine et Keye Luke...
Bonjour
RépondreSupprimerMerci pour ce très bel article sur la série et son pilote.
Maintenant, une seule question :
savez-vous où peut-on le trouver en version francaise ?
si oui, puvez-vous me donner le lien ?
Merci !
personne009@yahoo.fr