Quand on vous dit que
l'argent ne fait pas le bonheur... certains auraient dû en prendre
de la graine et envisager ce proverbe comme unique alternative. Money
prouve que le pognon n'y contribue même pas. Ou du moins, à l'issue
d'un long chemin de croix qui vous abandonnera à votre sort. Seul,
sans amis, sans famille, contraint à l'exile. Au lieu d'aller
cambrioler une mallette remplie d'argent sale appartenant à un
notable, Danis et ses amis Eric et Alexandra auraient mieux fait de
regarder Série Noire d'Alain
Corneau, l'un des monuments en matière de polar français, en tout
cas, depuis sa sortie en 1979, jamais égalé. Money
est
peut-être l'un des meilleurs descendants du cauchemar paroxystique
pour lequel l'immense Patrick Dewaere livra une performance
inoubliable. La relève est dorénavant assurée grâce à George
Babluani et Vincent Rottiers qui campent ces deux jeunes imbéciles
qui croyaient sans doute faire leur bonheur en volant l'argent
douteux d'un notable (excellent Louis-Do de Lencquesaing). Money
est
un thriller aussi noir qu'une nuit sans Lune, aussi violent qu'un raz
de marée, et aussi redoutable qu'un uppercut.
Pourtant,
le principe est des plus simple : trois jeunes havrais sans
avenir certain évoquent l'idée de pénétrer la luxueuse demeure
d'un secrétaire d'État à la morale plus que douteuse afin de lui
dérober une très grosse somme d'argent. Alors que le long-métrage
démarre par un flagrant délit concernant une cargaison de deux
tonnes de drogue, il ne s'agit en fait que d'un événement assez
rapidement relayé aux oubliettes puisque l'intrigue, se resserrera
autour du trio formé par Danis, et les frère et sœur Eric et
Alexandra. Le braquage, comme on peut s'en douter, prendra un virage
inattendu pour nos trois cambrioleurs inexpérimentés. Le film de
Gela Babluani s'inscrit dans une échelle de temps n'excédant pas la
dizaine d'heures qui séparent le crépuscule d'une journée de
l'aube suivante. Plus la nuit avance, et plus l'avenir proche de nos
trois jeunes adultes est incertain. Entre huis-clos et chasse à
l'homme au cœur d'une nuit opaque, Money
déroule
l’implacable scénario que le cinéaste a lui-même écrit.
Il
aura fallut cinq semaines à Gela Babluani pour tourner l'un des
polars les plus efficaces du moment. La preuve que le cinéma
français, en la matière, n'a pas à rougir face à la concurrence
américaine, scandinave, japonaise ou sud-coréenne. Aussi discrète
soit-elle, la musique du compositeur et pianiste français
Jean-Michel Bernard s'intègre parfaitement et participe au climat
délétère qui imprime le long-métrage. Le montage, sans être
abusivement nerveux, façonne quant à lui un rythme suffisamment
enlevé pour que les scènes, les événements, s'enchaînent sans
que le spectateur n'ait à aucun moment à souffrir de la moindre
lassitude. Les amateurs de thriller reconnaîtront au passage la
présence de deux des interprètes de l'efficace Taken
que Pierre Morel réalisa il y a de cela dix ans tout rond : le
français Olivier Rabourdin qui une fois de plus incarne un
personnage aux contours assez troubles, ainsi que l'excellent acteur
albanais Arben Bajraktaraj. On notera également la présence des toujours aussi épatants Féodor Atkine et Benoît Magimel. Money
demeure
donc une totale réussite qui mérite que l'on s'y penche, que l'on
soit amateur du genre ou pas.
Allez,
juste pour évoquer le(s) « petit(s)
truc(s) » qui
pourrai(en)t empêcher le film de devenir un classique du polar à la
française, je reprocherai juste aux interprètes de réciter leur
texte en chuchotant comme s'ils craignaient que les voisins ne les
entendent. En intérieur, cela peut se comprendre, mais dehors, à
l'écart de tout, cela reste épuisant de devoir tendre l'oreille en permanence pour comprendre ce que chuchotent les personnages. De plus vous pourrez constater la laideur de l'affiche... A part ces menus détails, rien
à redire, louez Money,
achetez-le, mais surtout, ne le volez pas. Vous risqueriez de
connaître un sort similaire à celui de nos trois jeunes héros...
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