Alors que Martyrs
de Pascal Laugier à tant fait parler de lui avant, pendant et après
sa sortie en 2008, il faut sans aucun doute remonter jusqu'à l'année
précédente pour trouver LE film d'horreur français qui remis notre
nation sur les rails d'un cinéma outrancier que les cinéastes
français, toujours opportunistes, tentaient de faire pencher sur la
balance et sur laquelle pesait de tout son poids, et très
majoritairement, le cinéma américain. Les français et le gore,
c'est une histoire d'amour vieille de plusieurs décennies qui connu
sa première véritable boursouflure avec Baby Blood et
auquel le film du duo formé par les cinéastes Julien Maury et
Alexandre Bustillo, A l'Intérieur,
semble être un hommage. Du moins, un prolongement. Un fils spirituel
détrônant sans le moindre mal une petite bande horrifique qui du
coup, a pris un sacré coup de vieux.
A l'Intérieur,
lui, a encore de beaux jours à vivre. Et même si les médias ont
surtout encensé Martyrs et que d'autres se sont essayé avec plus ou
moins de bonheur à l'horreur viscérale (au hasard Frontière(s)
de Xavier Gens ou Haute Tension d'Alexandre
Aja), A l'Intérieur demeure
celui qui marque au fer rouge celui qui le découvre pour la
première. Julien Maury et Alexandre Bustillo s'entourent d'abord
d'un casting impeccable. Alysson Paradis dans le rôle de Sarah qui,
décidément n'a pas de chance puisqu'après avoir perdu son
compagnon dans un grave accident de voiture quatre mois auparavant,
cette jeune femme enceinte dont l'accouchement est programmé pour le
lendemain du réveillon de Noël va se retrouver piéger dans sa
propre demeure avec à ses trousses, une inconnue. Enfin, pas
vraiment. Du moins pour cette dernière qui semble connaître
« l'histoire »
de la future maman. Tout le récit s'articule donc entre ces deux
personnages, et s'il n'est nul besoin de sortir de Polytechnique pour
comprendre que l'accident du départ est le lien qui les rapproche,
tout l'intérêt de A l'Intérieur
ne se situe fort heureusement pas que là.
Julien
Maury et Alexandre Bustillo réussissent le tour de force de réaliser
une œuvre qui excite deux des sens les plus sensibles du
spectateur : la vue et l’ouïe. Grâce à la photographie de
Laurent Barès, nous prenons place dans un liquide amniotique dont
les fuites sont résorbées par les murs d'une demeure où tous les
fantasmes sont permis. Pas seulement ceux, déviants, de l'inconnue,
mais aussi ceux des spectateurs qui pour le coup, vont en avoir pour
leur argent. A l'Intérieur patauge
dans une mare de sang incroyable, dépassant (fort heureusement en de
très rares occasions) les limites du « bon
goût »
et ce, notamment lorsqu'un flic se relève de sa blessure pour
attaquer la pauvre Sarah. Une scène qui frise le ridicule mais qui
au regard du reste, demeure anecdotique. Au delà d'une histoire
somme toute basique et dont on devine assez vite la teneur, le vrai
coup de génie des deux cinéaste est cette échappée dans la psyché
d'une déséquilibrée rendue folle par la perte d'un enfant. Et pour
mieux nous faire entrer dans sa tête, point de mise en scène à la
première personne comme avaient pu le faire en son temps le cinéaste
autrichien Gerald Kargl avec son impressionnant et prodigieux
Schizophrenia
ou Franck Khalfoun avec son remake du classique de l'horreur Maniac
de William Lustig mais une image, un grain qui se délie au fil de
l'intrigue jusqu'à sa conclusion, incroyablement nihiliste. Julien
Maury et Alexandre Bustillo osent tout et tapent à chaque fois dans
le mille. En s'offrant le privilège d'une interprétation sans
faille et d'un décorum mortifère totalement maîtrisé, A
l'Intérieur s'offre
alors les atours d'une œuvre d'art à l'esthétisme morbide que
n'aurait sans doute pas renié un certain Gaspar Noé.
Et
si comme tout ceci ne suffisait pas, le rôle de l'inconnue, les deux
cinéastes l'ont offert à notre Béatrice Dalle nationale qui de son
sourire carnassier n'a jamais parue aussi terrifiante. Elle qui déjà
avait marqué les esprits dans le très étrange et parfois
insoutenable Trouble Every Day
de Claire Denis, elle offre une performance incroyable dans ce qui
demeure, de mon avis, comme le meilleur film d'horreur français
jusqu'à ce jour. Et c'est pourquoi j'attends, avec une fébrile
impatience, la vision personnelle de Julien Maury et Alexandre
Bustillo qui ont réalisé une préquelle au classique de Tobe
Hooper, Massacre à la Tronçonneuse.
Reste à savoir maintenant quant leur dernier bébé sortira...
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