Combien tu
m'aimes ? Combien
je l'aime, ce cinéma, cet auteur, et ses interprètes. Encore et
toujours, Bertrand Blier défend ce cinéma, le sien, cynique,
émouvant, battant le chaud, puis le froid. S'il s'était peut-être
un peu dispersé, cherchant à retrouver sa verve sans jamais
véritablement y parvenir avec ses deux précédents longs-métrages
(Les Acteurs,
Les Côtelettes),
en 2005, il revient avec une œuvre admirablement drôle, émouvante,
emprunte d'une poésie qu'il sublime chaque fois par des choix
musicaux délicats. Et même si l'on n'est pas friands d'opéra, le
calque sonore qu'il juxtapose aux images rend ces airs formidablement
beaux.
Gérard
Depardieu, encore, mais se lançant dans de l'inédit avec Bernard
Campan, Monica Bellucci, Edouard Baer, et même, sa compagne Farida
Rahouadj, Bertrand Blier n'a rien perdu de son talent de conteur.
Mieux, il semble être revenu d'un monde où les années passent et
l'inspiration se meure. Un univers dont il a réussi à s'extraire
pour nous offrir un spectacle presque aussi jouissif que ses plus
grands films.
Combien tu
m'aimes ?
est typiquement le genre de film qui vous fait passer par différents
états. Entre l'amertume de la solitude dont on ressent le poids
durant les premières minutes, à la joie collective et communicative
d'une fête dont le fond sonore étonne dans la carrière du
cinéaste. Sans crier gare, voilà que l'on sourit de ses belles et
grandes dents. A s'en décrocher la mâchoire. A solliciter les
zygomatiques jusqu'à la douleur. Sans doute avons-nous l'air bête
d'exprimer un air aussi béat, mais voilà que lâchement nous
invoquons la faute à un homme, un seul : Bertrand Blier,
lui-même. Ce génie du septième art, lequel a donné ses lettres de
noblesse aux dialogues, comme en son temps un certain Michel Audiard.
Combien tu
m'aimes ?
ouvre grandes ses portes. Celles de son cœur, surtout. Celui, malade
de François (Bernard Campan), qui grâce à Daniela (Monica
Bellucci), et son amour pour lui, va le guérir. Découvrir de
nouveaux interprètes chez Blier fait un peu le même effet à chaque
fois. On se demande dans quelle mesure ils parviendront à saisir
l'essence des textes de leur auteur pour nous les restituer à leur
juste valeur. Et chaque fois, c'est le même constat : Bertrand
Blier n'est pas qu'un dialoguiste exceptionnel. Il dirige également
ses acteurs de main de maître. Son cinéma a apparemment évolué
vers moins de loufoquerie et plus d'émotion, mais ne nous y trompons
pas car ce coquin de Blier en a encore sous le pied. Et qui mieux que
sa compagne, l'excellente Farida Rahouadj pour nous en convaincre ?
En
une seule scène, nous redécouvrons ce qui nous avait manqué les
quelques années précédent la sortie de Combien
tu m'aimes ? en
2005. Farida Rahouadj face au couple Campan-Bellucci dissertant sur
l'orgasme féminin entre deux portes. Un peu moins de trois minutes
durant lesquelles Bertrand Blier nous rassure définitivement sur sa
capacité à revenir au cinéma que l'on aime chez lui. Quelques
scènes ainsi ponctuées d'autres beaucoup plus « symptomatiques »
du « nouveau »
Blier. Derrière la bouffonnerie, l'auteur des Valseuses
est aussi un formidable conteur lorsqu'il s'agit de parler d'amour.
Toujours et encore dans des situations inédites comme celles
rencontrées dans Préparez vos Mouchoirs,
Beau-Père
ou Trop Belle Pour Toi.
Cette fois-ci, il partage l'histoire d'un homme désespérément
seul, riche à millions, qui propose à une pute de vivre avec lui
moyennant finances. Toute la subtilité du jeu d'acteur étant de
laisser planer un doute sur la réelle ou fausse sincérité de
Daniela. Gérard Depardieu, lui, campe un individu sinistre qui, lui
aussi sera guéri de ses mauvais démons. Bertrand Blier aurait pu
simplement nommer son œuvre AMOUR tant on sent bien que c'est autour
de ce sentiment d'affection unique que le sujet de Combien
tu m'aimes ? a
été développé. Encore un immense film de la part de Bertrand
Blier...
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