Avec Shaft - Les
Nuits rouges de Harlem de
Gordon Parks l'on tient l'un des monuments de la Blaxploitation.
À l'époque où sort le premier volet de la franchise Shaft,
la Metro-Goldwin-Mayer connaît d'importantes difficultés
financières. Le choix de produire le film de Gordon Parks est alors
une aubaine puisqu'il réalisera l'un des meilleurs scores de cette
année 1971. Et pour cause : alors que le genre est en plein
balbutiement et en plein essor, tous les éléments sont réunis pour
faire de ces Nuits rouges de Harlem
l'un des futurs grands classiques de la Blaxploitation.
Son héros, celui qui donne son nom au titre, détonne avec une
grande partie des protagonistes qui dans cette catégorie de
longs-métrages mettent en avant des actrices mais surtout des
acteurs afro-américains peu en accord avec la vision que l'on peut
avoir du Héros avec un grand H. Exit les proxénètes, les
trafiquants de drogue ou plus simplement les criminels de droits
communs. John Shaft est professionnellement loin des préoccupations
qui touchent ceux qui gangrènent la ville de New York et plus
précisément le quartier de Harlem. Site idéal de la plupart des
films de Blaxploitation
et situé au nord de l'arrondissement de Manhattan, Harlem est donc
une fois encore le théâtre d'intérêts qui cette fois-ci font
intervenir la mafia italienne. Shaft - Les Nuits
rouges de Harlem
est donc partagé entre des interprètes d'origine afro-américaine
et des acteurs que l'on pourrait davantage supposer qu'ils sont issus
de la communauté italo-américaine (ce qui reste bien entendu à
vérifier). En ce sens, des acteurs tels que Victor Arnold ou Dominic
Barto et sa légendaire cicatrice à la joue gauche personnifient à
merveille les membres de cette organisation ambitieuse qui désire
prendre le pouvoir sur le quartier de Harlem. Et la méthode qu'ont
choisi les membres de la Mafia italienne n'est autre que de kidnapper
la fille du Parrain de la drogue, Bumpy Jonas. L'une des révélations
du long-métrage est la présence à l'écran de l'acteur
afro-américain Moses Gunn, un très grand acteur de théâtre qui ne
s'est pas contenté de jouer sur scène puisqu'on a pu le voir à
plusieurs reprises sur grand écran mais aussi et surtout à la
télévision dans la série culte La petite
maison dans la prairie,
dans le rôle de l'ancien boxeur Joe Kagan. Un personnage d'abord
prévu pour n'apparaître que dans un seul épisode (Le
boxeur,
le dixième de la quatrième saison) avant qu'il ne devienne plus ou
moins récurrent lors de certaines saisons postérieures...
Il
incarne ici un criminel notoire dont on a donc enlevé la fille
(l'actrice Sherri Brewer dans le rôle de Marcy Jonas) afin de le
faire plier et accepter de ''remettre les clés'' de Harlem à la
Mafia italienne. Notons également la présence de Christopher St.
John dans le rôle de Ben Buford, chef d'un gang qui sera mis en
relation avec John Shaft afin de l'aider à faire libérer la fille
de Bumpy ! Notons ensuite celle de l'acteur Charles Cioffi que
l'on a notamment pu voir dans des séries télévisées telles que
X-Files : aux frontières du réel,
Hawaï police d'État
ou Kojak
et au cinéma dans Lucky Luciano de
Francesco Rosi dans lequel il interpréta l'authentique rôle du
mafieux d'origine italo-américaine, Vito Genovese... Ici, l'acteur
interprète le rôle du fort sympathique lieutenant Vic Androzzi.
Mais Shaft - Les Nuits rouges de Harlem est
bien évidemment et avant tout personnifié par l'acteur Richard
Roundtree et sa belle gueule. Il incarne un John Shaft qui d'origine
est très peu porté sur la violence et se montre même généreux
avec ceux de sa communauté qui sont dans le besoin (comme le
démontre le début du film lorsqu'il file un billet à un gamin de
la rue transit de froid et affamé). Alors qu'il a une compagne, l'on
découvre que ce séducteur (parfois involontaire) n'est pas très
fidèle en amour et se montre même parfois très macho envers les
femmes. Avec ce premier opus d'une franchise qui comportera tout
d'abord trois volets puis deux autres réalisés longtemps après
naît une légende de la Blaxploitation.
Une œuvre beaucoup plus ''subtile'' que la moyenne, inspirée des
ouvrages d'Ernest Tidyman, lequel collabora à l'écriture du
scénario en compagnie de John D. F. Black. Le film est en outre
enrobé d'une excellente partition musicale composée par J.J.
Johnson mais aussi et surtout par l'immense producteur, chanteur et
compositeur afro-américain Isaac Hayes... Moins violent que la
moyenne mais beaucoup plus réfléchi dans sa mise en scène et son
interprétation, Shaft - Les Nuits rouges de
Harlem est
un authentique classique de la Blaxploitation
auquel Gordon Parks offrira une première suite dès l'année suivante
sous le titre Les Nouveaux Exploits de Shaft
(Shaft's
Big Score!)...
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