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lundi 13 janvier 2025

Cade: The Tortured Crossing de Neil Breen (2023)

 


 

L'enfer étant, parait-il, pavé de bonnes intentions, c'est derrière l'apparat parfaitement décontracté du naïf sous lequel je me suis hier réfugié que je me suis lancé dans la projection du dernier long-métrage de Neil Breen dont je commençais à cerner les intentions à travers Twisted Pair trois jours auparavant. Ce drôle d'objet cinématographique faussement auteurisant et sans doute moins orgueilleux qu'il n'y paraissait. Une expérience, pourtant, autrement plus complexe à identifier que la plupart de celles proposées par certains génies du septième art (à commencer par David Lynch). Cade: The Tortured Crossing vient prendre la relève cinq ans après les précédentes aventures de Cabe et Cale qui réapparaissent donc pour la seconde fois après Twisted Pair. Question : vais-je être récompensé pour ce courage qui me caractérise ? Ce tout nouveau projet du plus complet des cinéastes, capable d'endosser à lui seul les casquettes de réalisateur, interprète, musicien, chef-décorateur, monteur ou directeur de la photographie va-t-il me réconcilier avec cette approche très spécifique du cinéma ? Pas sûr. Car à peine guéri des blessures psychologiques infligées lors de la projection de son avant-dernier long-métrage, son auteur ne semble pas avoir calmé ses ardeurs à travers ce qui constitue peut-être son œuvre la plus formellement ''non-aboutie'' ! La quintessence d'un art dont les techniques les plus récentes sont ignorées mais dont les proportions que prend le script n'ont à vrai dire que peu de concurrents. Hier encore, j'osais comparer Neil Breen à David Lynch. Et même à David Cronenberg, grâce aux architectures dont la froideur était innocemment traduite à travers des fonds verts figés dans le silence et où pas âme ou presque ne subsistait. Aujourd'hui, c'est à un autre grand cinéaste qu'il sera de plus ou moins bonne augure de comparer le travail de Neil Breen. Car aussi incongru que cela puisse paraître, il y a chez ce bonhomme presque tout à fait unique, une faim insatiable consistant à mettre en images tout ce qui lui passe par la tête. Tout comme le réalisateur chilien Alejandro Jodorowsky et ses mythiques El Topo, La montagne sacrée ou Santa Sangre pour n'évoquer que ses œuvres les plus connues. Mais là encore, la comparaison s'arrête à cette seule perspective d'un cinéma boulimique, qui dans le cas de ce dernier s'avérait prodigieusement fascinant.


Une vision des choses qui prend le chemin inverse dans le cas de Cade: The Tortured Crossing. L'approche habituellement foisonnante de son auteur a ici disparu au profit d'une œuvre dont les décors pétrifiés sont désormais rejoints par un script totalement sclérosé. Toujours doté de ses supers-pouvoirs, Cabe est devenu un mécène tout acquis à la cause d'un hôpital psychiatrique dont les patients sont pourtant les sujets d'expériences abominables menées par des médecins peu scrupuleux en terme de déontologie. Si les dons offerts par notre héros sont acceptés les bras ouverts par les grands responsables de l'entreprise, ceux-ci ne servent donc non pas à aider les patients à guérir mais à faire progresser la science de manière plus que douteuse. L'on retrouve ensuite Cale qui, démunit des facultés qu'il partageait avec son frère au début de Twisted Pair est désormais victime d'un mal qui le contraint à collaborer avec les médecins de l'asile. Kidnappant de jeunes SDF pour les emmener à l’hôpital où ils serviront de cobayes, il espère ainsi pouvoir bénéficier des résultats des recherches et ainsi survivre au mal qui le ronge. Exit la cybercriminalité. Si l'évocation de l'Intelligence Artificielle perdure, le sujet tourne surtout autour de cet hôpital, de ses patients/victimes et de leurs bourreaux. Un sujet on ne peut plus intéressant mais qui sous la houlette de Neil Breen confine à l'ennui le plus total ! Dans le précédent article consacré à son précédent long-métrage, j'évoquais The Room de Tommy Wiseau. Sauf qu'en réalité, c'est plutôt à un autre type de cinéma que l'on doit comparer celui de Neil Breen. Son œuvre toute entière dévolue à l'amateurisme se rapproche effectivement plus de la trilogie Birdemic réalisée entre 2010 et 2022 par le cinéaste américain originaire de Da Nang, au Vietnam, James Nguyen. Sorte de triple ''hommage'' nanardesque aux Oiseaux d'Alfred Hitchcock, ces trois films avaient l'avantage de proposer un contenu capable de garder éveillés les spectateurs. Cade: The Tortured Crossing fait, lui, figure de long et très douloureux chemin de croix. Un récit tournant en boucle sur lui-même et d'où n’émergent que de très, très, très rares et très très, très courts instants de satisfaction (le combat entre Cabe et un tigre blanc en images de synthèses affreuses!). Dans le bouillonnant vivier du cinéma Z le plus infâme, Cade: The Tortured Crossing rejoint donc le nullissime Attack of the Giant Blurry Finger que réalisa de son côté Cody Clarke deux ans auparavant. Autant dire, qu'ici, Neil Breen réalise un véritable exploit !

 

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