L'ambivalence qui
s'exerce sur la traduction française de No Way to Treat a Lady
que
réalisa en 1968 le cinéaste américain Jack Smight a ceci de
particulier que celui-ci s'impose immédiatement comme la brillante
représentation du cynisme qui constitue le socle d'une œuvre
méconnue a priori marquée par la présence exclusive de la Mort.
Car plutôt que de traduire mot pour mot le titre original et ainsi
lui donner sa forme initiale (Pas
moyen de traiter une femme),
en France l'on préféra l'interpréter différemment sous celui du
Refroidisseur de Dames.
D'où cette ambiguïté qui émerge, entre le sens premier du terme
qui fait se combiner les actes et leurs conséquences à cette
absurdité qui se dégage de la terminologie. Bref, une manière
comme une autre d'indiquer à l'aventureux spectateur qu'il aura non
seulement droit à son comptant de meurtres administrés par un homme
tourmenté par un sérieux complexe d'œdipe mais que l'intrigue aura
été préalablement et savamment orchestrée de manière à la
rendre beaucoup plus digeste auprès des observateurs beaucoup moins
tolérants à ce genre de production. Fruit du hasard ou non, dix
ans après la sortie de ce très grand film dans lequel son trio
principal donna la pleine mesure de son talent était diffusé sur le
petit écran, Quadrature,
le vingt-deuxième épisode de la troisième saison de la série
policière américaine, Starsky
et Hutch.
L'un de ces traumatismes télévisuels rares qui à l'époque
marquèrent le jeune public. Avec dans le rôle de Lionel Fitzgerald,
l'impressionnant Richard Lynch. Incarnant un ancien acteur de théâtre
dont la carrière fut stoppée net le jour où il fut renversé par
un chauffeur de taxi, nos célèbres détectives David Starsky et
Kenneth Hutchinson faisaient face à un désaxé qui se vengeait en
tuant à son tour d'autres professionnels du métier. Grimé de
différentes manières. Comme en représentation permanente lors des
meurtres commis la nuit, dans l'obscurité, brisant la nuque de ses
victimes. Un acte définitif comme semblait avant lui l'aborder
Christopher Gil (extraordinaire Rod Steiger), propriétaire d'un
théâtre sur les planches duquel sa mère avait du temps de son
vivant donné plusieurs représentations. Si dans l'imaginaire
collectif le sujet rappelle autant de fictions (Psychose
d'Alfred Hitchcock, Maniac
de William Lustig, etc...) que de drames authentiques ( Edward Gein,
dit ''Le
boucher de Plainfield''
aux États-Unis ou chez nous, Marcel Barbeault dit ''Le
tueur de l'ombre''),
No Way to Treat a Lady
possède ce petit quelque chose en plus qui le rend plus attachant
que n'importe quelle autre tentative.
En
ne concentrant pas le récit uniquement autour du tueur et des
féminicides dont sont les victimes des dames dont l'âge semble être
à peu de chose près celui de la mère de l'assassin au moment de
son décès, Jack Smight et le scénariste John Gay adaptent parfois
le roman éponyme de William Goldman sous le prisme de la fantaisie.
À travers ce duo improbable formé autour de George Segal, lequel
incarne le rôle de l'inspecteur Morris Brummel chargé de l'enquête
et de la sublime Lee Remick qui de son côté interprète celui de la
solaire et pétillante Kate Palmer. No
Way to Treat a Lady
traite ainsi de la passion et de l'amour sous divers angles. Celui
que l'on éprouve normalement pour sa mère mais qui dans le cas
présent déborde pour être ainsi incarné par un individu dérangé.
Mais aussi celui qui naît d'une rencontre entre un homme et une
femme et qui, sans que cela ne soit forcément le signe d'un coup de
foudre immédiat les raccorde étrangement l'un à l'autre. Comme
dans tout bon film de Serial
Killer,
le long-métrage semble s'inspirer d'un certain nombre de
faits-divers et il est presque inévitable de penser à l'affaire de
''L'étrangleur
de Boston''
Albert De Salvo qui entre 1962 et 1964 viola et assassinat par
étranglement treize femmes d'âges divers, entre dix-neuf et
quatre-vingt cinq ans ! Fait-divers qui d'ailleurs inspira la
même année que No Way
to Treat a Lady
le film de Richard Fleischer, The
Boston Strangler
avec dans le rôle principal Tony Curtis. Non dénué d'humour et
d'un certain charme que l'on doit notamment au duo formé par George
Segal et Lee Remick, donc, le long-métrage de Jack Smight est
surtout l'un des meilleurs représentants dans sa catégorie. Une
œuvre fascinante, ne serait-ce que grâce à la performance de Rod
Steiger qui cinq ans plus tard allait être au centre de
l'extraordinaire Lolly-Madonna
XXX
de Richard C. Sarafian. Bref, si vous ne l'avez pas encore compris,
sachez que No Way to
Treat a Lady
est un incunable. Un indispensable qui doit impérativement rejoindre
les grandes œuvres du septième art qui trônent sur vos étagères...
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