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vendredi 20 décembre 2024

Juré n°2 de Clint Eastwood (2024) - ★★★★★★★☆☆☆

 


 

S'il lui est arrivé de rater certaines de ses entreprises personnelles qu'il s'était fixé ou de manquer terriblement d'inspiration (Au-delà en 2010, Le 15h17 pour Paris en 2018), Clint Eastwood a de manière générale réussi tout ce qu'il a entreprit. Qu'il s'agisse de l'acteur ou du réalisateur, le public n'oubliera sans doute jamais sa réinterprétation du héros dans les westerns spaghetti qu'il forgea entre 1964 et 1966 aux côtés du cinéaste italien Sergio Leone avec la Trilogie du Dollar ou lorsqu'il le réinventa lui-même à travers quelques grands classiques du genre, tels L'homme des hautes plaines en 1973, Pale Rider, le cavalier solitaire en 1985 ou encore Impitoyable en 1992. Sans oublier ceux qui participèrent au grand dépoussiérage de l'un des mythes de l'Ouest américain (Ted Post, Don Siegel). Taxé de racisme, mais également de misogynie après la série de longs-métrages Dirty Harry mettant en scène le fameux inspecteur Harry Callahan. Prouvant tout le contraire avec le magnifique et bouleversant Sur la route de Madison en 1995. Comédies, films d'action, de guerre, de science-fiction, Clint Eastwood a touché à tout. Même au film d'épouvante en 1971 avec l'excellent Un frisson dans la nuit dans lequel son personnage était aux prises avec une ''groupie'' particulièrement récalcitrante ! Depuis, il n'a jamais cessé de tourner. Devant et derrière la caméra. Dénonçant ainsi ponctuellement les failles de la justice américaine comme il le fit notamment en 1997 avec Les pleins pouvoirs dans lequel Gene Hackman incarnait un président des États-Unis d'Amérique homicide qui de par son statut devenait ainsi intouchable ou deux ans plus tard avec Jugé coupable dans lequel le personnage incarné par Clint Eastwood enquêtait sur la culpabilité ou non d'un jeune noir condamné à mort. Son dernier long-métrage en tant que réalisateur est une nouvelle œuvre à charge où tout le monde en prend pour son grade. La politique, la justice, les autorités et même de simples citoyens vont être passés à la moulinette d'un long-métrage qui n'est pas sans rappeler le chef-d’œuvre que réalisa en 1962, le cinéaste français Georges Lautner, Le Septième juré. Dans cette œuvre remarquablement interprétée par Bernard Blier, l'acteur incarnait en effet le personnage d'un pharmacien du nom de Grégoire Duval qui après avoir commis un assassinat se retrouvait parmi les jurés lors d'un procès durant lequel était donc jugé un innocent. Plus de soixante ans plus tard, Juré n°2 fait écho de manière glaçante à ce classique du cinéma français.


Et bien que le récit se déroule à des milliers de kilomètres de celle qui jugea un innocent et que des décennies séparent ces deux longs-métrages, l'on remarquera que rien n'a vraiment changé. Avec toute la sobriété qui caractérise Clint Eastwood, ce dernier met en scène une œuvre forte en émotions puisqu'il oppose un homme marié et futur père à un véritable cas de conscience. Moralement, la justice doit passer par l'aveu. Mais à quel prix ? Sacrifier sa propre existence ainsi que celle de son épouse et de leur futur bébé ? Et pourquoi ? Pour un individu qui de toute manière ne semble jamais avoir rien fait de bien dans sa vie ? L'on observe d'ailleurs à ce sujet que les avis sont parfois bien tranchés. Entre la police qui n'a fait qu'enquêter à charge contre ce suspect idéal (Gabriel Basso dans le rôle de James Michael Sythe), la procureure adjointe Faith Killebrew (Toni Collette) qui assure l'accusation lors du procès et espère le gagner afin d'obtenir un poste de Procureur de district, ou bien les jurés dont certains se sont rapidement fait une idée sur la culpabilité ou non de l'accusé quand d'autres veulent tout simplement écourter les délibérations pour retrouver leur vie de simples citoyens. Que l'homme soit coupable ou non, le problème est ailleurs. Film de procès, Juré n°2 est également un excellent thriller dans lequel Nicholas Hoult incarne un Justin Kemp qui se décompose littéralement devant la caméra face aux enjeux terribles qui assaillent son personnage. Ancien alcoolique qui aux côtés d'Allison (Zoey Deutch) espère que sa grossesse arrivera à terme après qu'ils aient vécu un drame terrible (la perte de jumeaux). Clint Eastwood joue avec certains détails. Comme l'observation lors d'une fatidique nuit pluvieuse d'un fossé où une femme a été retrouvée morte le lendemain. Le réalisateur laissant planer le doute en filmant un trou sombre d'où aucun indice visuel ne s'échappe. Confirmant ce que pense le personnage central du récit : qu'il dû ce jour là renverser un cerf qui ensuite pris la fuite. Un moyen de se dédouaner et de passer à autre chose jusqu'au jour où tout lui est renvoyé en pleine figure. Clint Eastwood a l'intelligence de ne pas se laisser aller à des débordements et signe une œuvre trouble, sensible et parfois émotionnellement difficile à encaisser. Si la sobriété de sa mise en scène et la modération avec laquelle le compositeur Mark Mancina a écrit la bande musicale participent de cette déflagration qu'évoque une éventuelle erreur judiciaire, le film est surtout porté par d'excellents interprètes parmi lesquels l'on ajoutera J.K.Simmons, Chris Messina, Kiefer Sutherland et celles et ceux qui incarnent autour de Nicholas Hoult les autres jurés. Leslie Bibb, Adrienne C. Moore, Cedric Yarbrough et les autres...

 

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