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dimanche 17 novembre 2024

Alps de Yórgos Lánthimos (2011) - ★★★★★★☆☆☆☆

 


 

Cinéaste grec originaire d'Athènes, Yórgos Lánthimos est une énigme du septième art. Comme peut l'être David Lynch même si l'œuvre du premier est davantage à rapprocher de celui des autrichiens Michael Haneke et Ulrich Seidl. Un cinéma froid, rigoriste, pas toujours plaisant à contempler comme en témoigne notamment son quatrième long-métrage intitulé Alps. Le film est un objet de curiosité tout en demeurant un curieux objet. Une petite subtilité qui en dit beaucoup sur le double sens que l'on peut faire prendre aux mots et qui définit, je trouve, relativement bien le contexte dans lequel le réalisateur et scénariste plonge le spectateur. Après s'être exporté à l'étranger pour y remporter deux prix au festival de Cannes en 2009 (pour Canine), les premiers d'une longue liste d'ailleurs, Yórgos Lánthimos persévère deux ans plus tard dans son approche ascétique du cinéma avec un long-métrage au titre tout d'abord énigmatique avant que nous soit révélée sa signification au court du récit. Seul élément ou presque à nous être directement transmis à travers la voix d'un ambulancier lancé dans un projet aussi fou qu'honorable. Fou de par son concept et honorable dans ce qu'il peut révéler d'humanisme. Le titre évoque ainsi l'une des plus célèbres chaînes de montagnes européennes traversant divers territoires mais dont l'auteur ne se soucie, semble-t-il, que de son versant suisse ! Le groupe formé autour de ''Mont Blanc'' semble être encore balbutiant. Aris Servetalis incarne ainsi un ''gourou'' beaucoup moins séduisant dans son apparat et dans son attitude qu'un Raël Ô combien charismatique. Maître-d’œuvre d'un projet apparemment farfelu et dont l'ambition est de gagner avant tout de l'oseille, il a sous ses ordres trois ''Adeptes''. Une infirmière (l'actrice Angelikí Papoúlia), un entraîneur (Johnny Vekris) et une gymnaste (Ariane Labed) dont les deux premiers sont respectivement identifiés sous les noms de ''Monte Rosa'', ''Matterhorn''. Mais alors, quel est donc ce projet très particulier pour lequel ils s'emploient tous à donner le meilleur d'eux-mêmes ?


Simple dans son évocation mais assez difficile à mettre en œuvre, ''Mont Blanc'' mais SURTOUT ses employés vont devoir donner de leur personne afin de convaincre, par exemple, un couple d'âge mûr dont la fille vient de perdre la vie à la suite d'un grave accident de voiture d'accepter de faire leur deuil en accueillant, toujours pour ce même exemple, ''Monte Rosa'' en lieu et place de leur chère disparue ! Pour être plus clair s'agissant du concept, chacun des membres du groupe va devoir se plier à une rigueur consistant à connaître la personne qui vient de mourir afin de se fondre littéralement dans sa peau et ainsi prendre sa place au sein de la famille endeuillée. Une manière de rendre le passage obligé du deuil moins douloureux. Là où tout se complique est dans le traitement que fait le réalisateur grec de son sujet. Rien de plus délicat que d'aborder la disparition d'un être cher. De ce point de vue là, Yórgos Lánthimos étant plutôt économe en matière d'effets, Alps peut être envisagé comme un film à l'idée quelque peu surréaliste tout en demeurant très respectueux de son matériaux de base. Ainsi, le réalisateur et son scénariste Efthýmis Filíppou effleurent la mort avec toute la délicatesse propre au sujet tout en oubliant malgré tout de nous donner les clés qui permettent la pleine compréhension de ce qui se déroule devant nos yeux. Et d'une certaine manière, on ne leur en voudra pas. Parce qu'à trop faire tourner le concept en boucle, Yórgos Lánthimos parvient à travers ce subterfuge alambiqué à retenir le spectateur dans cette quête qui consiste à absorber les événements, les remettre dans l'ordre, et ainsi comprendre enfin ce que signifie cette succession de séquences qui paraissent parfois désordonnées quand bien même elles furent planifiées de manière consciente et méticuleuse. Il n'empêche que sa froideur, son rythme et l'absence quasi systématique de caractérisation des protagoniste empêchent Alps de devenir l'objet de fascination incroyable qu'il aurait mérité d'être en d'autres temps et d'autres lieux s'il avait été traité de manière beaucoup plus linéaire et accessible. La mort a beau ne pas être un sujet a priori joyeux, la sécheresse de la mise en scène nous fout quand même un sacré coup au moral tandis que notre (im)patience est mise à rude épreuve chaque minutes que compte le récit (c'est à dire, plus de quatre-vingt dix!). Bref, les néophytes risquent de vivre une expérience assez délicates. Peut-être plus encore que les œuvres respectives des deux cinéastes autrichiens cités plus haut qui, à leur décharge, parviennent on ne sait comment à insuffler une véritable énergie et un sens peu commun du divertissement à un cinéma lui aussi généralement ascétique...

 

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