L'origine du monde,
premier long-métrage de l'acteur Laurent Lafitte en tant que
réalisateur, s'inspire autant à travers son développement de la
pièce éponyme de l'auteur dramatique français Sébastien Thiéry
qu'elle-même empreinte son titre à L'origine
du monde
du peintre français Gustave Courbet peinte en 1866. Cette toile sur
huile mondialement célèbre représentant un sexe de femme symbolise
en elle-même la recherche du héros incarné par Laurent Lafitte qui
dans la peau de Jean-Louis Bordier tente de résoudre un épineux
problème : en effet, son vieux pote vétérinaire Michel
Verdoux (excellent Vincent Macaigne) découvre en l’auscultant que
le cœur de son ami ne bat plus. Faut-il y voir une allégorie sur
l'absence d'émotions, de sentiments, d'amour ou plus simplement une
fantaisie qui ne recherche rien d'autre que rires et esclaffement du
public ? Difficile de répondre à cette question lorsque un
traitement ordonné par la coach
de son épouse Valérie (formidable Karin Viard) pousse le ''héros''
à se surpasser et ainsi atteindre un but en passant par un exercice
absolument inabordable : celui de prendre en photo la ''chatte''
de sa mère (c'est pas moi qui l'exprime ainsi, c'est Laurent
Lafitte/ Jean-Louis lui-même), la dite origine du monde afin que
Margaux, la coach en question savoureusement interprétée par
l'actrice Nicole Garcia puisse l'étudier et ainsi comprendre
pourquoi le cœur de Jean-Louis ne bat plus et par conséquent
résoudre le problème avant les trois jours prochains, date
fatidique après laquelle il risque de mourir...
Sur
un ton pas toujours aussi absurde qu'il n'y paraît, et même à
travers l'emploi de séquences brumeuses absolument magnifiques (une
seule suffisait, alors pour l'avoir répétée?), L'origine
du monde
ose franchir quelques strates hors de portée de la bienséance en
mettant à nu ces trois comparses que sont Laurent Lafitte, Karin
Viard et Vincent Macaigne. Un trio complété par Nicole Garcia,
donc, mais peut-être plus encore par l'actrice Hélène Vincent à
laquelle le réalisateur offre l'opportunité de sortir enfin de
cette référence systématique, aussi solide et contraignante qu'une
camisole de force, que fut le rôle de Marielle Le Quesnoy qu'elle
interpréta dans le classique d'Etienne Chatiliez, La
vie est un long fleuve tranquille.
Trente-quatre ans plus tard, grâce à Laurent Lafitte et au soin
qu'il a pris non seulement de prendre en considération la
caractérisation de ses rares mais précieux interprètes et
notamment Hélène Vincent, on se souviendra peut-être désormais
tout d'abord de cette dernière pour le rôle de Brigitte Bordier
qu'elle aura interprété en 2021. Chose assez rare dans le paysage
comique français, et même quasiment unique, chaque personnage
bénéficie d'une écriture et d'une direction d'acteur absolument
remarquable. C'est bien simple : en étudiant chaque interprète,
son temps de présence ou sa façon d'aborder son personnage, il est
difficile de dire parmi Laurent Lafitte, Karin Viard, Vincent
Macaigne, Nicole Garcia ou l'épatante Hélène Vincent, lequel ou
laquelle est au dessus du lot. À armes égales, les uns et les
autres se battent en duel pour nous offrir des répliques plus
savoureuses les unes que les autres...
Pourtant,
L'origine du monde,
à moyen ou à long mais certainement pas à court terme, fait
l'étrange effet d'un œuf à la coque que l'on vient de consommer
avec délectation. Qu'en reste-t-il ? Une coquille toute vide.
Non pas que le long-métrage fasse tout à fait cet effet mais en
dehors de l'interprétation, de certaines situations fort cocasses et
de dialogues souvent cuisinés aux petits oignons, sachons
reconnaître que le scénario est des plus léger. Mais alors, rien
de vraiment grave. Vincent Macaigne en véto en peu neuneu (voire
ringard. Non mais t'as vu ses chemises à carreau d'un autre
monde?) mais profondément attachant, Nicole Garcia sur un mode de
pensée très en vogue nous offre parmi les séquences les plus
drôles et Hélène Vincent en octogénaire harcelée par son fils,
sa belle-fille (avec laquelle elle entretient tout sauf des rapports
amicaux) et leur ami Michel trouve le ton juste. Une vieille mémé
ultra classique... mais un peu trash sur les bords (vous
comprendrez). À dire vrai, L'origine du monde,
c'est un peu l'univers d'Albert Dupontel auquel on aurait tenté de
mettre un filtre quelque peu défectueux. Se dégage du tout venant
sans saveurs de la comédie français un esprit libre, décomplexé,
mais qui aurait pu pousser le concept encore plus loin, jusqu'à même
s'attarder sur certains points qui ne sont évoqués que très
succinctement. Une comédie qui en tout cas mérite que l'on se
déplace dans les salles obscures...
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