Les
super-héros/super-vilains existent-ils, veulent-ils être reconnus
et plus encore, le méritent-ils ? Quel apport peuvent-il avoir
sur notre société ? Incassable,
Split
et Glass
forment un ensemble, un tout, mais cet état des choses est-il
immuable ? Glass
est peut-être le volet de trop. Celui d'une trilogie qui aurait dû
se contenter de n'être qu'un diptyque. Une œuvre qui impose la même
posture que Split
tout en cherchant à l'améliorer. Rendre le spectacle plus exaltant
encore, quitte à démultiplier ad nauseam un même concept. Là où
James McAvoy/Kevin Wendell Crumb et ses multiples personnalités
étaient parvenus à nous surprendre, nous séduire et nous
terrifier, la grandiloquence avec laquelle évolue désormais le
personnage en font une caricature qui peine trois ans plus tard à
faire sursauter dans son fauteuil un spectateur déjà sevré à ce
type d'exercice. Attristé par certaines critiques assassines, M.
Night Shyamalan s'est-il remis en question ? La bande-annonce de
son prochain long-métrage Old
à sortir en juillet sur les écrans de cinéma semble aller dans ce
sens. Mais avant cela, Glass
n'est qu'une coquille scénaristiquement vide qui se complaît dans
des affrontements vains et faussement sophistiqués. Le film dure
plus de deux heures. Et durant plus d'une heure trente, le
réalisateur américain d'origine indienne balade sa caméra entre
les murs d'un institut psychiatrique et ses environs. Tout ça pour
quelle raison ? Faire des lieux une arène certes parfois très
belle à regarder (la pièce rose où la pourtant très talentueuse
Sarah Paulson/le docteur Ellie Staple peine à vouloir élever le
débat avec autant de profondeur que Louise Fletcher/l'infirmière en
chef Mildred Ratched du formidable Vol au dessus
d'un nid de coucou de
Miloš Forman) mais dont l'intérêt s'éteint dès lors que l'on a
intégré le principe.
Cela
peut paraître anodin, mais la seule différence d'intensité entre
le personnage du docteur Ellie Staple et celui du docteur Karen
Fletcher (un hommage au long-métrage de 1975 et à sa formidable
interprète?) qu'interprétait avec force et conviction l'actrice
Betty Buckley dans Split suffit
à démontrer les carences de Glass
en matière d'écriture et de dialogues. M. Night
Shyamalan semble à ce point se reposer sur ses lauriers que Glass
peut dès lors s'envisager comme ces œuvres qui par leur
incompétence à s'aligner sur le meilleur du cinéaste, le
contraignent par la suite à mûrir son œuvre à venir. Glass
marque alors un cycle. Le début et espérons-le, la fin très rapide
d'un second dont la nocivité ne peut finalement lui être que
bénéfique. Une étape sans doute essentielle pour M. Night
Shyamalan mais qui n'épargnera malheureusement pas celles et ceux
qui rêvaient d'un épilogue à la hauteur des deux premiers volets.
Le film est d'autant plus rageant que l'on fantasmait la réunion de
James McAvoy, de Bruce Willis et de Samuel L. Jackson. Glass
souffre d'une écriture trop simpliste. Tellement que l'on en arrive
même à se demander si quelque chose ne nous a pas échappé. Si
cette simplicité qu'on lui reproche ne cacherait pas une complexité
qui nous dépasse. Mais non : une, deux, trois ou quatre visions
offriront le même résultat. À vrai dire, tel un virus, il faudrait
sans doute isoler Glass
de ses aînés. Refuser de s'offrir une soirée ''M. Night
Shyamalan'' durant laquelle seraient projetés à la file les trois
volets de la saga. Car dès lors, la déperdition en terme de qualité
s'en trouverait par trop importante.
Pour
en extraire même un infinitésimal intérêt, mieux vaut-il sans
doute écarter Incassable
et Split,
ou mieux les oublier pour pouvoir un tant soit peu profiter du
spectacle de Glass comme
d'un matériau original dans son concept et dans son élaboration.
Mais là encore, faut-il que M. Night Shyamalan ait une histoire à
nous raconter. Autre exemple significatif de ''fuite d'inspiration''
qui englue littéralement le récit : ces twists qui
habituellement sont la marque de fabrique du réalisateur et qui ici,
après cent minutes d'une œuvre poussive, prennent la forme d'un
cheveu tombant négligemment dans la soupe. Le genre de twist que
l'on aurait attendu de la part d'un débutant mais certainement pas
d'un homme comme M. Night Shyamalan ! Une demi-heure ou presque,
c'est ce qu'il reste à ce moment très précis de Glass
dont les quatre-cinquième viennent de s'écouler, confirmant notre
lassitude et au moins une certitude : Glass
est trop long d'une heure... au moins ! Bonne interprétation
générale malgré la redondance de certains rôles et de leur
attitude respective (James McAvoy/Kevin Wendell Crumb, fameux mais
tournant en boucle), mise en scène classieuse, expérience trop
longue sur la durée et semée d’embûches consécutives à un
scénario besogneux, décors de Chris Trujillo voguant entre sinistre
et style ''déco arty rose bonbon'', et pour la seconde fois, le
compositeur américain West Dylan Thordson aux commandes de la
partition et qui nous resserre à peu de chose près la même chose
que pour Split.
Efficace mais parfois superflu. En bref, Glass
est une déception...
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