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dimanche 23 mai 2021

Šílení de Jan Švankmajer (2005) - ★★★★★★★☆☆☆

 


 

De l'aveu même du réalisateur tchèque Jan Švankmajer, Šílení est un film d'horreur. Mais la conception du genre pour ce cinéaste surtout connu pour ses films d'animation surréalistes dont les origines remontent au milieu des années soixante n'est sans doute pas la même que la notre. Bien que dans ce cinquième long-métrage réalisé en cette année 2005 (et ce quarante ans après les débuts de sa carrière jusque là constituée d'un nombre important de courts-métrages), l'aspect horrifique n'y est semble-t-il pas vraiment commun au genre qui nous préoccupe habituellement, Jan Švankmajer, s'inspire cependant effectivement de divers ouvrages dont au moins deux appartenant à l’œuvre du romancier américain Edgar Allan Poe. Le plus significatif d'entre eux demeurant sans doute The System of Doctor Tarr and Professor Fether. Dans le cas de Šílení comme dans celui de cette nouvelle d'une cinquantaine de pages, il y est question de folie mais également d'absurde. Cette seconde matière dont le réalisateur tchèque nourri son œuvre depuis ses débuts. D'ailleurs, Jan Švankmajer a beau avoir passé la vitesse supérieure depuis maintenant un certain nombre d'années en mélangeant ses collages et ses animations à des prises de vue réelles, ces dernières n'interdisent fort heureusement toujours pas la présence de séquences typiques de ce réalisateur décidément hors du commun...


Dès l'entame, Jan Švankmajer nous prévient : convoquant également les écrits de Donatien Alphonse François de Sade plus connu sous le nom du Marquis de Sade, il indique qu'il existe deux manières de gérer un institut psychiatrique. L'une en laissant une liberté absolue et l'autre étant plus conservatrice. Mais avec tout l'humour et le cynisme qui le caractérise mais aussi très sûrement, une certaine rancœur, Jan Švankmajer évoque une troisième option qui consiste à faire du monde dans lequel nous vivons, un asile. Ce qui effectivement n'est pas faux et s'avère même plus vrai que cela ne l'était il y a encore seize ans en arrière, lorsque fut réalisé Šílení en 2005. Si plus que jamais le monde perd la tête, celle de Jan Švankmajer repose pourtant bien sur ses épaules. La patte graphique de ce cinquième long-métrage renvoie au cinéma de l'un des plus grands cinéastes allemands de notre époque. Un certain Werner Herzog dont les Herz aus Glas (1976) et Nosferatu, Phantom der Nacht (1979) semblent parfois planer au dessus de Šílení. Certains personnages sous hypnoses du premier renvoient au héros du long-métrage tchèque quand beaucoup de décors du second semblent avoir simplement servi au film de Jan Švankmajer. Ce soucis du détail qui fait également tout l'intérêt de l’œuvre du réalisateur qui met encore une fois (on se rappelle notamment certains visuels proprement incroyables de Lekce Faust, son second long-métrage réalisé en 1994) tout son talent au service de son art et convoque des décors souvent stupéfiants...


De Sade, Jan Švankmajer retient la légende qui entoure son goût de la subversion, la sexualité et le libertinage prenant ici une forme savoureusement blasphématoire. Dominé non pas par le ''héros'' incarné par Pavel Liska mais par Jan Triska, acteur tchèque, mais surtout une gueule à faire pâlir les grenouilles de bénitier (il sera amusant de noter qu'il ne se contenta pas uniquement de tourner dans son pays puisqu'on le verra plus tard et notamment chez Warren Beatty (Reds, en 1981), Sam Peckinpah (Osterman week-end, en 1983) ou Peter Hyams (2010 : L'Année du premier contact, en 1984). Sa présence nimbe l’œuvre d'une ambiance trouble. Un rire et un regard qui en disent long sur la perversité de son personnage, lequel figure justement le célèbre Marquis de Sade. Quant au voyage auquel nous propose d'assister Jan Švankmajer, il n'est pas de tout repos. De la demeure ''carpathienne'' où auront lieu une inhumation et une renaissance très clairement inspirées de certaines pratiques égyptiennes jusqu'à un asile dirigé par des fous dont le directeur et les employés furent enfermés dans les sous-sols après avoir été enduis de goudron et recouverts de plumes (!!!), Il y a, avec Šílení, de quoi perdre parfois son latin mais d'apprécier en revanche la langue tchèque lors de longs monologues particulièrement inspirés et proférés par ce substitut du Marquis de Sade. Le film compte un nombre important de séquences animées lors d'une grande majorité desquelles, Jan Švankmajer met en scène des pièces de boucherie. Si le sens de certaines séquences parait immédiatement évident (les marteaux broyant les os se référant au corps redevenant poussière après la mort), d'autre conservent en revanche tout leur mystère. Une œuvre totalement folle qui prend le risque de faire vaciller la santé mentale de ses spectateurs. Étonnant !

 

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