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samedi 22 mai 2021

Bliss de Joe Begos (2019) - ★★★★★★★☆☆☆

 


 

Le réalisateur américain Joe Begos semble avoir une drôle de conception du bonheur, traduction de Bliss, son-avant dernier long-métrage. Une mise en abîme de la pratique de l'art et de la consommation de drogues à haute dose. Un gouffre... un précipice dans lequel se jette corps et âme une jeune artiste-peintre prête à sacrifier jusqu'à sa propre existence pour parvenir à donner vie à sa dernière création. Jusqu’au-boutiste dans la forme et dans le fond, Bliss symbolise la recherche du plaisir, l'art créatif, sous couvert d'une descente aux enfers liée à la consommation d'une drogue qui rendre très rapidement dépendante Dezzy qu'interprète Dora Madison. Totalement habitée, l'actrice se met à nu au sens propre comme au figuré. À poil ou en petite tenue, elle pataugera durant une grande partie des quatre-vingt minutes que dure le long-métrage, dans le sang, la tripaille, la gerbe et le stupre. Si le commun des mortels ne verra peut-être dans cette œuvre qu'une surenchère dans le gore sous couvert de décrire la lente agonie d'une jeune artiste en mal d'inspiration victime des effets secondaire d'une drogue surpuissante, le spectateur habitué de ce genre de productions sera immédiatement saisi par les nombreuses références qu'évoque tout ou partie du film...


Des plus lointains souvenirs cinématographiques vers lesquels Bliss tend à emprunter certaines idées, on pourrait presque évoquer Color Me Blood Red de Herschell Gordon Lewis et son artiste utilisant le sang de ses victimes pour peindre ses toiles. Un peu plus tard, le peintre de Driller Killer d'Abel Ferrara qui en incapacité de produire une œuvre digne de ce nom et rendu fou par les répétitions incessantes d'un groupe de rock dans le même immeuble que le sien décide la nuit de dessouder des quidams à l'aide d'une perceuse. Mais s'il demeure une évidence, c'est le rapport qu'entretient Bliss avec l'univers si particulier de Gaspar Noé. Il y a en effet dans le long-métrage de Joe Begos, autant de Enter the Void, de Irreversible que de Climax. Même mise en scène vertigineuse, qui donne le tourni, sous couvert de teintes ''pop'' se dégradant au fil du récit pour ne plus devenir que rouge carmin. Si dans un premier temps Bliss se comporte comme un drame, il bifurque cependant très rapidement vers l'horreur pur avec son thème sur la drogue, de sa consommation et de ses conséquences sur l'organisme et surtout sur l'état psychique de son héroïne. De ce point de vue, Bliss nous en met plein les mirettes. La photographie de Mike Testin est absolument démente, tout comme la direction artistique de Mike Lemek... Sans temps morts, Joe Begos ne nous laisse qu'une poignée de minutes de liberté avant de nous enfoncer la tête dans des chiottes crasseuses, cuvette tachée de sang expectoré par l'héroïne, nous donnant une définition bien précise des effets secondaires en mode ''bad trip''. L'héroïne s'en trouve alors désorientée, prise d'hallucinations et victime de paranoïa.


Des phénomènes réellement observables chez certains consommateurs de drogues dures mais qui dans le cas présent prennent l'allure d'une pub virulente anti-drogues tant Joe Begos pousse le message à son paroxysme. Dora Madison est tellement habitée qu'il lui arrive même parfois d'en faire un peu trop, surtout lorsqu'elle dirige subitement la tête vers la caméra, ses cheveux collés par l'hémoglobine parvenant péniblement à s'envoler façon publicité pour les shampooing L'Oréal Professionnel. Le travail de mise en scène et de découpage est absolument remarquable. Joe Begos n'a absolument pas ménagé ses efforts. Qu'il s'agisse des mouvements de caméras, du montage, des éclairages, mais également de la bande-son ultra immersive à base de metal, de punk et de cold-wave, Bliss et son héroïne nous hurlent et nous crachent littéralement au visage. Déjà d'un nihilisme absolu, le film prend ensuite un virage qui cependant pourra déconcerter. Du (sur)réalisme de la première heure, ceux qui connaissent bien Abel Ferrara y dénicheront une autre référence du cinéaste américain underground. En effet, dans sa dernière phase, Bliss oblique vers une thématique chère à Kathleen Conklin, l'étudiante en philosophie du formidable The Addiction. Mais ce qui transparaissait comme une seconde peau indissociable du thème principal chez Abel Ferrara ferait presque figure de changement de ton chez Joe Begos qui en bouleversant l'unicité de son scénario semble involontairement plonger son film dans la parodie. Mais sorti de ce détail presque insignifiant au regard de l'incroyable mise en scène, de l'interprétation et du visuel, Bliss est une expérience aussi immersive qu'inconfortable. Culte!

 

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