Puisque cela n'a pas
l'air d'avoir sauté à l'esprit de beaucoup de monde (pour ne pas
dire personne), Flugparken
ressemble étrangement à The Machinist
de Brad Anderson. Et même si contrairement à Christian Bale le
suédois Sverrir Gudnason n'a pas ressenti le besoin de perdre
vingt-huit kilos pour incarner le personnage de Kristian Keskitalo à
l'écran et que les deux récits n'entretiennent aucun rapport, il y
a dans l’œuvre du réalisateur Jens Östberg, son premier
long-métrage, quelque chose de similaire dans son approche lente et
anxiogène. Un choix qui se répercute également sur le plan visuel.
Car dans l'un comme dans l'autre, toute une partie de la palette de
couleurs semble avoir été mise de côté pour donner à l'ensemble
son côté austère. Ne manque plus qu'à Flugparken,
son étrange personnage secondaire et sa voiture flambant d'un rouge
carmin. Le récit de Flugparken situe
donc son action dans une petite ville de Suède où Kristian et Alex
ont l'habitude de se retrouver après le travail. Un soir, après
avoir bu plus que de raison, Kristian propose de laisser sa voiture
et de prendre le volant de celle d'Alex (l'acteur Leonard Terfelt)
qui, ivre, est incapable de conduire. Une fois qu'il a déposé son
ami, Kristian emprunte le vélo de Diane, la compagne d'Alex, afin de
retourner chez lui. Dès le lendemain, ce dernier est porté disparu.
Sa femme ainsi que le père du jeune homme sont inquiets mais n'ont
pas encore averti les autorités. Pas plus que Kristian dont la santé
mentale semble pourtant vaciller peu à peu...
La
ressemblance entre le long-métrage de Brad Anderson et celui du
suédois ne semble pas devoir se contenter de leur simple climat
respectif et de l'état de délabrement psychique de leur
protagoniste. Sverrir Gudnason et Christian Bale entretiennent une
certaine ressemblance physique. Et même si la performance du second
et à mille lieues de celle du premier, Sverrir Gudnason n'en est pas
pour autant moins convainquant. Sur un rythme digne du plus
léthargique des épisodes de la série allemande Derrick,
Jens Östberg tente d'instaurer un climat de suspicion. Et d'une
certaine manière il y parvient. Il y a d'abord le personnage de
Kristian et son attitude plus qu’ambiguë. Un peu à la manière du
boucher de Seul contre tous
de Gaspar Noé. Sa hargne et sa haine renfrognées qui ici, prennent
une allure sans doute moins nihiliste que dans ce qu'apportaient de
''front-nationalistes'' les images du français et le monologue
intérieur de son acteur Philippe Nahon. Sverrir Gudnason compose
quant à lui un personnage relativement pleutre qui tente de
combattre sa lâcheté par des moyens relativement puérils (là où
discuter ne sert à rien). Il est l'antithèse du tout aussi ressent
Hutch Mansell de l'excellent long-métrage de Ilya Naishuller,
Nobody.
Quand l'un semble insensible aux coups de couteaux, de
poings et aux balles au point d'en faire un anti-héros immortel,
l'autre se révèle d'une fragilité physique au moins aussi
conséquente que la faiblesse de son psychisme...
Mais le thriller et
l'action ayant laissé la place au drame, nous sommes ici face à une
histoire dont le rythme est un degré en deçà de ce que l'on
pouvait espérer. Et ce, malgré un scénario (dont l'auteur est le
réalisateur lui-même) qui confond deux sujets qui n'ont apparemment
aucun rapport. Et s'y mêle, pourquoi pas, une autre sous-intrigue
faisant référence au comportement du coucou, cet oiseau qui a pour
habitude de parasiter le nid d'autres espèces que la sienne.
Flugparken ne
renie pas ses origines : ambiance pesante, voire froide et
dénuée de tout humour, typique d'un certain cinéma scandinave.
Couleurs froides elles aussi, dues à l'intéressante photographie de
Måns Månsson. Quant au dénouement, si Jens Östberg éparpille ça
et là quelques détails qui laissent présager de la conclusion,
tout ne sera pas forcément mis en lumière durant les premières
dizaines de minutes par les spectateurs rompus à ce genre
d'exercice. Au final, Flugparken ne
brille pas vraiment et son intérêt s'avère aussi morne que le
contexte dans lequel évolue son principal personnage. Sympathique
mais pas inoubliable...
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