Soyons honnêtes, avec ce
premier long-métrage, la réalisatrice russe Olga Gorodetskaya ne
risque pas de remporter le titre de ''Tarkovski de l'épouvante et
de l'horreur''. Il s'agit moins
là de la remarque d'un misogyne que d'une évidence... et pourtant,
même si Tvar
(qui en langue russe signifie créature) ne révolutionne pas un
genre qui chez les despotiques américains encombre le cinéma
fantastique, il ne mérite sans doute pas tout à fait les notes ou
les remarques désastreuses que lui concèdent beaucoup de ceux qui
l'ont vu depuis son passage au Brussels International Fantastic Film
Festival (ou BIFFF pour les intimes). Non, car si Tvar
n'est pas remarquablement original (une sentence que vient appuyer le
pauvre titre international Evil Boy)
dans le fond, c'est dans sa forme qu'il faudra chercher cette petite
spécificité qui le démarquera quelque peu de ses concurrents. Il y
a déjà le lieu où se situe l'intrigue. Exit les États-Unis,
bonjour la Russie. Mais là, la chose demeure encore anecdotique car
à part quelques éléments de décors, peut-t-on encore y voir
suffisamment d'exotisme pour adouber l’œuvre d'Olga Gorodetskaya ?
Non, pas pour le moment. Ensuite, il y a la langue. Ce qui déjà est
un curseur beaucoup plus précis du climat qui va y régner même si
l'Union Soviétique fait partie du passé.... n'est-ce pas ?
Principalement
interprété par Elena Lyadova et Vladimir Vdovichenkov dans les
rôles respectifs de Polina et Igor Belova, Tvar
mêle avec une certaine habileté, drame, fantastique et épouvante.
Du moins, le première est une certitude. Le second est lui, déjà
plus évasif. Ambigu dirons-nous. Quant à la troisième, erf, j'ai
eu beau chercher et MÊME courageusement me farcir deux projections
du long-métrage coup sur coup, j'en suis encore à me demander si le
caractère angoissant ne s'est pas fait la malle au premier ''tour de
manivelle'' ! Polina et Igor viennent de vivre un drame terrible
avec la perte de leur seul enfant. Un fils. Qu'à cela ne tienne
puisqu'alors qu'ils n'ont pas pris le temps de s'en remettre ou du
moins de laisser quelques semaines, mois ou années passer, ils vont
adopter de façon pas tout à fait légale un gamin qui va très vite
se révéler étrange. Sorte de maniaco-dépressif (ou bipolaire pour
les frileux) dont les crises sont suffisamment puissantes pour que le
premier reflex des parents soit d'aller illico le renvoyer dans ses
pénates. Mais Polina et Igor étant des parents très courageux, ou
terriblement inconscients, ceux-ci vont faire l'effort de supporter
l'attitude vraiment dérangeante du gamin. Soyez heureux que votre
enfant vous réveille la nuit parce qu'il se fait les dents ou parce
qu'il vient de faire un très mauvais rêve car celui de Tvar
possède tous les symptômes qui mériteraient de l'envoyer consulter
non pas un psychiatre mais carrément le père Lankester Merrin du
chef-d’œuvre de William Friedkin, L'exorciste.
Mais stoppons là la comparaison puisque à aucun moment le film
d'Olga Gorodetskaya ne parvient à effleurer le génie de
l'américain...
Et
pourtant, si l'on regarde bien, le film possède quelques petites
qualités qui, bien évidemment, laisseront totalement indifférents
ceux qui s'attendraient à une boucherie ultra gore ou des myriades
d'effets-spéciaux numériques. Ici, pas une goutte de sang, à part
une giclée consécutive à un acte de violence filmé hors-champ. On
s'amusera (ou pas), des conséquences de l'acte, d'ailleurs. Ouais,
parce que c'est cool : en Russie, ton gamin peut en massacrer un
autre et rentrer tranquillement chez lui sans qu'il ne soit
inquiété ! Faute de sursauter au moindre petit jump
scare, lesquels
se comptant pourtant par dizaines, les cinéphiles de bon goût et de
peintures s’émerveilleront devant quelques tableaux vivants
véritablement esthétiques. De bien belles images fort
malheureusement assez rares. Ce qui ne l'est pas, en revanche demeure
dans l'absence systématique de sentiment d'effroi. À aucun moment
l'on ne ressent de danger pour ce couple pourtant plutôt bien
interprété. Sans vouloir donner de leçon de cinéma, et surtout
sans en avoir la prétention, il me semble qu'en jouant sur
l’ambiguïté du gamin, et donc en ôtant certains artifices allant
dans le sens de l'entité diabolique, le film aurait sans doute gagné
en épaisseur et donc, en intérêt. En laissant planer le doute sur
ce personnage que l'on n'aimerait très honnêtement pas avoir entre
les pattes, Tvar aurait
permis au spectateur de douter jusqu'à la conclusion plutôt que
d'en faire rapidement une représentation du Mal. Si le long-métrage
d'Olga Gorodetskaya n'est pas catastrophique en soit, il souffre de
plus d'une redondance dans les séquences qui finit de ruiner son
intérêt. Dommage...
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