Marre des blockbusters ?
Envie de se laver l'esprit et de se reposer la rétine ? Retour
en 2003, et même pourquoi, dans les années soixante-dix lors
desquelles se situe l'action de Torremolinos 73,
premier long-métrage du réalisateur, scénariste et producteur
espagnol Pablo Berger. Bienvenue dans ce pays merveilleux qu'est
l'Espagne, terreau fertile qui vit éclore nombre de génies du
septième art tel le Alex de la Iglesia de El día
de la bestia,
La comunidad
ou Crimen ferpecto.
Exemple parmi tant d'autres même si l’œuvre de ces deux-là n'ont
rien de tout à fait comparable. Ou bien le premier est-il en
comparaison le pourvoyeur d'un humour tout en retenue, moins
hystérique, mais sans doute pas moins passionnant et original. Comme
son titre l'indique, l'action de Torremolinos 73
se
situe dans la ville du même nom, sans doute en 1973 (année à
laquelle semble faire référence une séquence lors de laquelle le
héros du long-métrage est contraint de faire un prélèvement de
semence). C'est dans ce contexte, cette reconstitution des années
soixante-dix plutôt agréable à l’œil, qu'Alfredo Lopez et son
épouse Carmen se retrouvent plongés. Petit vendeur d'encyclopédies
à domicile, l'entreprise de son patron Don Carlos est en grande
difficulté. C'est alors que ce dernier invoque une échappatoire
des plus étonnante. Aux rares employés qui la composent, Don Carlos
leur propose de passer à la vitesse supérieure en abandonnant la
vente d'encyclopédies pour réaliser de petits films
''scientifiques'' en super 8 à l'adresse des pays scandinaves. Alors
que leur propriétaire les menace de les faire virer de leur logement
s'ils ne paient pas leurs trois mois de loyer de retard, Alfredo et
Carmen vont accepter de réaliser chez eux, ces petits films dont la
vocation sera d'exposer les mœurs sexuelles espagnoles...
Quelque
part, le long-métrage de Pablo Berger évoque On
aura tout vu
que réalisa Georges Lautner en 1976 avec ce photographe publicitaire
qu'incarnait Pierre Richard (époux, dans le film, de l'actrice
Miou-Miou) dont le rêve était de réaliser un long-métrage
sensible et touchant qui entre les mains du savoureux Jean-Pierre
Marielle allait se transformer en œuvre pornographique ! Un
film doux-amer en réalité, drôle et tendre à la fois, incarné
par un Javier Cámara au charisme aussi particulier que pu l'être
celui de Michel Blanc des Bronzés
ou de Viens chez moi, j'habite chez une copine.
À ses côtés, la délicieuse et touchante Candela Peña (notamment
découverte chez Pedro Almodovar avec Tout sur ma
mère)
dont le personnage de Carmen rêve d'avoir un enfant, ainsi que Juan
Diego dans le rôle de Don Carlos, un patron faussement aimable dont
les intentions ne sont pas si nobles qu'elles en ont l'air. Si
Torremolinos 73 semble
dérouler avec la plus grandes des tranquillité son récit, il
évoque cependant des thèmes très humains qui contrebalancent avec
ce sujet apparemment central que constitue la réalisation de petits
films érotiques. Car au delà du voyeurisme qui tendrait à faire de
Torremolinos 73 une
alternative récente aux comédies sexy des années soixante-dix
auxquelles même le cinéma français ne put échapper, le
long-métrage de Pablo Berger est d'abord l'histoire d'un couple et
de son amour réciproque. Ce qui en terme visuel se manifeste par une
œuvre plus cynique que véritablement amusante. Un chemin de croix
qui trouve sa consécration lors d'une séquence finale qui aurait pu
s'avérer insoutenable si la finesse de la mise en scène et du
scénario (signé lui aussi de Pablo Berger) n'étaient pas venus
s'interposer avec l'épouvantable et inextricable situation dans
laquelle se sont positionnés Carmen etAlfredo...
Il
y a dans Torremolinos 73
de ces répliques qui à elles seules valent le coup d’œil. Comme
lorsqu'Alfredo reproche à Carmen d'avoir passé du temps avec une
star du cinéma (Máximo Valverde, dans son propre rôle) lors d'une
soirée, que celle-ci lui rétorque ''Arrête,
Alfredo. Maximo est un gentleman''
avant que son époux ne lui assène un imparable ''Oui...
Et Dracula, un comte !''
On notera la présence à l'écran de l'acteur danois Mads Mikkelsen,
jeune étalon et acteur porno étonnamment sensible participant au
leurre que revêt le premier vrai film que doit tourner Alfredo à
partir de son propre scénario et que son patron est prêt à
financer. Surtout, parfois formidable d'audace est le récit de
Torremolinos 73,
lequel trouve une justification qui dans ses derniers retranchements
s'avère parfaitement indéboulonnable. Ou comment consolider le
couple Carmen/Alfredo en leur octroyant à chacun leur part de
rêve...
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