Tueuse en série, Nami
Matsushima, dite la femme scorpion ? Plutôt une femme traquée.
Par les autorités carcérale et policière et qui va très vite
constater que la liberté n'est qu'un concept relativement flou et
aléatoire. Troisième aventure pour Nami Matsushima après La
Femme scorpion et Elle s'appelait Scorpion,
c'est la dernière fois que le réalisateur japonais Shun’ya Itō
mettra son héroïne en scène. La fin de ce troisième volet indique
d'ailleurs très clairement la volonté du cinéaste de mettre un
terme aux aventures de son héroïne puisqu'il décide de la faire
disparaître à jamais. Mais comme il est coutume de le dire ou de le
penser dans nos contrées, il ne faut jamais dire jamais. Pour
preuve : la même année, soit en 1973, la relève sera
rapidement assurée par un autre réalisateur japonais du nom de
Yasuharu Hasebe qui réalisera donc les quatrièmes aventures de la
femme scorpion sous le titre Mélodie de la
rancune.
Mais d'ici là, que faut-il donc penser de cette Tanière
de la bête
qui clôt sur le court terme les aventures de cette ultime
incarnation féminine du charme japonais ? Tout d'abord, sachez
que Nami Matsushima est toujours interprétée par la sublime Meiko
Kaji. L'actrice reviendra d'ailleurs lors des quatrièmes aventures
de Sasori
(Scorpion) avant d'abandonner son tablier et de laisser à d'autres
l'occasion de prendre la relève dans ce rôle fétiche (en effet,
les actrices Yumi Takigawa et Yôko Natsuki incarneront
respectivement le personnage de Nami dans Shin
joshū sasori: 701-gō
en 1976 et dans Shin joshū sasori: Tokushubō X
l'année suivante, ces deux séquelles ayant été toutes deux mises
en scène par le réalisateur Yutaka Kohira)...
Maintenant
débarrassée de sa disgracieuse tenue de prisonnière, la beauté de
Meiko Kaji peut désormais éclater de mille feux. Ce qui ne lui
interdit toujours pas de lancer son fameux regard glacial
annonciateur de la mort prochaine de celui ou celle qui est visé. Si
visuellement Elle s'appelait Scorpion apportait
un supplément en matière de recherche esthétique, voire de délire
visuel, pour sa dernière aventure en compagnie de son héroïne,
Shun’ya Itō s'est quelque peu assagi. Ce qui n'empêche cependant
pas La tanière de la bête
de s'ouvrir sur une séquence étonnamment gore puisque Nami est
surprise par deux policiers dans une rame de métro. Elle égorge le
premier puis coupe le bras du second à hauteur du coude après qu'il
l'ait menottée afin de lui échapper. S'ensuit une séquence
relativement amusante si l'on pense au contexte dans lequel elle fut
tournée. En effet, prenant la fuite en ville, le bras de sa victime
toujours relié au sien, il n'est pas impossible de sourire devant la
réaction des passants qui ne semblent pas être au courant qu'un
tournage a lieu. Quelques ralentis permettent de constater que la
majeure partie d'entre eux réagissent de manière telle qu'il ne
demeure plus aucun doute sur la question. Le cahier des charges est
ici parfaitement rempli en ce qui concerne les habitudes de la série.
Nami est une fois de plus opposée à une gente masculine violente et
misogyne qui de surcroît, marchande les corps pour leur profit. Ce
que l'on appelle maquereau mais qui prend également le visage de
Katsu Samejima qu'interprète une Reisen Ri hantée et parfois
jouissivement hystérico-baroque !
Outre
les habitudes scénaristiques, Hirô Matsuda et Tooru Shinohara étant
désormais seuls maîtres aux commandes de l'écriture, le film
bénéficie du soin apporté à la majeure partie des séquences. Le
récit se déroule en outre majoritairement en extérieur ce qui
permet à Shun’ya Itō d'exploiter des environnements beaucoup
moins exigus. Du moins, dans une certaine mesure. Il filme ses
quartiers comme le repaire du Mal ou s'immisce le vice sous tous ses
aspects. Prostitution, proxénétisme, corruption, Shun’ya Itō y
va large lorsqu'il s'agit de mettre en scène des actes
répréhensibles par la loi ou la morale. Plutôt que les mots, le
réalisateur estime que la démonstration est bien plus efficace. Et
d'ailleurs, il a raison. Le seul exemple du viol à l'aide d'un club
de golf suffit pour confirmer l'efficacité du concept. Peu
d'érotisme, mais le sujet de l'inceste évoqué dans les rapports
entre Yuki Nakagawa (l'actrice Yayoi Watanabe) et son frère malade
mental (de quoi mêler en un, deux thèmes qui feront sûrement
grincer les dents de certains) mettra tout le monde d'accord. Mais
l’œuvre de Shun’ya Itō n'est pas qu'un étalage d'atrocités.
Ces dernières se partagent d'ailleurs la partie congrue du scénario.
Non, le réalisateur sait aussi faire preuve d'une grande poésie.
Même si les décors ne s'y prêtent pas toujours. Comment alors ne
pas évoquer cette incroyable séquence des égouts et des
allumettes... ? Sans doute moins visuellement bluffant que le
précédent volet, La tanière de la bête
n'en demeure pas moins une belle réussite qui ferait presque
regretter que Shun’ya Itō ait choisi de quitter l'aventure...
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