Alors qu'Outre Atlantique
le thriller américain a donné naissance à toute une série de
grands classiques la décennie précédente dont Le Silence des
Agneaux
de Jonathan Demme en 1991 et Seven
de David Fincher ont marqué les esprits, on ne peut pas dire qu'à
cette époque, en France nous ayons atteint les cimes du genre. Car
sans doute, depuis le chef-d’œuvre de Joël Santoni Mort
un Dimanche de Pluie
réalisé en 1986, pas ou en tout cas, très peu de réalisateurs
hexagonaux sont parvenus à redorer le blason de ce qui jusque là,
semblait être la propriété exclusive du marché américain. Du
moins jusqu'à ce qu'une immense vague sud coréenne ne vienne
changer la donne dans les années 2010. C'est sans doute avec
l'intention de contrecarrer la suprématie Outre Atlantique et une
certaine idée dans la tête que le réalisateur Mathieu Kassovitz se
lance en 1999 avec son quatrième long-métrage dans l'adaptation de
l'ambitieux roman de l'écrivain français Jean-Christophe Grangé
Les Rivières
Pourpres paru
aux éditions
Albin Michel
l'année précédente. Si le réalisateur adopte le patronyme du
commissaire Pierre Niémans et offre le rôle à Jean Reno, il change
cependant celui du lieutenant Karim Abdouf en le renommant Max
Kerkérian avant de confier ce personnage à l'acteur Vincent Cassel
qui pour la troisième fois interprète un rôle important dans la
filmographie de Mathieu Kassovitz après Métisse
en 1992 et La Haine
en 1995...
Jean
Reno et Vincent Cassel y incarnent deux flics complémentaires dans
leur approche des événements et dans leur attitude. Le premier est
une légende de la police française tandis que le second est un
petit flic de quartier. Les deux hommes ont cependant en commun de
prendre parfois quelques libertés avec le règlement ce qui, dans
l'affaire qui va les réunir, ne pourra que les aider à mettre à
jour une affaire particulièrement ardue à résoudre. Pour son
quatrième long-métrage, Mathieu Kassovitz se penche donc sur le
récit d'une mort très étrange, la première d'une série, plaçant
au centre du récit la ville imaginaire de Guernon et notamment
l'université qui sert de décor et où sont formés de futurs
génies. C'est là que les deux flics font notamment la connaissance
de Fanny Ferreira, une adepte de l'escalade spécialiste des
avalanches.C'est l'actrice Nadia Farès qui interprète le rôle de
la jeune femme, en lieu et place du personnage de professeur de
géologie du roman. Si à l'époque de sa sortie,
Les Rivières Pourpres
demeure
une proposition relativement honnête de thriller français à la
sauce américaine, redécouvrir aujourd'hui le long-métrage de
Mathieu Kassovitz 21 ans après n'est peut-être pas l'idée la plus
judicieuse que pourrait avoir celui ou celle qui aimerait conserver
un souvenir ému de cette expérience qui lorgne du côté du
thriller américain à tendance poisseuse. Les autopsies font bien
entendu référence à celle à laquelle fut confrontée neuf ans en
arrière l'agent du FBI Clarice Starling dans le chef-d’œuvre de
Jonathan Demme et l'ambiance générale rappelle nombre de
longs-métrages du même type...
Si
le matériau de base a de quoi motiver une mise en scène concise, le
réalisateur se voit cependant contraint de tailler dans le lard afin
d'épurer certains passages du roman afin de ramener son œuvre à
une durée plus raisonnable. À une enquête qui se veut passionnante
malgré une mise en scène quelque peu précipitée mais que
contrecarre fort heureusement toute une série de plans magnifiés
par les mouvements de caméra, Mathieu Kassovitz impose des seconds
rôles inutiles qui viennent sans doute appuyer son goût de la
provoque. Une provocation dont fait les frais l'autorité policière
puisque les deux agents de police qui accompagnent au départ le
lieutenant Max Kerkérian ne sont rien moins que deux idiots à peine
capable d'aligner trois mots... Ça peut faire sourire... ou pas.
Mais d'une manière générale, cet événement anodin ne sert
absolument pas l'intrigue. Si l'ambition est bien présente sur le
papier, à l'écran, c'est la douche froide. Les
Rivières Pourpres a
beau avoir été notamment tourné en Haute-Savoie et en outre sur
les glaciers du Tour et d'Argentière, le film bénéficie de
splendides décors mais ne décolle jamais vraiment. Si le parallèle
entre les enquêtes menées par les deux flics qui ne se connaissent
pas encore est plutôt sympathique, dès lors que ces deux-là se
rejoignent, le film devient relativement plombant. Jean Reno et
Vincent Cassel ont beau faire le taf, on sort de l'expérience avec
la certitude que la réponse du thriller français à son homologue
américain n'était pas encore à l'ordre du jour. À noter qu'une
suite intitulée Les Rivières Pourpres 2 - Les
Anges de l'Apocalypse réalisée
quatre ans plus tard par Olivier Dahan a vu le jour sur les écrans
français...
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