Un masque à oxygène sur
le visage... Voilà comment l'on se débarrasse d'un problème
embarrassant : l'absence de l'actrice Geena Davis dont le rôle
de Veronica Quaife est cette fois-ci brièvement assuré par Saffron
Henderson. Et par brièvement, il faut comprendre qu'après seulement
deux minutes de film environ, l'amante de feu Seth Brandle
(interprété dans le chef-d’œuvre La Mouche de
David Cronenberg par le formidable Jeff Goldblum en 1986) meurt d'un
arrêt cardiaque alors qu'elle met au monde un fils. Le sien et celui
du scientifique qui créa le principe du télépode avant d'être la
victime d'une affreuse mutation génétique le condamnant à
lentement et douloureusement se transformer en mouche. L'intrigue de
La Mouche 2
se déroule donc quelques mois après la terrible conclusion du
premier film et ne met en scène qu'un seul personnage du brillant
long-métrage inspiré de La Mouche Noire
que réalisa à la fin des années cinquante le réalisateur Kurt
Neumann. Surpassant de loin l'original, David Cronenberg atteignait
des sommets de l'horreur tout en signant une œuvre profondément
émouvante. Un sommet dans sa carrière qui en connut beaucoup
d'autres au demeurant...
Prendre
la relève d'un tel film était d'ors et déjà risqué. Et même si
la suite avait dû être reconnue comme une honorable séquelle, oser
s'attaquer à un tel chef-d’œuvre fut un pari que peu de cinéastes
auraient osé prendre à l'époque. C'est peut-être d'ailleurs la
raison pour laquelle aucun d'eux n'eut le courage de s'attaquer à
cette suite dont le scénario à huit mains fut écrit par Mick
Garris, Jim Wheat, Ken Wheat et Frank Darabont d'après la nouvelle
La Mouche de
George Langelaan. En effet, Chris Wallas est à l'époque surtout
connu pour ses doigts de fée qui lui ont permis de notamment
travailler sur les effets-spéciaux de Piranha et
Gremlins
de Joe Dante en 1978 et 1984, de Enemy
de Wolfgang Petersen en 1985 et de... La Mouche
de David Cronenberg deux ans plus tard, justement. C'est donc à lui
qu'échoue la difficile et carrément illusoire mission de faire
parvenir jusqu'aux spectateurs, une séquelle digne de l'original.
Surtout que le réalisateur qui ne se refuse pas à participer à
l'élaboration des effets-spéciaux sur son premier long-métrage en
tant que réalisateur ne bénéficie pas du budget alloué au premier
film et qui à l'époque était estimé à quinze millions de
dollars. Une confortable somme sur laquelle Chris Wallas ne pourra
donc pas compter, ce qui se ressent malheureusement assez rapidement
lorsque l'on découvre La Mouche 2.
Une suite dans laquelle on retrouve l'acteur John Getz dans le rôle
du survivant Stathis Borans auquel Seth Brundle avait accordé un
triste sort et dont il a conservé de graves séquelles. Il sera
d'ailleurs le seul ''survivant''
du maigre casting de La Mouche...
Isolé
du pesant héritage que constitue le volet réalisé par David
Cronenberg, le long-métrage de Chris Wallas n'est pas un si mauvais
film. Honnête petite production horrifique de la fin des années
quatre-vingt, La Mouche 2
mérite d'être réévalué et d'être davantage apprécié pour ses
qualités qu'il ne le fut à l'époque de sa sortie. Si Chris Wallas
n'a pas le génie de David Cronenberg (d'ailleurs, quel autre
cinéaste aurait pu prétendre se hisser à sa hauteur?), si Eric
Stoltz n'a pas le charisme de Jeff Goldblum, si la relation
qu'entretiennent Martin Brundle et Beth Logan (l'actrice Daphne
Zuniga) n'a pas l'intensité de celles que vécurent Seth et Veronica
ou si la partition musicale de Christopher Young ne parvient jamais
vraiment à être aussi évocatrice que celle de Howard Shore, les
quelques longueurs de La Mouche 2
ne l'empêchent pas de proposer quelques séquences intéressantes
dans un univers pourtant, encore plus sinistre que l'étrange
habitation de Seth Brundle. Ici, un laboratoire dans lequel est
étudiée la progéniture de Veronica. Martin, un enfant qui grandit
anormalement vite et qui doté d'une intelligence lui permet par
exemple de prendre très rapidement le contrôle du réseau
informatique. Devenu adulte après seulement cinq ans d'existence,
Martin fait la connaissance de Beth avec laquelle il se lie
rapidement d'amitié. Surveillé depuis sa naissance par une batterie
de caméras, son ''père d'adoption'' Anton Bartok (l'acteur Lee
Richardson) lui offre un superbe appartement. Mais alors qu'il a
désormais tout pour être heureux, Martin va très rapidement
découvrir qu'il est le sujet de sombres recherches scientifiques...
S'il
n'est pas aussi émotionnellement fort que le chef-d’œuvre de
David Cronenberg, La Mouche 2
arrive parfois à faire ressentir ce même émoi que lorsque Seth
Brundle tentait de convaincre Veronica de l'aider à en finir avec
son existence. Dans le cas présent, c'est la combinaison entre la
musique de Christopher Young (preuve que sa partition est tout de
même capable de quelques rares sursauts de génie), un animal mutant
en animatroniques et la présence à l'écran d'Eric Stoltz qui
parvient à rendre la séquence du chien bouleversante. Côté
horreur, le film de Chris Wallas s'avère, à quelques occasions,
plutôt gratiné même si l'on est loin d'un Peter Jackson ''première
génération''. L'équipe chargée des effets-spéciaux de maquillage
constituée d'un nombre important d'artistes s'en est donné à cœur
joie : outre le chien mutant et un Martin/mouche bien différent
de l'horrible créature créée pour le premier volet, le spectateur
a notamment droit à quelques jets d'acide dont l'un a pour
conséquence la liquéfaction d'un visage dont le propriétaire
l'arrache avec pour effet de nous faire découvrir un crâne et une
mâchoire sanguinolents. Plus tard, c'est au tour d'un agent de
sécurité de mourir le visage écrasé par un monte-charge là
aussi, dans un très bel effet de type ''splatter''.
On l'aura compris, si La Mouche 2 n'a
pas l'envergure de son aîné, Chris Wallas s'en sort avec les
honneurs en signant une petite production horrifique au final plutôt
sympathique...
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