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dimanche 26 juillet 2020

A Snake of June de Shinya Tsukamoto (2002) - ★★★★★★★★★☆



Délicieusement morbide, formidablement beau, hommage stupéfiant à la femme, à l'amour. C'est peut-être ainsi que l'on pourrait décrire A Snake of June. Cet objet filmique non identifié. Cette décadence hyper-sexuée issue de l'imaginaire de Shinya Tsukamato, l'auteur du cultissime Tetsuo et de ses deux séquelles. D'ailleurs, dans cette nouvelle proposition où se mêlent voyeurisme, fascination pour le corps de la femme, maladie, exhibition et infidélité, la représentation du sexe masculin y est proche de la mutation organico-métallique dont était victime le héros du film cyberpunk réalisé par le japonais treize ans auparavant. Comme un ersatz... ou peut-être comme la seule expression qui puisse être faite d'un mécanisme mu par le seul instinct de procréation chez l'homme et servant d'arme dans le cas présent lors d'un duel entre individus de sexe masculin. Mais Shinya Tsukamoto ne faisant rien comme les autres, aucun des personnages qui évoluent dans A Snake of June ne cherche à corrompre la relation qu'il entretient avec l'autre. C'est sans doute ce qui fait l'originalité et la force de ce long-métrage qui n'excède pas les soixante-dix sept minutes et qui condense pourtant un flot de thématiques directement liées au couple. Passionnelle et parfois ingrate, l’œuvre du japonais explore divers sentiments pouvant aller de la fascination, jusqu'au rejet, en passant par l'excitation. Car tout aussi érotique soit-il A Snake of June, aborde la sexualité sous un angle peu commun qui pourra déranger les non-initiés...

La plastique superbe de l'actrice Asuka Kurosawa, ses gémissements et ses différentes postures ne justifiant pas à eux seuls la montée de sève et de température du spectateur, la forte teneur érotique qui se dégage de la plupart des séquences sert d'alibi et peut-être même dans certains cas, d'exutoire. Ou comment légitimer cet état de fièvre dans lequel nous plonge A Snake of June alors même qu'il aborde des sujets que l'on aurait plus souvent tendance à mettre sur le compte de la perversité. Dans un noir et blanc qui n'a rien de vraiment somptueux, la jeune Rinko Tatsumi est standardiste et répond aux âmes en peine au bord du suicide. C'est en sauvant la vie de l'une d'elle, un certain Iguchi qu'interprète lui-même Shinya Tsukamoto, que ce dernier décide à son tour de venir en aide à la jeune femme. Toute la subtilité du script provient du fait que le spectateur croit d'abord assister à un jeu dont le seul intérêt est de nourrir la perversité de l'interlocuteur de Rinko. Une impression cultivée lors d'une grande partie du long-métrage par une Asuka Kurosawa habitée par son personnage et par les instructions qu'elle reçoit par courrier et par téléphone de la part de Iguchi. D'où des séquences tantôt inconfortables, tantôt... ''appétissantes''...

Sous une pluie artificielle constante accentuant le propos du film, la caméra de Shinya Tsukamoto scrute le décor comme autant de représentations du sexe féminin. Comme cette ouverture parfaitement cylindrique dans le plafond de l'appartement de l'héroïne évoquant un vagin béant et dégoulinant d'eau de pluie. Face à cette iconisation du sexe de la femme, le japonais oppose une dramatisation des relations entre le mari et son épouse. Alors que Shigehiko (l'acteur Yuji Kohtari) occupe son temps libre à nettoyer de manière obsessionnelle l'émail et les inox de leur appartement, justifiant ainsi le peu de temps qu'il a à accorder à son épouse, Rinko se découvre des plaisirs solitaires à défaut d'en avoir avec son mari. C'est là qu'intervient alors le personnage de Iguchi perçu tout d'abord comme un voyeur pervers avant que ne nous soit révélée la cruelle vérité que je tairai donc ici pour ne rien dévoiler de crucial. D'une œuvre quelque peu bestiale, A Snake of June se transforme en un drame absolument bouleversant pour se terminer en une quête de rédemption. Le dixième long-métrage de Shinya Tsukamoto véhicule un message particulièrement fort, ponctué de visions sinon délirantes (on a vu bien plus singulier chez le japonais avant cela), du moins peu communes. Une manière toute particulière de rendre hommage à la femme et à son corps. Comme souvent chez le Japonais, on sort de la projection désorienté. Un signe qui ne trompe pas et qui place immédiatement A Snake of June au panthéon du cinéma expérimental asiatique. Un must... !

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