Kevin Smith, l'auteur de
Clerks, les Employés Modèles
en 1994, de Méprise Multiple
en
1997 ou de Tusk
en 2014 signait en 2011 son dixième long-métrage cinéma avec Red
State.
Une œuvre délirante s'éloignant pourtant des comédies qui
jalonnèrent jusque là sa carrière de cinéaste. Il y invoque les
sectes et le fanatisme religieux. Un mélange détonnant qui renvoie
directement aux sinistres mais néanmoins célèbres faits-divers que
furent le plus grand suicide collectif situé dans la communauté de
Jonestown en Guyane le 18 novembre 1978 et plus encore, le siège de
Waco entre le 28 février et le 19 avril 1993 où étaient retranchés
le gourou David Koresh et ses disciples. Des hommes charismatiques
convaincus par l'arrivée prochaine de l'Apocalypse et qui trouvent
dans cette fiction une itération ''célébrant'' la folie d'hommes
près à sacrifier des dizaines, voire des centaines de leurs
congénères au nom de Dieu...
Drôle
de film que Red State,
dont le propos délirant et la mise en scène parfois survoltée
l'empêche d'aborder son sujet sous un angle exclusivement
dramatique. On sentirait presque y poindre une certaine ironie
teintée d'un humour particulièrement acide. Un combat entre le Bien
et le Mal dont les contours s'avèrent si difficiles à cerner que
l'on ne sait plus vraiment quel bord soutenir. Ce gourou prophétisant
sur l'Apocalypse et réadaptant les textes de la Bible à sa sauce ?
Ses disciples aveuglés, près à se sacrifier au nom du Seigneur ?
Ces trois petits cons qui croient malin de faire un détour dans l'un
des coins perdus du Midwest, vivier des rednecks en salopettes, afin
de prendre leur pied à trois avec une MILF ? Ou bien ces flics
mal préparés à l'assaut qu'ils s'apprêtent à donner dans la
ferme de la secte ? Kevin Smith s'éclate, et nous avec. Le
réalisateur nous perd dans des considérations qu'il balaye avec une
affolante vigueur. Passant du rejet total pour cette bande de
dégénérés dont on se demande dans quelles mesures la plupart
d'entre eux ne seraient pas issus de multiples consanguinités à
l'horreur d'un acte sacrificiel exécuté sur l'autel de Dieu, Red
State ne
se contente pas d'évoquer la religion et ses répercussions sur une
Amérique malade et surarmée vivant à l'écart de toute
civilisation et de tout modèle social.
Non,
l’œuvre de Kevin Smith juge avec cynisme la réaction d'un
gouvernement américain près à sacrifier jusqu'aux plus jeunes de
ses ''enfants''. Cependant, plutôt que d'aller strictement dans le
sens du spectateur ou de l'idée qu'il perçoit du récit, le
réalisateur l'aborde en le faisant obliquer de manière inattendue
vers différents points de vue afin de ne jamais blaser son public.
Il devient alors parfois difficile de deviner quel tournant prendra
Red State lors
de la séquence suivante. Entre la comédie pour adolescent qui ouvre
les hostilités, le survival en milieu sectaire, le drame et même,
pourquoi pas, le fantastique, Kevin Smith multiplie les pirouettes en
se moquant de toute crédibilité dans le déroulement des événements
pour nous proposer un melting pot de sensations qui permettent
cependant au long-métrage de conserver une certaine cohérence. Si
tant est que l'on conçoive la possibilité que puissent surgir les
Trompettes signifiant l'arrivée imminente de l'Apocalypse. Si
Michael Parks campe un gourou totalement allumé, la présence de
John Goodman dans la peau de l'agent Joseph Keenan est
particulièrement appréciable. Au final, Red
State
traite son sujet de manière inattendue. Une œuvre
bi-tri-quadricéphale qui part dans toutes les directions et ne
ressemble à aucun autre film porté sur le sujet de l'embrigadement
sectaire. Pas un chef-d’œuvre mais un très bon divertissement...
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire