Depuis un certains
nombres d'années, beaucoup de cinéastes se sont penchés sur
l'avenir de notre humanité. Et le bilan est généralement des plus
sombres. Science-fiction post-apocalyptique, dystopies, survivalisme
en milieu hostile, retour à la sauvagerie et à la barbarie. L'homme
a de quoi se faire du soucis. Et pourtant, malgré les myriades de
longs-métrages plus ou moins réalistes, allant d'une humanité
décimée par des virus, des guerres ou des catastrophes naturelles,
en passant par diverses invasions extraterrestres et jusqu'au mythe
fantastique du mort sortant de sa tombe pour se nourrir de chair
fraîche, les scénaristes ont eu matière à imaginer des futurs
proches plus ou moins violents. En tout cas, souvent angoissants. Il
en est cependant qui préfèrent encore croire que l'Homme cherchera
à conserver son humanité même si autour de lui tout semble peu à
peu se déliter. Il fallait sans doute la sensibilité d'une femme
pour accoucher en 2015 de Into the Forest,
une œuvre ni vraiment post-apocalyptique, ni jamais tout à fait
dystopique. Tout juste dans laquelle les deux héroïnes s'avèrent
empruntes d'un besoin naturel de survivre dans un contexte volontiers
anxiogène. Vivant à l'écart de la ville, dans une maison isolée
en pleine forêt, Nell et Eva sont contraintes de se débrouiller
seules depuis que leur père est mort lors d'un accident survenu dans
la forêt alors qu'il coupait du bois à l'aide de sa tronçonneuse
(leur mère, elle, est déjà morte depuis un certain temps lorsque
l'intrigue débute).
Mais
également depuis qu'une étrange coupure d'électricité généralisée
est survenue dans le pays. Un événement qui aurait pu demeurer
anodin s'il n'avait pas eu tendance à perdurer dans le temps. Car
sans électricité, beaucoup de choses vont changer en ville. À
commencer par l'essence qui se fait de plus en plus rare, les rayons
des supermarchés qui se vident, mais aussi et surtout les
comportements qui changent. Si d'une manière générale Eva et sa
jeune sœur Nell n'ont pas trop de soucis à se faire de ce côté là
vu que pour arriver jusqu'à elles, il faut compter plusieurs jours
de marche, leur isolement est cependant générateur d'une angoisse
montante. Car le genre nous y a habitués : dans un monde où
tout part à la dérive, les mauvaises rencontres sont parfois
inévitables. Mais si les deux sœurs en feront les frais, le propos
de Into the Forest
ne tourne heureusement pas essentiellement autour du thème du retour
à la barbarie. Non, avec tout la sensibilité qui semble la
caractériser, la productrice, réalisatrice, scénariste et monteuse
canadienne Patricia Rozema choisit d'abord de porter un message
positif en offrant une part très importante du scénario à ses deux
jeunes interprètes...
Dans
les rôles respectifs de Nell et de sa sœur Eva, on retrouve les
actrices Ellen Page ainsi que Evan rachel Wood. Justes, touchantes,
admirablement mises en scène par la canadienne, elles ne peuvent
qu'emporter tous les suffrages tant elles ont réussis à s'emparer
de leur personnage. Si les moments de bonheur éphémères laissent
très rapidement la place à l'inquiétude, le spectateur accompagne
ces deux merveilleuses interprètes chaque fois que l'occasion lui
est offerte et les quelques antagonistes discrètement évoqués lors
de scènes parfois oppressantes (on pense notamment à la séquence
nocturne lors de laquelle les deux filles et leur père croisent des
types louches, ou plus tard, lorsqu'Eva est agressée par le vigile
du supermarché Stan, interprété par le toujours inquiétant
Michael Eklund (déjà bien flippant dans The
Divide
de Xavier Gens en 2011)) accentuent la pression qui opère sur les
épaules des deux sœurs contraintes de se débrouiller seules. Into
the Forest
est une œuvre surprenante et touchante à la fois. Difficile de ne
pas s'attacher à Eva et Nell. Proposé fut un temps sur la
plateforme de streaming Netflix,
le film est aussi l'occasion de véritablement faire connaissance
avec une cinéaste qui compte... Une œuvre à ne surtout pas
manquer, donc...
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