Trois ans après avoir
abordé la question juive à travers son identité, l'antisémitisme
et la paranoïa du personnage qu'il interpréta lui-même dans Ils
sont Partout,
l'acteur, scénariste et réalisateur Yvan Attal revient en 2019 avec
son dernier long-métrage Mon Chien Stupide.
Un titre qui sous son apparence de comédie légère se révèle
beaucoup plus profond qu'il n'en a l'air. Mais alors qu'Yvan Attal
adapte désormais le roman My
Dog Stupid
du romancier américain John Fante et non plus un scénario de son
cru, Mon Chien Stupide prend
des airs d'auto-psychanalyse. Le personnage principal incarné par
l'acteur-réalisateur se retrouvant face à une crise de la
cinquantaine, Yvan Attal y déploie toute une armada de principes
faisant de Henri Mohen, écrivain qui depuis plus de vingt ans n'a
rien écrit de bon, un individu accablé et contraint de mettre un
nom sur son mal-être. C'est alors qu'arrive dans sa vie un énorme
chien, sale, obsédé sexuel et pas très malin auquel Henri donne le
nom de Stupide. Alors que toute la famille (son épouse et trois de
leurs quatre enfants) n'en veulent pas chez eux, Henri choisit de le
garder auprès de lui. La présence de Stupide va être révélatrice
des dysfonctionnements qui régissent la famille Mohen dans laquelle
va bientôt donner un grand coup de balai Henri...
Comme
cela avait déjà pu être le cas avec Ils sont
Partout
qui oscillait entre le raté, le moyen et l'excellent, Mon
Chien Stupide
laisse tout d'abord une impression mitigée. Démarrant sous les
allures d'une comédie aussi balourde que le chien qui s'invite dans
la famille Mohen, le film d'Yvan Attal prend un virage à cent-quatre
vingt degré au moment même où ma compagne et moi allions peut-être
abandonné tout espoir envers une comédie française s'appauvrissant
d'année en année (la veille, nous avions été littéralement
anéantis par la médiocrité de l'infâme Les
Municipaux, Trop c'est Trop
des Chevaliers du Fiel). Pourtant, la dernière réalisation d'Yvan
Attal finit par prend une tournure tout à fait inattendue. Car si
Henri, son épouse Cécile (Charlotte Gainbourg) et leur quatre
enfants Pauline (Adèle Wismes), Gaspard Panayotis Pascot), Raphaël
(Ben Attal), et Noé (Pablo Venzal) ont dans un premier temps
beaucoup de mal à faire rire les spectateurs en dehors d'un couple
de femmes situé sur des longueurs d'ondes bien différentes des
nôtres, le charme va finalement peu à peu opérer dès lors que le
héros verra son entourage disparaître pour le laisser seul à la
maison. L'occasion pour lui d'une introspection. C'est lors de cette
étape fondamentale qui, on l'espère, lui permettra de se
reconstruire, que Mon Chien Stupide
prend tout son sens. De la comédie légère et pas vraiment amusante
que l'on redoutait d'ingurgiter jusqu'au générique de fin, l’œuvre
d'Yvan Attal se mue en une comédie tantôt acide, tantôt
douce-amer.
Sur
un scénario écrit à quatre mains par Yaël Langmann et Yvan Attal
lui-même, Mon Chien Stupide révèle
alors une puissance émotionnelle à laquelle nous n'étions sans
doute pas préparés. Un changement de ton en douceur qui culmine
durant la dernière partie révélant une très belle écriture. Si
les différents protagonistes échangent entre eux des dialogues
aussi savoureusement écrits qu'au résultat demeurant bizarrement
stériles durant la première demi-heure, ceux que le spectateur
gardera en mémoire sont ceux qu'il prononce en voix-off. Profonds,
touchants et sincères, c'est à travers eux que l'acteur-réalisateur
parvient à faire passer une émotion qui ne faiblit jamais. On ne
sourit plus (en dehors du couple cité plus haut qui décidément,
vit sur une autre planète ). Bien au contraire, on est ému, la
gorge serrée, l’œil qui brille, totalement embarqués,
chamboulés. On n'ose plus le moindre commentaire. Happés par les
mots et les maux d'un Yvan Attal en état de grâce et des seconds
rôles au diapason (excellent Éric Ruf dans le rôle du Professeur
Mazard). Yvan Attal sauve à travers Mon Chien
Stupide,
une comédie française en perdition, vérolée par d'innombrables
bouses. Une belle rencontre à faire en salle obscure. Ruez-vous au
cinéma...
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