Depuis la projection de
Unfriended de Levan Gabriadze et de Searching -
Portée disparue d'Aneesh Chaganty l'année
dernière, j'avoue que le monde d'Internet et ses dérives observées
à travers l'objectif de la caméra me passionne. À tel point que
j'ai cherché, souvent en vain, de retrouver ce même frisson, ce
même malaise devant un outil dont j'use personnellement au
quotidien. Alors, lorsque fut évoqué pour la première fois le
tout premier long-métrage du réalisateur américain Daniel Goldhaber,
Cam,
c'est avec une certaine excitation que j'ai patienté jusqu'à sa
diffusion sur la plate-forme Netflix
où le film à échoué sans passer par la case cinéma. Un mal pour
un bien si l'on accepte le principe qu'un film traitant d'Internet se
doit d'être découvert devant un écran d'ordinateur faisant à
l'occasion office de téléviseur.
Les
débuts sont difficiles et pas vraiment prometteurs. Le spectateur
entre dans l'intimité de la toute jeune Alice Ackerman qui travaille
comme Cam Girl
sur Internet sous le pseudonyme Lola_Lola. Si sa mère et son frère
ne sont pas encore au courant de ses activités, c'est parce que la jeune
femme attend d'atteindre une position qu'elle juge honorable dans le
classement des Cam
Girls
pour leur avouer qu'elle gagne sa vie en s'exhibant pour de généreux
donateurs qui la paient sous la forme de crypto monnaie (ici, des
tokens que certains lui versent parfois à hauteur de plusieurs
milliers). Contrainte de se livrer davantage que ses concurrentes,
c'est avec la complicité d'un internaute connu sous le pseudonyme
Tinker qu'elle organise un soir son faux suicide. Alice gagne pas mal
de places au classement grâce à ce malhonnête procédé, les
internautes étant réjouis du spectacle auquel ils ont assisté.
Mais alors que Lola_Lola gagne en popularité, très rapidement, la
jeune femme constate qu'un individu semble avoir piraté son compte.
Non seulement Alice n'y a plus accès, mais une femme qui lui est en
tout point semblable parait avoir décidé de prendre sa place sur
Internet...
La
scénariste Isa Mazzei qui est à l'origine de l'écriture du
scénario avait comme ambition au départ de réaliser un
documentaire sur le métier de Cam
Girl
qu'elle pratiqua par le passé. Mais afin de toucher plus en
profondeur la conscience des spectateurs, elle choisit finalement
d'aborder le thème sous l'angle du thriller. Et dans le genre, il
faut reconnaître que Cam est
redoutablement efficace. Démarrant pourtant sous les pires augures
en prenant l'air d'un film pour adolescents boutonneux avec ses
dialogues creux et insipides, ses couleurs rose-bonbon et
l'improbabilité de voir des types derrière leur ordinateur se
délestant de milliers de tokens pour ne voir qu'une jeune femme se
fesser sans même ôter sa petite culotte, le film peu à peu génère
une certaine gêne. Avec une évidente économie de moyens mais une
actrice principale parfaitement à l'aise dans son rôle, Cam
génère un sentiment d'effroi qui ne fait que grandir au fil du
récit. Alors, bien sûr, on pourra toujours arguer de la minceur du
scénario, le principe de ce genre de film n'exigeant à ce niveau
pas de moyens considérables, mais le talent de son réalisateur. Daniel Goldhaber parvient à observer le
comportement d'une victime face au piratage de son compte sur
Internet, celui de son entourage, effaré d'apprendre qu'elle tourne
des vidéos érotiques, mais aussi d'individus libidineux et pervers
sautant sur l'occasion pour mettre le grappin sur leur ''fantasme''.
L'idée originale du film repose sur l'hypothèse d'un bug
informatique aux conséquences dramatiques (détournements de fonds,
images d'une personne salie, répercussions morales ou physiques). Au
final, Cam est
dans la lignée d'un Unfriended.
Original et oppressant. À découvrir sur Netflix...
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