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samedi 5 octobre 2019

Kotoko de Shin'ya Tsukamoto (2011) - ★★★★★★★★★★



Dépressive, souffrant de diplopie et s'automutilant, Kotoko est la mère du tout jeune Daijiro qu'elle élève seule dans un foyer aménagé afin qu'ils puissent y vivre tous les deux sans être obligés de sortir à l'extérieur. Malgré tout, la jeune femme a bien du mal à gérer la situation et bientôt soupçonnée de maltraitances envers son enfant, sa garde lui est retirée et il est désormais confié à la jeune sœur de Kotoko. Parvenant difficilement à accepter de ne revoir Daijiro que ponctuellement, la jeune femme s'automutile de manière plus régulière que jamais et refuse d'entretenir la moindre relation avec les hommes. Chaque fois que l'un d'eux tente une approche, il finit irrémédiablement une fourchette plantée dans la main. Alors qu'elle s'apprête à revoir son fils pour la première fois depuis qu'il lui a été retiré, Kotoko chante dans le bus qui l'emmène jusque chez sa sœur et sa voix attise la curiosité d'un homme qui dès lors va tout faire pour se rapprocher de la jeune femme. Alors que Kotoko laisse peu à peu Seitaro Tanaka entrer dans son existence, sa vie n'en sera pour autant pas améliorée...

Les films cultes, le réalisateur japonais Shin'ya Tsukamoto les accumule depuis l'un de ses premiers longs-métrages qu'il réalise en 1989 sous le titre de Tetsuo que les amateurs considèrent à bon escient comme l'emblème du cyberpunk japonais. Depuis, ce réalisateur hors norme signant des œuvres... hors normes elles aussi a réalisé deux séquelles de ce cultissime long-métrage ainsi que des œuvres toutes aussi cultes parmi lesquelles Hiruko the Goblin, Tokyo Fist, Bullet Ballet, ou Gemini. Alors que le sujet de Kotoko (qui porte donc le nom de son héroïne) laissait présager un changement de direction pouvant désarmer les fans du cinéaste japonais, il n'en est rien. Ici, point d'homme fait de métal et de chair ou de tête d'où poussent des pattes d'araignée. L'histoire tourne autour d'une jeune femme atteinte de très sévères troubles psychiatrique la rendent incapable d'élever son fils et de mener une vie normale.

Shin'ya Tsukamoto réalise une œuvre coup de poing. Enragée, violente, émouvante et surtout déstabilisante qui outre le génie de la mise en scène de son auteur repose également sur l'époustouflante interprétation de la chanteuse japonaise Cocco qui ensuite n'est malheureusement apparue sur grand écran qu'à l'occasion du drama Ningyo Ni Aeru Hi de Ryugo Nakamura en 2016 malgré son incroyable performance d'actrice. La jeune femme se jette à corps et à cœur perdu dans le rôle de Kotoko en se livrant totalement devant la caméra portée à l'épaule par Shin'ya Tsukamoto. Le réalisateur lui-même s'offre le second rôle en la personne de Seitaro Tanaka. Digne de trôner aux côtés de l'épatante Cocco, l'acteur-réalisateur campe un écrivain timide, effacé mais amoureux d'une jeune femme psychologiquement inabordable. Du moins jusqu'à ce que l'on assiste éberlué aux sacrifices que le bonhomme est capable d'accepter et surtout endurer pour garder auprès d'elle celle dont il est tombé follement amoureux. Entre automutilation, perception altérée de la réalité, Shin'ya Tsukamoto réalisait en 2011 ce que l'on peut désormais considérer comme son œuvre la plus aboutie même s'il a conservé ce petit côté amateur qui participe au charme de sa filmographie. Impossible de rester indifférent devant les actes et les pensée morbides de l'héroïne, la mise en scène tantôt intimiste, tantôt délirante de Shin'ya Tsukamoto, et surtout pas devant l'incroyable prestation du réalisateur et de la formidable Cocco. Entre émotion et effroi, Kotoko est une œuvre majeure du cinéma japonais contemporain. Une claque magistrale !

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