Dépressive, souffrant de
diplopie et s'automutilant, Kotoko est la mère du tout jeune Daijiro
qu'elle élève seule dans un foyer aménagé afin qu'ils puissent y
vivre tous les deux sans être obligés de sortir à l'extérieur.
Malgré tout, la jeune femme a bien du mal à gérer la situation et
bientôt soupçonnée de maltraitances envers son enfant, sa garde
lui est retirée et il est désormais confié à la jeune sœur de
Kotoko. Parvenant difficilement à accepter de ne revoir Daijiro
que ponctuellement, la jeune femme s'automutile de manière plus
régulière que jamais et refuse d'entretenir la moindre relation
avec les hommes. Chaque fois que l'un d'eux tente une approche, il
finit irrémédiablement une fourchette plantée dans la main. Alors
qu'elle s'apprête à revoir son fils pour la première fois depuis
qu'il lui a été retiré, Kotoko chante dans le bus qui l'emmène
jusque chez sa sœur et sa voix attise la curiosité d'un homme qui
dès lors va tout faire pour se rapprocher de la jeune femme. Alors
que Kotoko laisse peu à peu Seitaro Tanaka entrer dans son
existence, sa vie n'en sera pour autant pas améliorée...
Les films cultes, le
réalisateur japonais Shin'ya Tsukamoto les accumule depuis l'un de
ses premiers longs-métrages qu'il réalise en 1989 sous le titre de
Tetsuo
que les amateurs considèrent à bon escient comme l'emblème du
cyberpunk japonais. Depuis, ce réalisateur hors norme signant des
œuvres... hors normes elles aussi a réalisé deux séquelles de ce
cultissime long-métrage ainsi que des œuvres toutes aussi cultes
parmi lesquelles Hiruko the Goblin,
Tokyo Fist,
Bullet Ballet,
ou Gemini.
Alors que le sujet de Kotoko
(qui porte donc le nom de son héroïne) laissait présager un
changement de direction pouvant désarmer les fans du cinéaste
japonais, il n'en est rien. Ici, point d'homme fait de métal et de
chair ou de tête d'où poussent des pattes d'araignée. L'histoire
tourne autour d'une jeune femme atteinte de très sévères troubles
psychiatrique la rendent incapable d'élever son fils et de mener une
vie normale.
Shin'ya
Tsukamoto réalise une œuvre coup de poing. Enragée, violente,
émouvante et surtout déstabilisante qui outre le génie de la mise
en scène de son auteur repose également sur l'époustouflante
interprétation de la chanteuse japonaise Cocco qui ensuite n'est
malheureusement apparue sur grand écran qu'à l'occasion du drama
Ningyo Ni Aeru Hi
de Ryugo Nakamura en 2016 malgré son incroyable performance
d'actrice. La jeune femme se jette à corps et à cœur perdu dans le
rôle de Kotoko en se livrant totalement devant la caméra portée à
l'épaule par Shin'ya Tsukamoto. Le réalisateur lui-même s'offre le
second rôle en la personne de Seitaro Tanaka. Digne de trôner aux
côtés de l'épatante Cocco, l'acteur-réalisateur campe un écrivain
timide, effacé mais amoureux d'une jeune femme psychologiquement
inabordable. Du moins jusqu'à ce que l'on assiste éberlué aux
sacrifices que le bonhomme est capable d'accepter et surtout endurer
pour garder auprès d'elle celle dont il est tombé follement
amoureux. Entre automutilation, perception altérée de la réalité,
Shin'ya Tsukamoto réalisait en 2011 ce que l'on peut désormais
considérer comme son œuvre la plus aboutie même s'il a conservé
ce petit côté amateur qui participe au charme de sa filmographie.
Impossible de rester indifférent devant les actes et les pensée
morbides de l'héroïne, la mise en scène tantôt intimiste, tantôt
délirante de Shin'ya Tsukamoto, et surtout pas devant l'incroyable
prestation du réalisateur et de la formidable Cocco. Entre émotion
et effroi, Kotoko
est une œuvre majeure du cinéma japonais contemporain. Une claque
magistrale !
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