Étrange que ce La
Corta Notte Delle Bambole Di Vetro de
l'italien Aldo Lado. Ni tout à fait un giallo, ni complètement
policier, cette œuvre troublante réalisée en 1971 sort des
sentiers battus. Tout d'abord parce que son héros, un certain
Gregory Moore (l'acteur français Jean Sorel) enquête sur la
disparition de sa petite amie lors d'un long flash-back alors même
que dans le présent, il se situe à la lisière de la mort, entre
son statut de cadavre et la choquante réalité qui veut qu'il soit
en réalité plongé dans un état de catalepsie lui conférant
l'apparence d'un homme mort.
C'est
ainsi que l'on suit à travers lui, le calvaire d'un homme incapable
de faire comprendre autour de lui qu'il est bien vivant. Et même si
aucun signe tangible ne vient corroborer ce fait (même son cœur a
cessé de battre), il va mettre à profit le peu de temps qui lui
reste pour se remémorer les derniers jours. Car il a perdu la
mémoire. Tout juste se souvient-il de Mira Svobova, la petite amie
en question. Tout juste se souvient-il également de l'enquête qu'il
a mené. Et même s'il ne se souvient pas de sa conclusion, les
souvenirs peu à peu, refont surface. Et la vérité, telle que le
cinéaste Aldo Lado va nous la révéler, va se montrer
particulièrement glaçante dans ses derniers instants.
Plus
connu chez nous sous le titre Je Suis Vivant,
La Corta Notte Delle Bambole Di Vetro flirte
avec le fantastique sans jamais véritablement sortir de son carcan
réaliste. Quoique, en terme de réalisme, la réalisation demeure
plutôt étrange. Des éléments en pagaille viennent étayer
l'impression de surnager dans une œuvre surréaliste qui trouble
tous les points de repères habituels. Un scénario sans véritable
fil d’Ariane. Des interprètes tellement curieux (le germano-suisse
Mario Adorf ou la suédoise Ingrid Thulin) qu'on finit par soupçonner
tout le monde. Même jusqu'au médecin qui tente de pratiquer des
secours un peu tardif sur un Gregory supposé décédé.
Même
si l'on devine assez rapidement la conclusion à venir, le spectacle
qui nous est proposé dans le dernier acte dépasse de loin tout ce
que l'on a vu jusqu'à maintenant. Une orgie gériatrique qui
préfigure un sabbat démoniaque censé permettre aux membres d'un
club tous d'un certain âge, de vivre au delà des limites imposées
par la nature et ce, grâce à l'implication de jeunes femmes. Dont
la jolie Mira (Barbara Bach) aura sans doute fait les frais.
La Corta Notte
Delle Bambole Di Vetro aurait
pu se contenter de clore son intrigue sur cette vision déjà fort
incommodante, mais c'était sans compter sur cette question latente
qui demeure dès les premiers instants durant lesquels le corps de
Gregory est envoyé à la morgue : va-t-il être pouvoir sauvé
du sort terrible qui l'attend ? Aldo Lado nous offrira une
réponse hallucinante durant les dernières minutes.
Œuvre italo-germano-yougoslave et à laquelle participe donc l'acteur
français Jean Sorel, La Corta Notte Delle
Bambole Di Vetro demeure
une très belle réussite qu'un doublage dans la langue de Molière
aura malheureusement souillé du peu de talent dont ont fait preuve
les doubleurs français. Certains personnages s'en sortant encore
moins bien que d'autres, le film perd parfois en crédibilité, ce
qui n'est heureusement pas à mettre sur le compte des interprètes
ni du cinéaste. A noter que la musique du célèbre compositeur
italien Ennio Morricone colle parfaitement au sujet et maintient
l’œuvre dans une angoisse permanente. Un film à découvrir dans
sa version originale donc, pour ne pas avoir à pâtir du médiocre
doublage français...
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