Nombre de cinéastes se
sont attaqués au délicat sujet des camps de concentration et des
déportations. A l'étranger, et sous la forme d'une comédie (La
Vie est Belle
de Roberto Benini), de la nazisploitation (Ilsa,
la Louve des SS,
de Don Edmonds), ou du drame à travers quelques œuvres d'une
puissance émotionnelle encore intacte (La Liste
de Schindler
de Steven Spielberg ou Le Pianiste
de Roman Polanski). Et puis en France également. Sous la forme de
fictions (La Rafle de
Rose Bosch), ou plus fort encore, sous celle du documentaire avec
Nuit et Brouillard
d'Alain Resnais et le titanesque (du moins par sa durée) Shoa
de Claude Lanzmann...
S'il
en est un que l'on ne s'attendait pas forcément voir s'attaquer à
ce registre qui pour beaucoup demeure encore trop fragile pour être
abordé avec légèreté, c'est le réalisateur, producteur et
scénariste allemand Uwe Boll dont la qualité de ses adaptations de
jeux vidéos au cinéma avait tendance à le cataloguer dans le
registre éminemment rédhibitoire du cinéma Z, ce qui ne l'empêche
pas de se comparer à David Lynch !
Hyper-productif
depuis une dizaine d'années où ils enchaîne films sur films avec
plus ou moins de bonheur, si l'on ne peut taxer certains de ses
longs-métrages de chef-d’œuvre, il semble que Uwe Boll soit
ponctuellement capable de réaliser des œuvres beaucoup plus
matures. Comme le serait donc son Auschwitz
dont le titre à lui seul laisse tout d'abord imaginer toute la
sulfureuse impression qui s'en dégage, ainsi que sa force
d'évocation. Car contrairement à la majorité des élèves que le
cinéaste interroge en ouverture de ce tout petit film par la durée
(à peine une heure et dix minutes) et qui ne semble pas connaître
grand-chose de l'histoire personnelle de leur nation, on se souvient
encore très bien de la résonance dramatique que porte en lui le nom
d'Auschwitz, le plus grand camp de concentration, et surtout,
d'extermination créé le 27 avril 1940 sur ordre du maître
absolu
de la SS
(Schutzsttaffel,
qui est une organisation du régime national-socialiste) Heinrich
Himmler, afin de répondre au traumatisme des soldats allemands
consécutif à l'exécution des juifs abattus jusque là par arme à
feu, Himmler ayant lui-même ressenti un certain malaise devant
l'exécution sommaire des prisonniers.
Tourné
à Zagreb, la capitale croate, Auschwitz
est une tentative de docu-fiction initiée par un cinéaste dont
l'intention première est de marquer les esprits et provoquer ainsi
un électrochoc parmi les spectateurs afin de leur rappeler combien
la « vie »
dans ce camp d'extermination était rude et très majoritairement
synonyme de mort. Uwe Boll tente de repousser les limites du réalisme
et purgeant son œuvre de tout aspect récréatif. Froid et clinique,
Auschwitz se
poursuit après l'interview de plusieurs élèves allemands, dans un
train de déportation dans lequel sont entassés des centaines de
juifs de tout âge. Des bébés, des enfants, des adultes et des
vieillards, hommes et femmes, triés à la descente du train, puis
emmenés jusqu'au camp de la mort où ils sont « conviés »,
après avoir été contraints de se déshabiller, à se rendre dans
les « fameuses »
douches qui plutôt que de leur offrir de quoi se laver, les
abandonna à la Mort dans des conditions épouvantables.
Montrés
comme des êtres insensibilisés par le sort de leurs prisonniers,
les soldats allemands évoquent à leur tour le traitement qui leur
est infligé de manière clinique, comme les employés d'un abattoir
qui à force d'abattre des bêtes n'ont plus conscience des horreurs
qu'ils commettent.
Attendu
au tournant, Auschwitz se
révèle beaucoup moins saignant qu'on aurait pu croire. Uwe Boll
évoque le sujet avec sérieux, sans y ajouter une once de
spectaculaire. Le cinéaste propose une catharsis dont l’efficience
reste encore à démontrer puisque le résultat à l'écran demeure
malheureusement, sinon puéril, du moins assez peu convaincant.
On louera cependant la volonté d'Uwe Boll d'aborder un sujet délicat
sous la forme qu'il à choisit d'entreprendre. Entre fiction et
réalité, appuyée par d'abominables images d'archives et le
témoignage d'élèves avant et après le film. Un film contre
l'oubli à la suite duquel les quelques élèves interrogés en fin
de projection laissent entrevoir l'espoir que certains continueront à
nourrir le souvenir de cette période trouble qui emporta la vie de plus de six
millions d'hommes, de femmes et d'enfants... Auschwitz
demeure cependant à voir comme une curiosité...
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