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samedi 26 janvier 2019

Bunker Palace Hôtel d'Enki Bilal (1989) - ★★★★★★★★☆☆



Le Bunker Palace Hôtel est un édifice luxueux conçu par l'architecte Holm à l'attention des hauts-dignitaires et sur recommandation du Président en place. Comme son nom l'indique, le Bunker Palace Hôtel a été bâtit pour que nul autre qu'eux ne puisse y pénétrer (le Bunker). Un refuge éblouissant (le Palace) dans lequel chacun peut vivre, manger, et dormir (l’Hôtel) dans l'attente du Président. Alors qu'à l'extérieur les rebelles mènent un féroce combat pour défaire la dictature en place dans des territoires désolés, à l'intérieur, tout semble se déliter. Sous les bombardements incessants et répétés, les androïdes se mettent à dérailler, les esprits s'échauffent et la structure même du Bunker Palace Hôtel semble peu à peu tomber en ruines. Et le Président qui n'est toujours pas arrivé... Tranchant radicalement avec le cadre et ses habitants, Clara est la source de nombreuses questions et de doutes de la part des hauts-dignitaires qui se méfient très rapidement de la jeune femme. Heureusement pour elle, Clara peut compter sur l'inattendu soutien de Holm lui-même...

Étrange long-métrage que ce Bunker Palace Hôtel signé Enki Bilal, le dessinateur dont on retrouve ici la patte graphique. Avec une rigueur exemplaire, le cinéaste ne se laisse jamais à marchander avec le public et ne cherche en aucun cas à le divertir. Anticipation, post-apocalyptique. Des mots qui sonnent faux dans le paysage cinématographique français de cette époque là. Surtout que deux ans auparavant, le cinéaste Pierre-William s'était quelque peu ridiculisé en réalisant le très ringard Terminus qui pourtant, depuis, a gagné ses galons de nanar culte. Bunker Palace Hôtel aurait pu, lui aussi, devenir la risée de la presse et du public, pourtant, à le redécouvrir aujourd'hui, on sent combien Enki Bilal était en avance sur son temps. Peut-être même un peu trop pour l'amateur de cinéma lambda qui se retrouvait sans doute pour la première fois de sa vie devant une œuvre parfois intellectuellement labyrinthique.

Auteur de bandes-dessinées (La Trilogie Nikopol ), de jeux vidéos (La Foire aux Immortels), illustrateur, metteur en scène de théâtre et donc, cinéaste, ce touche à tout d'Enki Bilal quitte la France avec toute son équipe de tournage et se rend à Belgrade, capitale de la Serbie, pour y tourner son tout premier long-métrage. Bunker Palace Hôtel. Un titre aux contours aussi rugueux que les prises de vue parfaitement symétriques du long-métrage. Décors extérieurs bombardés, réappropriation du béton par la mère-nature tandis que résonnent au loin, tirs de mitraillettes et bombardements. Budget serré ? Choix artistiques parfois volontairement minimalistes ? Toujours est-il que du conflit qui oppose la hiérarchie aux ennemis de l'état, nous n'en verrons que quelques rarissimes conséquences (la mort de Marco, incarné par l'acteur Svetozar Cvetkovic), le cinéaste préférant sans doute accorder une place plus importante à l'univers sonore. Surtout lorsque s'enfoncent chacun de leur côté dans les abîmes, Clara et Holm.

Extérieurs proches du Brazil de Terry Gilliam. Intérieurs sobres. Costumes taillés de hauts-fonctionnaires. Androïdes défaillants, ventripotents, blafards, serviles. C'est dans cet univers froid et lugubre que pénètre un casting aussi inattendu que prestigieux. Jean-Louis Trintignant, le cheveu ras. Carole Bouquet, la teinture rousse. Et puis il y a les autres. Le Jean-Pierre Léaud de Godard. Benoît Régent, disparu trop tôt à l'âge de quarante ans. L'impeccable Yann Colette (que l'on reverra notamment dans les deux autres longs-métrages d'Enki Bilal). Ou encore Jezabelle Amato qui débutait là, sa carrière sur grand écran. Tous forment le contenu d'une œuvre emprunte de poésie funèbre, vivant sans le savoir dans ce qui deviendra sans doute leur tombeau. Enki Bilal signe avec Bunker Palace Hôtel une date importante dans le cinéma de science-fiction. Premier véritable pas, sans fausses notes, du cinéma français vers un monde dystopique très critique envers la politique dont le sujet ne cache jamais ses origines. Magistral de bout en bout et définitivement pessimiste, Bunker Palace Hôtel est un joyau noir de hard science-fiction qu'il serait temps de redécouvrir...

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