"Golem" est le
premier volet de la tétralogie consacrée à des univers
post-apocalyptiques mis en œuvre par le cinéaste polonais Piotr
Szulkin. Celui-ci s'inspire de légendes et du livre du même titre
de l'auteur autrichien originaire de Vienne, Gustav Meyrink.
L'histoire se déroule
très exactement quarante et un an après un conflit nucléaire, au
cœur d'une société menacée par l'extinction de l'espèce humaine.
Afin de pallier aux nombreuses pertes en vies humaines, un mystérieux
projet aurait été mis en place. En effet, des individus artificiels
auraient peu à peu pris la place de véritables prototypes d'origine
humaine. Cette rumeur proviendrait d'une très ancienne légende
selon laquelle des êtres entièrement constitués d'argile seraient
venus à la vie grâce à une formule magique placée entre leurs
lèvres. Une expérience entrant dans le cadre d'un programme de
régénération de l'espèce humaine fut donc mise en route,
considérée cependant par certains comme une superstition.
Et pourtant... Piotr
Szlukin nous conte avec son "Golem" datant de 1980, l'histoire
d'un certain Monsieur Pernat qui interrogé par la police qui enquête
sur le meurtre du docteur Vasorja, dont il était l'un des patients,
apparaît comme l'un des sujets de ces expériences. Dans un univers
ravagé par les cataclysmes et la pauvreté, tout le monde tente de
survivre d'une manière ou d'une autre. Le cinéaste polonais décrit
une dystopie dans laquelle sont créés des individus prévus pour
être formatés. Si l'un d'entre montre cependant des signes
d'indépendance (que certains considèrent alors comme un symptôme
de rébellion), il est immédiatement éliminé. "Golem" est un
très étrange long-métrage. Assez inconfortable dans son
déroulement, il laisse de nombreuses questions en suspens. Piotr
Szlukin s'amuse à détourner l'attention du spectateur entre la
réalité des événements et des détails qui viennent contrecarrer
tout la logique du scénario mis en place.
Alors que chaque
élément prend la place qui lui est due, le cinéaste efface peu à
peu les quelques repères qu'il avait jusque là disséminés. Des
personnages dont l'emploi demeurait encore simple à identifier nous
sont révélés sous la forme d'individus n'ayant jamais réellement
existé. Soit ils disparaissent comme s'ils n'avaient été que le
fruit de l'imagination de Pernat, soit ils demeurent encore présents
à l'écran mais sous la forme de personnages différents.
D'ailleurs, Piotr
Szulkin fait de Pernat lui-même, un être curieux. Qu'il mettra
longtemps à définir comme une sorte de clone avant l'heure. Un
individu que tout le monde semble connaître alors que lui-même
semble ignorer qui il est. "Golem" est
presque entièrement tourné en sépia, si ce ne sont les quelques
passages mettant en scène des scientifiques débattant sur le sort à
apporter à l'une des « versions »
de Pernat jugée nuisible.
S'il
demeure une certitude, c'est que Piotr Szulkin a signé avec "Golem"
une œuvre complexe. Dans le fond, mais surtout dans sa forme. Une
pièce de théâtre à ciel ouvert. Un individu seul face au monde
qui l'entoure. Un cauchemar kafkaïen, « Gilliaméen »
dirais-je même, scénarisé par le cinéaste lui-même, par Tadeusz
Sobolewski également, et enrobé par la musique discrète mais
anxiogène de Zygmunt Konieczny et Josef Skrzek. Une œuvre que les
plus courageux habitués à ce genre d'exercice intellectuel sont
rompus trouveront certainement passionnante. En tout cas, un document
précieux. Une vision « polonaise » d'un certain cinéma
de l'apocalypse. On est très loin des canons du genre mais
l'expérience vaut à coup sûr, le mérite d'être vécue...
Malheureusement, je n'ai pas encore eu l'occasion de le voir : il faut que je passe le DVD que tu m'as gravé sur l'ordinateur, mon lecteur de DVD n'acceptant pas le format.
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