Je dois l'avouer, cela me
coûte de le reconnaître, mais j'ai adoré Mascarade
de Nicolas Bedos. Parce que ouais, le bonhomme me sort par les yeux.
Du moins lorsque ce ''fils de'', qui me laisse généralement
indifférent, laisse planer le doute s'agissant du bord politique
qu'il prétend défendre ou lorsqu'il frappe sur tout ce qui bouge
avec cette fausse audace des salons parisiens qui voudrait que le
fils de l'humoriste Guy Bedos est parvenu à égaler voir surpasser
le talent de son géniteur. Bouffi de vanité, auto-satisfait mais se
traînant malgré tout un certain nombre de casseroles au cul, à
travers son dernier long-métrage en tant que réalisateur,
scénariste et compositeur tout de même bien épaulé par la
compositrice de musique de film française Anne-Sophie Versnaeyen,
Nicolas Bedos semble dès son premier ''tour de manivelle'' préparer
sa défense pour des faits supposés d'agressions sexuelles survenus
trois ans auparavant, en 2018. Et même plus tard, jusqu'à très
récemment, l'année dernière. Parce que Mascarade,
sous ses allures de brillant exercice de style français ''à
l'américaine' convoquant tout un panel de cinéastes
outre-atlantiques prestigieux peut se concevoir comme une œuvre
féministe furieusement anti-patriarcale. La morale de l'histoire ?
Un pour toutes et tous pourris ! Le UN étant bien évidemment
accordé à l'auteur du film lui-même, lequel s'interpose entre ces
méchants messieurs qui mettent ici en application ce vieux concept
de droit de cuissage au sein d'une couche de la société permissive
et bouffie d'orgueil et leurs victimes. Si d'autres bien avant lui
s'amusèrent à égratigner les femmes et les hommes de la ''Haute
Société'' comme l'espagnol Luis Bunuel (Le
Charme discret de la bourgeoisie)
ou le français Claude Chabrol (La cérémonie)
pour n'en faire que la chair à canon d'idées préconçues et
systématisées, armé d'une équipe technique de pointe et de fameux
interprètes, Nicolas Bedos installe un véritable jeu de massacre
entre des individus parfaitement intégrés et des petites gens à
l'ambition dévorante. Une appétence pour l'argent et le confort
mais également, un désir de réparation qui prendra le visage de
Margot, jeune femme superbe incarnée par l'actrice et mannequin
Marine Vacth dont la posture la rapprochera ostensiblement de
certains personnages notamment rencontrés chez Roman Polanski à
travers diverses incarnations d'Emmanuelle Seigner (Lune
de fiel).
L'ambivalence
prévaut dans ce récit mêlant une actrice vieillissante sur le
retour et son dernier gigolo (Isabelle Adjani et Pierre Niney, tous
deux excellents). Entre ce dernier et Margot, également. Amants d'un
jour, puis de toujours (vraiment?). Elle, jalouse, envieuse, voleuse,
éprise de vengeance et lui, passant de la pommade aux vieilles
rombières contre monnaie sonnante et trébuchante, repas chauds et
nid douillet ! Viennent se greffer à cette histoire d'arnaque
aux sentiments somme toute banale, des personnages pas tout à fait
secondaires. Comme l'agent immobilier Simon (François Cluzet) et son
épouse Carole (Emmanuelle Devos) ou bien Giulia (l'actrice italienne
Laura Morante) jetée à la porte de son propre restaurant par un
ancien mari particulièrement violent. D'autres viennent témoigner
lors d'un procès des affres d'une histoire très limpide malgré un
montage inventif signé d'Anny Danché et des redoutables conséquence
qu'elle aura sur chacun des principaux protagonistes. Véritable
toile d'araignée où rien n'est jamais irrémédiable et où tout
peut arriver et se construire au fil du récit, Nicolas Bedos signe
une œuvre percluse d'un cynisme propre aux casquettes d'humoriste et
de chantre de la critique acerbe qu'il porte fièrement et en toute
situation. Mascarade
possède cette faculté consistant à rendre les uns et les autres
attachants alors qu'eux-mêmes, et comme Nicolas Bedos, se traînent
également des boulets aux pieds. La cruauté avec laquelle le
réalisateur et scénariste s'en prend à ses personnages est
absolument jouissive. Poussant le spectateur à rire aux éclats même
à certains instants du récit les plus cruels. Quand d'autres
actions relativisent le message étalé à l'image, renvoyant les
victimes à ce même statut de monstres comme lorsque Margot et
Adrien, épaulés par Giulia, montent un stratagème afin d'accéder
à ce qu'ils pensent leur être dû ! Au final, personne ou
presque n'en ressortira indemne. Pas même le spectateur, emporté
dans un tourbillon mené de main de maître par un Nicolas Bedos que
l'on préférera donc voir diriger de brillants interprètes, comme
ici, plutôt de le voir débarquer sur les plateaux de télévision
ou à la radio proférer sa morale en carton-pâte...
S'il n'y avait que Bedos fils... Pour moi, l'aversion que tu signale en préambule s'applique à de nombreux autres, pour diverses raisons. C'est aussi ce qui me laisse éloigné du cinéma tricolore, sans non plus que ce soit dramatique. Ce n'est pas comme si je ratais des œuvres qui allaient marquer l'histoire du cinéma... :-)
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