Vincent doit mourir,
c'est d'abord un curieux phénomène qui touche le héros du récit.
Qu'arrive-t-il aux gens qui entourent Vincent ? Un simple
regard, droit dans les yeux et notre protagoniste se fait agresser.
Le premier long-métrage de Stéphan Castang est une vue d'esprit
sur la violence qui nous entoure. Un monde qui se délite et où tout
est prétexte à la confrontation. Auréolé d'une bonne petite
réputation, Vincent doit mourir
intrigue, tout d'abord, jusqu'à ce que l'on comprenne que le
réalisateur et son scénariste Mathieu Naert ne nous donneront
aucune explication quant aux raisons qui poussent ses semblables à
vouloir tuer Vincent. À travers son étonnant concept, le film se
traverse de bout en bout en implémentant autant d'humour que de
séquences chocs. Film moins radical que ne le laissait présager sa
très efficace bande-annonce, Vincent doit mourir
joue aux montagnes russes, au yoyo, avec les sentiments du spectateur
qui passe alors de l'angoisse au rire. Et qui mieux que l'acteur
Karim Leklou dont les très brillants débuts de carrière lui ont
fait croiser la route de Jacques Audiard en 2009 avec Un
prophète pour
donner vie à ce personnage relativement énigmatique dont il est
tout d'abord peu évident de cerner les ambitions professionnelles ?
Employé d'une entreprise dirigée par le directeur des ressources
humaines Alex (Jean-Rémi Chaize), il est un jour agressé dans son
bureau par un stagiaire après qu'il lui ait fait une remarque, il
est vrai, pas très intelligente. On appréhende la séquence comme
les représailles d'un homme humilié devant le reste du personnel.
Mais lorsque Vincent est de nouveau attaqué par un second collègue
avec lequel il n'était jamais entré en conflit, il est clair que le
problème est ailleurs. Dans ce scénario totalement fou, voire
ubuesque, en forme de ''film d'infectés'' où les raison premières
n'ont rien à voir avec un quelconque virus que se serait échappé
d'un laboratoire tenu par l'armée, on se laisse guider, tout d'abord
sans réfléchir. L'une des références de Stéphan Castang semble
être l'hallucinant After Hours de
l'américain Martin Scorsese et ce cauchemar éveillé que connaîtra
son héros durant une folle nuit new-yorkaise...
Et
il est vrai que son film entretient un rapport, si ténu, si lointain
soit-il avec ce classique quasi surréaliste. Cette propension à
plonger son protagoniste dans un univers qui lui est inconnu et qu'il
ne contrôle pas. Mais d'une certaine manière, le film évoque les
phénomènes ayant d'un côté conduit les héros de Sans
un bruit
de John Krasinski à éviter de produire le moindre son et d'un autre
poussé ceux de Bird Box
de
Susanne Bier à se bander les yeux. Comme évoqué plus haut,
Vincent doit mourir
finira
même à défaut de nous donner une explication nette et franche par
évoquer cette immense vague de films d'infectés qui depuis une
vingtaine d'années a envahi les salles obscures. C'est avec un avis
quelque peu mitigé que je suis sorti de la projection. Car si
Vincent doit mourir
s'avère être une production révélant d'indéniables qualités, il
en ressort un concept fort mais finalement exploité de manière
résiduelle. Le film peut fort heureusement compter sur le regard
tantôt triste, tantôt halluciné de Karim Leklou, rejoint plus
tard par la superbe Vimala Pons dont la qualité des choix
artistiques, décidément, ne varie pas d'un iota. D'un côté l'on
nous offre une vision pessimiste à la puissance mille d'une société
qui au quotidien compose avec la violence des rues et de l'autre, le
film de Stéphan Castang intègre un humour qui désamorce la quasi
totalité des phénomènes qui touchent le héros. Créant une
certaine distanciation entre le côté anxiogène du récit qui
renvoie inexorablement ses personnages au monde tel qu'il est et cet
étrange rapport à la violence qui par extension peut faire
régulièrement sourire. Beaucoup de matière alignée sur presque
cent-vingt minutes de projection mais avec le sentiment que rien
n'est jamais tout à fait abouti. Demeure forcément quelques
interrogations (pourquoi un tel phénomène?) mais aussi une jolie
romance, marginale et maladroitement touchante entre Vincent et
Margaux. On notera parmi les seconds rôles celui du père du héros,
Jean-Pierre, incarné par l'acteur François Chattot. Au final, le
long-métrage de Stéphan Castang s'avère plutôt convainquant,
développant en outre un aspect paranoïaque parfois relativement
glaçant. Presque un Objet Filmique Non Identifié...
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