Ahhhhh comme je l'aime
notre Luc Besson national. Et même s'il m'arrive parfois de ne pas
être très tendre avec lui (sa propension à détruire ses quelques
incartades dans le domaine de la science-fiction à travers Le
cinquième élément
et Valérian et la Cité des mille planètes
m'ayant donné d'affreux maux de tête), il m'arrive parfois d'avoir
une haute estime pour ce grand enfant qui dépense son argent et
celui des autres sans compter dans des projets dont les fruits sont
parfois pourris. À chaque nouvel arrivage du français, la fébrilité
est à l'aune de l'impatience qu'il génère en moi. Son nouveau
projet parviendra-t-il une fois encore à générer ces rires
troubles et plein de gêne qui naissent de la surexploitation d'idées
qui auraient mérité davantage de retenue ? Dogman
semble aller dans ce sens et c'est tant mieux. Au pire, l'on oubliera
rapidement cette nouvelle extravagance placée sous le signe de
l'examen clinique d'un sociopathe, au mieux l'on passera un très
agréable moment de cinéma bis à vingt millions d'euros. Produit
par la société de production de Luc Besson et Pierre-Ange Le Pogam,
EuropaCorp
mais également par Virginie Besson-Silla et Steve Rabineau, le
dernier joujou de Luc Besson a beau être drapé de l'étendard
tricolore, le bonhomme ne change pas d'un iota et convie à cette
occasion un important panel d'interprètes d'origines diverses.
Fondamentalement, le film attire par la seule présence de l'acteur
américain Caleb Landry Jones qui dans le formidable Nitram
de Justin Kurzel en 2021 incarnait le rôle-titre. D'autres verront
sans doute sa participation à Antiviral
de Brandon Cronenberg, à Get Out
de Jordan Peele ou The Dead Don't Die
de Jim Jarmusch comme des valeurs sûres mais c'est bien dans la peau
de Nitram que l'acteur révéla surtout son énorme potentiel... Dans
Dogman,
Caleb Landry Jones ressemble parfois à s'y méprendre à l'acteur
français Vincent Perez. Mais un Vincent Perez sous l'emprise d'une
psyché désordonnée. Bien qu'elles puissent souvent apparaître
rédhibitoires, ce sont les maladresses de ce cinéma typiquement
''Bessonien'' qui font le charme et parfois le sel de certaines de
ses réalisations.
Ici,
d'emblée Luc Besson fait fi des recommandations faites aux agents
généralement concernés par l'interrogatoire des criminels. La
psychiatre Evelyn (l'actrice Jonica T. Gibbs) déballe en moins de
temps qu'il ne faut pour le dire l'état relationnel dans lequel elle
vit actuellement à un type qu'elle rencontre pour la toute première
fois : Douglas Munrow, le Dogman
du titre. Histoire de mettre en confiance cet étrange individu
ressemblant à une Marilyn Monroe passée à tabac ?
Peut-être... Un détail en tout cas en regard du gouffre qui sépare
le fond de la forme. Un abîme dans lequel s'enfoncent
malheureusement aussi bien la quasi totalité des interprètes que la
mise en scène de Luc Besson qui décidément semble incapable
d'argumenter lorsqu'il s'agit d'apporter cette petite touche
d'émotion qu'appelle la tragédie qui entoure le personnage
principal. Le film aurait d'ailleurs pu tout aussi bien porter le nom
de son principal interprète tant Caleb Landry Jones efface tous
ceux que son personnage croise. Sans parler du ridicule qui souvent
ici transpire malheureusement par tous les pores d'une mise en scène
académique, Luc Besson n'est ni Rob Reiner, ni Frank Darabont. N'est
pas conteur qui veut et cette histoire documentée sous forme de
flash-back demeure cruellement inefficace. On a beau trouver de
bonnes raisons de prendre en pitié le héros pourtant très bien
campé par l'acteur américain, les incessants retours en arrière
sont chacun à leur tour expédiés de telle manière que l'on
n'éprouve finalement pas ou peu d'empathie pour ce pauvre gamin,
handicapé, devenu adulte et maître expérimenté dans l'art du
transformisme et dans celui du dressage des chiens. Ridicule, oui,
parfois, et même parfaitement gênant lors de séquences franchement
problématiques. Le passage expédié au foyer, la rencontre du héros
avec son seul ''amour'', la comédienne de théâtre Salma Bailey
(l'actrice américaine Grace Palma), des passages apparemment obligés
qui montrent à quel point Luc Besson ne maîtrise absolument pas son
sujet. Reste malgré tout quelques bonnes idées comme le contrôle
du héros sur ses amis canins qui nous vaut quelques sympathiques
séquences. Notons qu'une fois encore le compositeur Éric Serra est
toujours aux commandes de la bande musicale. Le réalisateur et
scénariste français, comme à son habitude, engrange les bonnes et
les mauvaises idées pour un résultat qui au fond, ne casse pas
trois pattes à un can,
à un chien... !
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