Il y a des patronymes qui
ne trompent pas sur la marchandise. Jonathan Barré est né à
Quimper et pour son troisième long-métrage, l'auteur de l'émission
Very Bad Blagues avec
Grégoire Ludig et David Marsais du Palmashow
signe peut-être là, sa meilleure comédie. Si le fait que le duo
continue depuis les débuts du réalisateur, scénariste et
producteur à graviter autour de lui puisse être davantage envisagé
comme un projet entre potes plus que celui d'un homme simplement
fidèle à ceux qui lui ont permis de mettre le pied à l'étrier du
septième art, le risque de voir la carrière de Jonathan Barré
tourner en rond ne semble pour l'instant pas d'actualité. Son
approche du cinéma semble au contraire mûrir l'idée selon laquelle
s'approcher du brûlant et antinomique astre solaire de la comédie
noire ne peut être que la meilleure voie menant à la consécration.
Après le très anecdotique La Folle Histoire de Max et
Léon
en 2016 et Les vedettes
en 2022, Bonne conduite
imprimait l'année suivante un ton nettement plus abrupte même si là
encore, la part belle est d'abord offerte à la comédie. C'est
peut-être d'ailleurs cela que l'on reprochera en priorité au
nouveau long-métrage du français qui par conséquence ne coche
absolument pas toutes les cases du film culte ! Le double sens
du titre n'étant pas tout à fait représentatif du cynisme qui
imprime l’œuvre dans son ensemble, c'est peut-être
outre-Atlantique qu'ils ont su le mieux saisir le message du film qui
là-bas a été retitré Serial Driver.
La maturité passe ici chez Jonathan Barré par l'emploi d'une Laure
Calamy dont la carrière s'est déjà envolée depuis un certain
nombre d'années. Rappelons simplement sa participation aux tournages
du phénoménal Seules les bêtes
de Dominik Moll en 2019 ou des excellents Antoinette
dans les Cévennes
de Caroline Vignal en 2020 et A plein temps
d'Eric Gravel en 2021. Une actrice qui laisse moins de place à
l'image au duo Grégoire Ludig et David Marsais tout en évitant de
les écraser par sa seule présence.
Car
on ne sait plus alors qui des uns ou de la troisième est la
véritable vedette de cette comédie noire à la française. La
Belgique n'étant qu'à sept ou huit-cent kilomètres de la ville
d'origine du cinéaste, on aurait sans doute apprécié qu'il s'y
arrête afin de s'imprimer de cet humour si particulier dont le
cinéma belge est si coutumier. Car si Bonne
Conduite
est une œuvre très intéressante puisque tournant autour des
questions de l'être cher disparu dans un grave accident de voiture,
du deuil, de la vengeance ou de l'éducation des automobilistes en
infraction avec certains codes de la route, Jonathan ne semble
pouvoir s'empêcher de griller toutes les cartouches qui auraient
permis à son troisième long-métrage de ne pas être simplement la
comédie qu'il est, ponctuée, il est vrai de quelques idées tordues
comme celle de faire de Laure Calamy/Pauline Cloarec une tueuse en
série se vengeant de la mort de son compagnon. Le duo Grégoire
Ludig et David Marsais incarnent deux flics dont l'un vient tout
juste de débarquer de Narbonne. Jonathan Barré tente bien de jouer
avec certains clichés typiques de la Bretagne où se situe justement
l'action mais le fait avec une telle retenue que certaines répliques
ne fonctionnent pas vraiment. Au titre des principaux interprètes,
n'oublions pas l'acteur Tchéky Karyo qui après une longue et très
appréciable carrière incarne ici un substitut du Jean-Claude
Convenant de la série Caméra Café
qui préférerait le trafic de drogue au porte à porte. Nanti d'une
petite moustache ringardisant immédiatement son personnage, à
l'image de la toujours impeccable Laure Calamy, il élève un peu le
propos même si là encore, le cynisme est insuffisamment exploité.
Si l'on ne s'ennuie jamais, quelque chose d'imperceptible manque à
Bonne conduite
qui semble retenir chacun de ses coups et ne jamais aller vraiment au
fond des choses. De fait, Jonathan Barré transforme sa comédie à
usage courant pour les amateurs d'humour noir en petite espièglerie
sans dangers qui rappelle parfois la sympathique série humoristique
créée en 2019 par Igor Gotesman, Family
Business
même si, évidemment, le sujet n'est pas le même...
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire