Il arrive que certains
courants fantastiques ne soient jamais aussi fascinants que
lorsqu'ils s'extraient de leur forme traditionnelle. Le vampirisme
l'a notamment prouvé maintes fois : Låt den Rätte Komma
in de Tomas Alfredson, Martin
de George Romero, The Transfiguration de
Michael O'Shea ou The Addiction
d'Abel Ferrara. Le film de super-héros a quant à lui ses adeptes
mais également ses contradicteurs. Pourtant, parmi les dizaines,
voire les centaines de longs-métrages qui ont été tourné depuis
que le genre est devenu à la mode, il en est certains qui auront
réussi à marquer les esprits de ceux qui n'en apprécient pourtant
pas particulièrement le concept. Le Logan de
James Mangold demeure sans doute l'une des plus grandes réussites
dans le domaine. Si en France l'on ne semble pas avoir une vision
aussi grandiloquente du genre, c'est justement en s'extrayant de ses
gimmicks habituels que certains sont parvenus à faire parler d'eux.
À une échelle aussi petite soit-elle, entendons-nous bien. Comment
je suis devenu super-héros
de Douglas Attal, Vincent n'a pas d'écailles
de Thomas Salvador ou bien L'Angle mort
de Patrick Mario Bernard et Pierre Trividic ne sont peut-être pas
des chefs-d’œuvre mais demeurent de petites pépites fort
intéressantes. La Norvège n'est pas en reste puisqu'elle a produit
en 2020 l'excellent Torden
de André Øvredal qui jusque là s'était notamment penché sur les
mythes des trolls avec Trolljegeren
en 2010 et de la sorcellerie avec l'excellent The
Jane Doe Autopsy
six ans plus tard...
Également
scénariste (aux côtés de Geoff Bussetil, Norman Lesperance) et
producteur de Torden,
André Øvredal réalise avec ce qui demeure à ce jour son dernier
long-métrage un exercice de style figurant la naissance d'un
super-héros. Un individu dont les pouvoirs deviennent terrifiants
dès lors qu'il demeure encore incapable de les contrôler et d'en
comprendre le but et les origines.C'est ainsi que l'on fait la
connaissance d'Eric, un américain originaire de Norvège qui s'est
récemment lancé sur la trace de sa famille d'origine. Découvrant
que ses membres vivaient dans une ferme, le jeune homme a
accidentellement causé la mort de cinq personnes en incendiant cette
dernière alors qu'il cherchait à entrer en contact avec eux.
Réfugié dans la forêt, Eric tente de survivre et de contrôler ses
pouvoirs. Mais alors qu'il commet une nouvelle fois sans le vouloir
un nouveau meurtre sur la personne d'un adolescent qui lui cherchait
des noises, il se retrouve enfermé dans la salle d'interrogatoire
d'une prison située dans une petite ville où va l'interroger la
jeune Christine... Voici comment démarre l'aventure Torden.
Une œuvre on ne peut plus intrigante. En effet, le personnage d'Eric
interprété par l'acteur Nat Wolff est des plus curieux. Sale,
claudiquant à la suite d'une affreuse brûlure s'étendant le long
de sa jambe, le jeune homme apparaît tout d'abord comme un individu
passablement asocial. C'est à l'arrivée de Christine que les choses
vont quelque peu changer. Sa présence va en effet humaniser Eric
avec lequel la jeune femme va se lancer dans la recherche des
origines de ses pouvoirs. Et la l'on rentre dans le domaine que
connaissent bien les amateurs de supers-héros puisque est évoqué
l'un des plus célèbres de la mythologie scandinave en la personne
de Thor...
Ce que certain reprochent à Torden, c'est son
scénario. Ou plutôt, son absence de scénario. Pourtant écrit à
six mains, il est vrai que celui-ci ne révolutionnera pas le genre.
Mais c'est peut-être aussi ce qui participe du charme de ce
long-métrage car loin d'être anodine, son approche le confond avec
ce que l'on a coutume d'appeler sous le terme de cinéma indépendant.
Est-ce dû à ses origines nordiques ? Mais le film est
effectivement assez froid dans sa construction et son évolution. Une
''fraîcheur'' qui heureusement se désintègre au contact de
l'actrice Iben Akerlie qui réchauffe l'atmosphère au contact de Nat
Wolff qui interprète Eric. Le film peut également compter sur la
présence de Per Frisch qui incarne le commissaire de la petite
localité de Odda située dans le comté de Hordaland où se déroule
l'intrigue. Comme dans tout bon film de super-héros, il fallait
joindre au récit une personnalité antagoniste. Celle-ci est
reflétée par le personnage de Hathaway qu'interprète Priyanka
Bose. Une personnalité changeante pour cette jeune femme tout
d'abord chargée d'escorter le jeune homme hors du territoire avant
d'être finalement occupée à le traquer afin de l'éliminer. Torden
est réellement étonnant. Sortant des sentiers battus d'un
genre flirtant régulièrement avec le blockbuster, intimiste
et même parfois émouvant dans la relation qu'entretiennent
Christine et Eric, le long-métrage de André Øvredal pourrait faire
figure de premier volet d'une franchise. Mais à ce jour, rien ne
semble aller dans ce sens. À réserver en priorité à celles et
ceux qui veulent s'extraire du carcan habituel des films de
supers-héros...
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