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samedi 21 mai 2022

Une époque formidable de Gérard Jugnot (1991) - ★★★★★★★★★☆

 


 

Ancien membre de la Troupe du Splendid, acteur dans plus de cent-vingt épisodes de séries télévisées, courts et longs-métrages, scénariste, producteur et réalisateur, la carrière de cinéaste de Gérard Jugnot est on ne peut plus remplie. Avec douze films en tant que réalisateur dont le dernier, Le petit piaf, est prévu pour décembre prochain, l'ancien compagnon de Michel Blanc, Anémone, Thierry Lhermitte, Marie-Anne Chazel, Christian Clavier et Dominique Lavanant, a souvent su séduire le public français à travers nombre de comédies devenues cultes avec le temps. Passant de la légèreté de ses premiers longs-métrages Pinot simple flic ou Scout toujours à une certaine gravité comme dans Une époque formidable qui demeure sans doute à ce jour, le meilleur d'entre tous. Grave car l'acteur/réalisateur/scénariste y aborde le thème de la marginalisation. De la clochardisation d'un ancien cadre d'entreprise spécialisée dans la vente de matelas. Gérard Jugnot est Michel Berthier, époux d'une femme superbe (l'actrice espagnole Victoria Abril dans le rôle de Juliette), beau-père de Vincent et Émilie (Julien Harlay et Beryl Le Lasseur), qui du jour au lendemain perd son travail et se retrouve à la rue après une dispute avec celle qui partage sa vie. C'est le début de la déchéance. De la galère ! Mais heureusement pour Michel, la rencontre fortuite avec trois SDF va lui permettre de surmonter cette épreuve...


Une époque formidable, c'est avant tout, le portrait plutôt réaliste de ce qui attend quiconque risque de se retrouver à la rue. Avec clairvoyance mais sans complaisance, avec pudeur mais sans misérabilisme, Gérard Jugnot réalise l'une des œuvres les plus sincères sur le sujet. Ce qui n'empêche pas le film d'être parfois émaillé de séquences relativement amusantes. À ses côtés, tout un panel d'interprètes parmi lesquels, les formidables Richard Bohringer et Ticky Holgado auxquels on ajoutera le plus rare, Chick Ortega. Interprétant respectivement les personnages de Toubib, Crayon et Mimosa, ces trois hommes sont dépeints comme des individus plutôt débrouillards, flairant l'hypothétique avantage de se lier à Michel. En effet, celui-ci possède une voiture qui pourrait les abriter tous ensemble. Drôle, touchant, émouvant même parfois,Une époque formidable propose une histoire d'amitié insolite entre un ancien cadre et des individus auxquels sans doute, il n'aurait jamais jeté un seul œil s'il avait conservé sa place dans son entreprise. Gérard Jugnot traite également du chômage. De la honte d'avoir perdu son boulot. Des mensonges qui en découlent et de la difficulté de retrouver un emploi. Mieux, il montre avec quelle vitesse un individu peu passer du statut de Col Blanc à celui de clochard, sans toit, sans chaussures et sans argent...


Parmi les seconds rôles, nous retrouvons Zabou dans le rôle d'une journaliste rudoyée par nos héros à l'entrée d'un centre d'aide sociale. Bâtiment à l'entrée duquel nous reconnaîtrons également Patrick Timsit, un an avant sa superbe autant que drôlatique incarnation de Michou, le SDF de l'excellent film de Coline Serreau, La crise. Roland Blanche interprète le personnage de Copi, un marchand de sommeil, Charlotte de Turckheim celui de la prostituée Rita, Laurent Gamelon s'affiche en propriétaire de voiture victime d'un accrochage et Chantal Ladesou en infirmière. Quant à Michèle Laroque et Guy Laporte (une vielle connaissance de Gérard Jugnot), il incarnent respectivement une employée chargée d'examiner des candidatures aux postes de cadres et le clochard Parfum ! On pourrait comparer Une époque formidable à un véritable choc des civilisations. Car ce sont deux mondes bien distincts qui s'affrontent tout d'abord. Des milieux sociaux qui en général s'évitent, se regardent en chien de faïence ou se méprisent mais qui dans le cas présent font contre fortune bon cœur. L'acteur/scénariste/réalisateur signe une œuvre beaucoup plus profonde que ses précédents longs-métrages et touche le spectateur au cœur. Une manière de désacraliser cette marginalité qui souvent fait peur ou laisse indifférent. Depuis, bien sûr, les choses ont changé pour évoluer vers un contexte plus sombre et dangereux que jamais. Qu'importe qu'aujourd'hui l'image de nos héros ressemble presque davantage à celle d'un Épinal qu'à la réalité violente qui sévit la nuit (et même le jour) dans les rues des grandes villes. On sort de la projection sourire aux lèvres d'avoir assisté à une véritable aventure humaine servie par d'excellents interprètes... À noter que la bande musicale est l’œuvre de Francis Cabrel...

 

1 commentaire:

  1. Tu m'as donné envie, je vais essayer de le choper à un Cash à 3 € ou sur Rakuten... Merci.

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