Quelque part entre The
Abandoned du
réalisateur espagnol Nacho Cerdà pour l'isolement de son héroïne
et nombres de thrillers ou films de fantômes plus ou moins
malveillants, le dernier long-métrage de David Bruckner, auteur en
2017 du sympathique The Rituel
revient en 2021 avec un nouveau long-métrage, toujours dans cette
même veine horrifique qui semble être son fond de commerce depuis
ses débuts et jusqu'à maintenant (l'année prochaine devrait
logiquement sortir son remake du Hellraiser
de Clive Barker). The Night House
(sorti chez nous en septembre sous le titre La
proie d'une ombre)
est le genre de sujet qui en théorie ne devrait pas trop faire de
vagues vu qu'il s'inscrit dans un tsunami de longs-métrages
empruntant tous le thème de la maison hantée ou des fantômes. Un
de plus aurons-nous donc comme première pensée à l'annonce de ce
film qui contrairement aux apparences tente d'apporter des idées
nouvelles. Ce dont ne peuvent pas toujours se vanter la plupart des
productions du genre. Pourquoi comparer l’œuvre de David Bruckner
à celle de Nacho Cerdà alors même que les deux réalisateurs
n'abordent pas vraiment les mêmes thématiques ? Simplement
parce que le premier, dans une moindre mesure certes, parvient à
retrouver ce sentiment d'angoisse, de déchirure émotionnelle et de
solitude que l'espagnol exploitait en terre étrangère et que
l'américain conquiert avec une héroïne qui, si elle semble bien
connaître le lieu d'existence qu'elle partageait avec son époux
suicidé, va se rendre rapidement compte que la vie qu'elle menait
jusqu'ici cachait une réalité beaucoup plus sombre...
C'est
en partie là ce qui fait le sel de cette sympathique production
horrifique dont le matériau de base repose sur l'écriture des
scénaristes Ben Collins et Luke Piotrowski. Mais c'est aussi sans
doute malheureusement à cause de cette approche pas forcément
antinomique entre thriller et fantastique que le film montre sa plus
grosse faiblesse. Un certain ridicule même et sur lequel les
amateurs de récits bien tordus auraient préféré faire l'impasse.
Jusqu'à aujourd'hui, Owen (l'acteur Evan Jonigkeit) et son épouse
Beth (Rebecca Hall) vivaient heureux. Mais pour on ne sait quelle
raison, lui se décide un jour à prendre la barque attachée au
ponton de la magnifique demeure qu'il a lui-même construite de ses
mains pour se rendre au milieu d'un lac et s'y suicider d'une balle
dans la tête. Un choc forcément pour ses proches et surtout pour
Beth qui malgré son fort caractère va vivre des jours et des nuits
à venir particulièrement difficiles. D'autant plus que certains
événements étranges commencent à se produire. Des bruits suspects
viennent la réveiller. Le parquet craque sous le poids apparent d'un
visiteur nocturne. De plus, la chaîne hi-fi se déclenche toute
seule, la jeune femme reçoit des sms de celui qui insiste pour se
faire passer pour son mari décédé, et entend même la voix d'Owen
lui murmurer des mots à l'oreille...
Toute
la subtilité de The Night House repose
sur l’ambiguïté des événements qui se produisent alors à
l'écran, le spectateur s'interrogeant sur la véracité des faits ou
sur une explication qui viendrait démontrer de manière fort logique
l'état de fragilité mentale dans laquelle une femme qui vient de
perdre celui qu'elle aime est plongée. Par couches successives,
David Bruckner ajoute des éléments qui nous poussent à douter de
ce qui se produit en conviant outre une approche fantastique, le
thriller. Si les seconds rôles sont relativement rares (Sarah
Goldberg, Vondie Curtis-Hall et Stacy Martin demeurant les
principaux), ils alimentent ce climat de suspicion qui perle tout au
long du film. La moindre parole ou attitude devenant alors l'objet
d'une interrogation de la part de l'héroïne. On pourrait également
comparer le film de David Bruckner à celui de Leigh Whannell sorti
l'année dernière, The Invisible Man.
Ou d'un côté l'histoire d'une femme traquée par son mari violent
devenu invisible et de l'autre, une épouse poursuivie par le fantôme
du sien. The Night House prend
une forme réellement intrigante dont il est impossible d'évoquer la
substance sans révéler certains fondamentaux du récit.
Malheureusement, le film se vautre lamentablement lors de son dernier
acte, grotesque et inutile avec son effet-miroir qui quelques
instants permettait au réalisateur de nous offrir quelques visions
intéressantes pour ensuite nous infliger un final aussi ringard que
ridicule. Évacuée cette déception, The Night
House n'en
demeure pas moins une bonne surprise...
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