Après le drame Cody
Fitz en
2011 et le thriller de science-fiction Incontrol
en 2017, le réalisateur américain Kurtis David Harder revenait il y
a deux ans avec Spiral,
drame horrifique et thriller baignant dans une bain de conservatisme,
d'homophobie et de racisme. Découle de cette approche, une œuvre
étrange bien qu'étant sensiblement peu inspirée puisque comme
pourra le constater le spectateur, le film emprunte à quelques
grands classiques de l'effroi comme peut notamment l'être Le
Locataire
de Roman Polanski. Il y a en effet dans ce brillant exercice de style
qui sans doute en énervera certains par certains choix narratifs,
tout ou partie de l'enfer que vécu le petit immigré polonais
Trelkovsky, convaincu d'être poussé au suicide par ses voisins.
Dans le cas présent, les symptômes que ressent Malik (excellent
Jeffrey Bowyer-Chapman) ne sont plus à mettre sur le compte du
dépaysement ou de la solitude mais plutôt sur les valeurs d'une
Amérique qui refuse le changement. Il s'agit là aussi pour le
réalisateur d'étudier les conséquences d'un traumatisme lointain
ayant laissé de profondes cicatrices chez son personnage principal.
Ses seconds rôles n'ont rien des rednecks ''régressistes'' que l'on
s'attendrait voir débouler dans ce genre de récit. Non, les
personnages façonnés par Lochlyn Munro ou Chandra West ont ceci
d'inquiétants qu'ils ressemblent à n'importe quel américain moyen.
De ceux, qui fiers de leur nation, plantent le drapeau de leur nation
dans leur jardin...
L'intrigue
de Spiral repose
sur une somme d'ambiguïtés qui permettent à Kurtis David Harder de
semer le doute à chaque instant. Doit-on craindre que Malik soit
atteint de délire de persécution ? Les époux Marshal et
Tiffany sont-ils vraiment ceux qu'ils semblent être ou leurs
sourires et leur attitude dissimulent-ils de sombre desseins ?
C'est tout l'enjeu (ou presque) de Spiral.
Drame, thriller, critique sociale, et même, oui, fantastique. De cet
élément qui dans le final de Get Out
(Jordan Pell, 2017) justifiait tout ce qui précédait et qui dans
le cas présent jette un froid. Comme si la route toute tracée d'un
classique du cinéma paranoïaque en devenir était contrecarrée par
un détour gâchant tout ou partie du propos. Car c'est bien là que
le bât-blesse. Cet attirail fantastique qui rallonge
superficiellement l'intrigue tout en lui donnant une saveur dont il
n'avait certainement pas besoin pour être un très bon long-métrage.
Autre film ou autre genre qui trouve les faveurs d'un certain public
et dont se sert Kurtis David Harder pour les attirer jusqu'à lui :
Midsommar
de Ari Aster et les nombreuses et récentes visions du phénomène
des sectes sur grand écran.
Car
à l'image du voyage dans le temps ou des films de zombies, les
sectes connaissent un important regain d'intérêt qui donne parfois
lieu à d'authentiques pépites (Black Death
de Christopher Smith en 2010 ou The Invitation
de Karyn Kusama en 2015) mais aussi à des productions ambitieuses
mais imparfaites comme cela est le cas avec Spiral.
Pour autant, le film n'est pas dénué d'intérêt puisqu'il décrit
la lente perte de repères d'un homme face au regard des autres et à
ce qu'ils peuvent penser de lui. Si l'aspect fantastique de Spiral
est ''foireux'' (dans le sens qu'il conviendra au spectateur de
choisir), voire ridicule dans son approche, tout ce qui précède
cette fin inappropriée relève de la réussite. Kurtis David Harder
signe une œuvre oppressante, paranoïaque, habitée par un Jeffrey
Bowyer-Chapman franchement convainquant. La bande musicale de Avery
Kentis nous immerge dans une ambiance retranscrivant parfaitement cet
état de fébrilité et d'angoisse que revêt l'individu convaincu
d'être la victime d'un complot. Un long-métrage qui mériterait
presque d'être découvert expurgé de ses douze dernière minutes...
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