Pauvre Daniel Cohen, qui
depuis Les Deux Mondes
avec Benoît Poelvoorde ne cherche sans doute pas à acquérir plus
d'étoiles que celles que les critiques lui ont octroyé mais
mériterait sans doute quand même davantage de considération. Car
cette comédie qui sort des sentiers battus méritait probablement
plus que les trop rares louanges que certains eurent la gentillesse
et l'intelligence de lui accorder. Tout comme son œuvre suivante,
Comme un Chef,
qui unit à l'écran Jean Réno et Michael Youn. Un petit film
certes, mais après La Cuisine au Beurre
de Gilles Grangier en 1963, L'Aile ou la Cuisse
de Claude Zidi en 1976 ou encore Cuisine
Américaine en
1998, que pouvions nous attendre du cinéma comique hexagonal du
vingt et unième siècle lorsqu'il celui-ci s'intéresse de près à
ce phénomène qui depuis des années a même ses entrées sur nos
postes de télévision ? La grande cuisine. La gastronomie. Ses
chefs étoilés. Ses commis, ses couverts, ses clients, ses coups de
feu et surtout, ses recettes. C'est dans ce contexte que se
rencontrent donc deux générations d'interprètes. Jean Réno, cette
force de la nature campe ici le grand chef étoilé du Cargo-Lagarde,
Alexandre Lagarde. Niant l'intérêt de faire évoluer ses recettes
vers la cuisine moléculaire, stagnant depuis que son épouse et lui
sont séparés, le voilà menacé par Stanislas Matter, un
actionnaire du Cargo-Lagarde, d'être purement et simplement renvoyé
s'il perd une étoile lors de la prochaine course
aux étoiles...
Heureusement,
le destin va lui faire croiser la route de Jacky Bonno, un jeune
cuisinier plein de talent qui connaît sur le bout des doigts la
carrière et les recettes de son aîné. Alors qu'il cumule les
petits boulots sans lendemains, Alexandre Lagarde lui propose un
stage dans ses cuisines, ce que Jacky s'empresse d'accepter.
Ensemble, ils vont devoir composer avec leur caractère respectif et
surtout avec la fâcheuse manie qu'a le jeune homme de vouloir
réinventer les recette du grand chef... Le scénario de Daniel Cohen
est on ne peut plus simple. Ce que l'on ne lui reprochera pas puisque
Comme un Chef
est d'abord et avant tout, une comédie légère. La présence de
Michael Youn semble tout d'abord abonder dans ce sens mais l'ancien
transfuge de l'émission Le
Morning Live
et de quelques longs-métrages pas toujours très fins a troqué ses
tenues de guignol pour celui de second dans les cuisines d'un grand
chef. Autant dire que son attitude se devait d'être à l'aune de
celle de l'immense Jean Réno. Loin des bouffonneries passées,
Michael Youn s'avère plutôt amusant. D'autant plus que le film
réserve quelques situations des plus cocasses durant lesquelles il
sera difficile de se retenir de rire (la séquence dans le restaurant
de cuisine moléculaire en est un bon exemple)...
Face
aux deux cuisiniers, l'insupportable personnage de service : le
fameux actionnaire Stanislas Matter qu'interprète savoureusement
Julien Boisselier de sa voix toujours suave. À noter la présence de
l'acteur Pierre Vernier que l'on a notamment beaucoup vu auprès de
Jean-Paul Belmondo dans les années quatre-vingt et qui dans le film
de Daniel Cohen interprète le rôle de Paul Matter, le père du
scélérat... Léger, frais et vif, Comme un Chef
est une comédie vraiment sympathique qui offre quelques savoureuses
séquences auxquelles participent également parfois le trio
d'acteurs Serge Larivière, Issa Doumbia et Bun Hay Mean. Tout juste
le film manque-t-il de cette personnalité qui lui aurait été
propre et l'aurait sans doute élevé au niveau de L'Aile
ou la Cuisse,
œuvre qui parmi les trois citées plus haut lui ressemble sans doute
le plus. Entre nominations et distinctions, le film a remporté
quelques prix, parmi lesquels un triste Gérard
du Désespoir Masculin
remis à Jean Réno pour son interprétation lors de la septième
cérémonie des Gérard
du Cinéma.
Mieux vaut en rire qu'en pleurer. Ce prix pas très raisonnable
n'enlève en rien les qualités du film si petites soient elles...
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