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mercredi 3 juin 2020

Invasion of the Blood Farmers d'Ed Adlum (1972) - ★★★★☆☆☆☆☆☆ (🥔🥔🥔🥔🥔🥔🥔☆☆☆)



Non mais, de qui se moque-t-on ? Qui, à part le réalisateur américain Ed Adlum, oserait présenter en vedette un héros qui porte sa montre à la main droite ? Quand on voit le pedigree cinématographique du bonhomme, on comprend que Invasion of the Blood Farmers soit resté orphelin. Scénariste, producteur, acteur et donc réalisateur de la chose en question, Ed Adlum a sans doute conçu son œuvre sous l'effet de puissants psychotropes. Si l'allemand Werner Herzog a imposé en 1976 aux interprètes de son mythique Herz aus Glas de tourner sous hypnose, ceux de cette petite bande crapoteuse, arriérée, paysanne et psychédélique signée d'Ed Adlum semblent avoir écoulé la totalité du stock d'euphorisants d'un apothicaire itinérant. Le contexte est original : Imaginez un Panoramix sous acides soliloquant des lignes de dialogues propres aux schizophrènes. Imaginez les habitants du comté de Winchester bourrés, vautrés au bistrot du coin regardant l'un d'entre eux agoniser au sol sans qu'aucun d'entre eux n'ait l'idée de lui venir à l'aide. Imaginez des druides interprétés par des suppôts de Satan qui auraient eu fière allure aux côtés du gourou Charles Manson. Imaginez-les drainer le sang d'âmes plus ou moins pures afin de ressusciter la reine Onhorrid. Imaginez un certain docteur Roy Anderson étudier les conséquences d'accroissement sanguins d'un tel traitement sur les sujets victimes de ces exactions. Enfin, imaginez la fille de ce dernier, roucoulant au bras du héros lors de séquences aussi profondes qu'une idylle partagée entre deux personnages de soap opera, et vous obtenez sans doute l'un des films d'épouvante les plus curieux de l'histoire du cinéma...

Aidé par une pellicule marquée au fer rouge par un grain particulièrement prononcé, ce petit film d'horreur né de l'esprit passablement dérangé d'un réalisateur sous influence, Invasion of the Blood Farmers est typique de ces longs-métrages qui ont éclot dans les années Soixante/soixante-dix et qui mêlaient avec allégresse psychédélisme, horreur et amateurisme. L'Amérique profonde dans tous ses états. Le genre de film qui en Europe n'a la chance d'avoir sa petite fiche que sur des sites dont la vocation première et d'établir la liste exhaustive des nanars ''Made in'' la Terre entière. On comprendra donc que l'excellent Nanarland s'en soit fait l'écho. Parce que derrière le caractère esthétiquement dérangeant d'une bobine qui sans doute a pris un violent coup de soleil, Invasion of the Blood Farmers est surtout un bon gros navet. Qui ne marquera pas les esprits pour ses saillies sanglantes qui se résument à bien peu de chose : ici, deux types à chemise rouge, à salopette bleue et à chapeau de paille franchement glauques kidnappent hommes et femmes et pratiquent sur eux ce qui semble tout d'abord s'apparenter à des embaumements. Mais lorsque l'on n'a pas le matériel adéquat, on fait avec les outils du bord. Un tube enfoncé dans le corps des victimes, caché sous des bandages, ce qui permet d'économiser, et sur le latex, et sur le talent des maquilleurs. Exsangues, ne reste plus qu'à se débarrasser des corps et d'utiliser le sang afin de voir s'il est compatible avec l'idée de ressusciter la reine Onhorrid. L'époux du corps blême et allongé dans son sarcophage se nomme Creton. Et le type qui l'interprète, lui, s'appelle Paul Craig Jennings. Très motivé, l'acteur n'en est pas moins mauvais. Trop théâtral pour être crédible, sans doute aurait-il fait son petit effet chez le John Waters des débuts (genre, Mondo Trasho ou Multiple Maniacs)...

À dire vrai, le seul qui s'en sorte à peu près convenablement, c'est Norman Kelley qui incarne le docteur Roy Anderson. Ce qui ne l'a pas empêché de disparaître totalement des radars après son apparition dans Invasion of the Blood Farmers. Comme une très grande partie du casting d'ailleurs, dont je me suis fait un devoir de consulter les biographies. Jack Neubeck et Warren D'Oyly-Rhind ont également joué dans Shriek of the Mutilated de Michael Findlay deux ans plus tard et puis... plus rien. Deux seulement semblent avoir tiré ''profit'' de leur passage sur le tournage de Invasion of the Blood Farmers. Tout d'abord John Stewart, qui dès l'année suivante a peut-être eu la chance de croiser l'immense Al Pacino sur le tournage de Serpico de Sidney Lumet et a ensuite poursuivi sa carrière jusqu'en 1994 avec Les Indians de David S. Ward avec Charlie Sheen et Tom Berenger. Quant à Richard Kennedy, il a surtout joué pour le petit écran, apparaissant notamment dans l'épisode pilote du Nouvel Homme Invisible en 1976, Drôles de Dames la même année, Happy Days – Les Jours Heureux en 1981 et même deux épisodes de La Petite Maison dans la Prairie en 1979 et 1982. Je ne conseillerai pas à grand monde de tenter de regarder Invasion of the Blood Farmers. Les ''complétistes'' se feront un plaisir de le découvrir. Tout autant que les amateurs de nanars. Les autres, eux, risquent de demeurer circonspects, voire moqueurs devant cette petite bande horrifique aussi désopilante qu'innocente...

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