Il faut le savoir, mais
si Lucio Fulci est connu pour avoir été l'un des maîtres
incontestés du film d’horreur transalpin dans les années
soixante-dix et quatre-vingt, il a avant cela touché à d'autres
genres cinématographique. Passant de nombreuses comédies (son
premier long-métrage I Ladri
en
1959, I Due della Legione
en 1962, voire la comédie musicale avec I
Ragazzi del Juke Box
en 1959 ou Urlatori alla Sbarra
en 1960 et même la comédie sexy La Pretora en
1976) au western (Le Temps du Massacre
en 1966, Les 4 de l’apocalypse
en 1975, Sella d’Argento
en 1978), au thriller (Perversion Story
en 1969), au drame historique (Liens d’Amour et
de Sang 1969,
jolie traduction française de Beatrice Cenci),
au giallo (Le Venin de la Peur en
1971, La Longue Nuit de l’Exorcisme
en 1972), à l'aventure (Croc-Blanc
en 1973 et sa suite l'année suivante)... Dès 1979, Lucio Fulci se
lance dans une série de longs-métrages qui feront sa renommée
auprès des amateurs de films d'épouvante, d'horreur, fantastiques
et gore. Après Lo Squartatore di New York,
la qualité de ses œuvres commence doucement à péricliter. S'il
continue à réaliser quelques pellicules horrifiques (Aenigma
en 1987, Zombi 3
en 1988 ou Demonia
en 1990), il se penche à nouveau sur d'autres genres. La
science-fiction post-apocalyptique avec I
guerrieri dell'anno 2072,
le thriller érotique avec Il Miele del Diavolo
en 1986, et dans le cas qui nous intéresse ici, l'Heroic Fantasy
avec La Conquista de la Tierra Perdida,
titre espagnol beaucoup plus enthousiasmant que la réductrice
traduction française, Conquest...
Coproduction
mexico-italo-espagnole sortie sur les écrans italiens en juin 1983,
en Espagne deux mois après et au Mexique deux ans plus tard, La
Conquista de la Tierra Perdida
est d'une certaine manière, un test de résistance pour quiconque
voudrait entrer dans le cercle (pas si fermé que cela) des amateurs
de nanars. Esthétiquement, le film opte pour un visuel tel que la
prise de stupéfiants au préalable risque d'avoir différentes
conséquences. Soit le mélange d'herbe couplé à la photographie
d'Alejando Ulloa annulera tout effet recherché en matière
d'euphorisant, soit c'est l'overdose (c'est à se demander si le
bonhomme n'était pas sous l'emprise de tel ou tel opiacé!).
Contre-jours, brume permanente, surexposition, fondus entre deux
images, La Conquista de la Tierra Perdida est
un festival qui vous enverra illico consulter votre opticien préféré.
On s'y abîme les yeux comme rarement au cinéma. Une souffrance qui
s'avère cependant essentielle pour une œuvre contrainte de planquer
la pauvreté des décors et des costumes derrière un amoncellement
d'effets visuel souvent insupportables...
L'existence
de La Conquista de la Tierra Perdida étant
sans doute due au succès mondiale de Conan le
Barbare de
John Milius sorti un an auparavant, Lucio Fulci s'est comme d'autres
homologues italiens engouffré dans la brèche pour pondre un ersatz
particulièrement navrant mais peut-être en réalité, plus proche
de La Guerre du Feu de
Jean-Jacques Annaud qui lui, sorti en salle deux ans plus tôt.
Avouant lui-même que les producteurs voulaient absolument produire
un film avec l'une des grandes stars du cinéma mexicain Jorge
Rivero, le cinéaste italien réalise un film préhistorique sans
dinosaures mais avec une palanquée de créatures toutes plus
ridicules les unes que les autres : voyez par vous-même :
des hommes-loups, d'autres ''armurés'' de casques en métal (un
anachronisme si l'on tient compte du fait que l'âge de fer remonte à
un peu plus d'un millénaire seulement avant la naissance de Jésus),
des zombies (la ''fulci's
touch'')
et des humanoïdes dont on cherche encore la provenance (des
hommes.... glaise?). La Conquista de la Tierra
Perdida
nous conte le récit d'une amitié entre deux valeureux héros. Mace
(Jorge Rivero) et Ilias (Andrea Occhipinti, ce dernier étant en la
possession d'un arc magique dont veut s'emparer la sorcière Ocron
(l'actrice Sabrina Sellers).
Visuellement
moche, mollement interprété, mis en scène sans conviction et
plombé par une esthétique fort désagréable et des décors sans
intérêts. La musique électronique (!!!) de Claudio Simonetti,
membre du groupe de rock progressif italien Goblin
auteur des magnifiques scores de Profondo Rosso
et Suspira
(tout deux réalisés par Dario Argento), de Zombie
(George Romero) ou de Contamination
(Luigi Cozzi) signe dans le cas présent une soupe indigeste qui a de
plus, le malheur de ne pas coller avec le thème du film. Et c'est
sans évoquer les effets-spéciaux, tous plus risibles les uns que
les autres. Entre une poignée de volatiles presque aussi foireux que
ceux du diptyque Birdemic de
James Nguyen et des tirs de flèches directement gravées à même la
pellicule, on retiendra cependant les quelques saillies gore dont à
le secret le réalisateur italien. Dans le genre nanar, La
Conquista de la Tierra Perdida demeure
un monument, mais reste dans la filmographie de Lucio Fulci, l'un de
ses plus mauvais films...
En bonus, un titre de Goblin extrait de la bande-son de Contamination
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